M. Alain Bertrand. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, selon le dernier baromètre du 115, dévoilé mercredi 5 décembre, la prise en charge des sans-abri s'est encore détériorée depuis un an. Dans les trente-sept départements étudiés, les demandes d'hébergement ont augmenté de 37 % par rapport au mois de novembre 2011. Le dispositif ne parvient plus à répondre aux besoins : le taux de réponses négatives, extrêmement élevées, atteint 78%. Cette tension affecte des territoires jusque-là épargnés. Fait plus frappant encore, on observe l'augmentation du nombre de familles appelantes et de jeunes. Parmi les demandes, 53 % sont désormais formulées par des familles ; en un an, elles sont en hausse de 60 %.
Mardi dernier, lors de la clôture de la conférence nationale de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale, M. le Premier ministre a annoncé la création de 8 000 nouvelles places d'hébergement, qui s'ajoutent aux moyens supplémentaires accordés pour 2012, lesquels seront consolidés en 2013.
Point positif, le plan hivernal a été mis en œuvre de manière anticipée et accélérée. Madame la ministre, vous avez aussi évoqué la possibilité de réquisitionner un certain nombre de bâtiments. La réquisition fait certes partie de la panoplie légale, mais ne nous trompons pas de cible : la responsabilité de l'hébergement d'urgence incombe avant tout, quelles que soient les conditions, à l'État.
Je vous poserai une question qui pourrait paraître décalée en ce début de grand froid, mais qui ne l'est pas ; elle a trait à l'absence de réponse annuelle au problème de l'hébergement d'urgence, celle-ci étant limitée à l'hiver. Or cet hébergement n'est pas une affaire de saison. Nous sommes aujourd'hui face à une gestion au thermomètre, en stop and go, qui conduit à remettre les personnes à la rue dès que les températures sont plus clémentes.
Pourtant, au mois de juillet, les demandes reçues par le 115 ont été aussi importantes qu'entre les mois de décembre et de mars, mais elles ont moins souvent abouti, en raison, notamment, de la fermeture des places d'hébergement hivernales.
La question du groupe du RDSE est donc la suivante : que comptez-vous faire en matière de gestion annuelle de l'hébergement d'urgence ?
Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement. Vous soulevez dans votre question, monsieur le sénateur, deux points essentiels. Le premier, c'est que l'aggravation de la crise rend encore plus difficile la situation du mal-logement et a même jeté à la rue, ces derniers mois, des familles. Le second, c'est que le plan hivernal n'est pas satisfaisant parce que l'on meurt plus dans la rue en été qu'en hiver et que les besoins sont tout aussi criants en période estivale.
Voilà pourquoi le Gouvernement a décidé - vous avez mentionné les annonces du Premier ministre - de sortir de la logique du thermomètre, de mettre en place un dispositif d'hébergement pérenne comprenant l'ouverture de centres parfaitement adaptés et celle de 9 000 places de logement accompagné - soit 8 000 places supplémentaires par rapport au budget pour 2013 -, afin de favoriser l'accession au logement traditionnel.
Par ailleurs, j'espère que nous mettons en œuvre pour la dernière fois le plan grand froid, qui prévoit l'ouverture de gymnases, de lieux pas vraiment adaptés. J'espère aussi que nous aurons les moyens de répondre aux besoins des familles. Il est parfois difficile d'identifier ces dernières, car les parents à la rue se cachent pour maintenir le contact avec leurs enfants. Il nous incombe d'engager une telle politique.
Monsieur le sénateur, vous avez indiqué, avec raison, que ces questions relevaient de la responsabilité de l'État. C'est pourquoi dans certaines agglomérations - je pense en particulier aux régions Île-de-France, Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d'Azur - le Gouvernement a justement décidé de réquisitionner le cas échéant des bâtiments vides pour assumer sa responsabilité qui est de trouver des lieux d'accueil pour des gens qui sont aujourd'hui à la rue.
Nous aurons l'occasion d'en débattre, mais je tiens à vous informer que, sur les deux points que vous avez soulevés, le Gouvernement a pris la décision de mettre en œuvre une politique d'hébergement différente, qui s'appuie sur un principe fondamental : le droit à un toit.
M. le président. La parole est à M. Alain Bertrand, pour la réplique.
M. Alain Bertrand. Madame la ministre, nous demandons une action à la fois annualisée et plus forte, manifestement conforme à la stratégie que vous venez de nous présenter. Votre réponse convient donc parfaitement au groupe du RDSE.
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