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Marcel Rainaud
Question orale sans débat N° 27 au Ministère de la décentralisation


Réponse aux inquiétudes des financements bancaires pour les collectivités locales

Question soumise le 12 juillet 2012

M. Marcel Rainaud appelle l'attention de Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique sur la situation des nombreux élus locaux qui l'alertent sur la remise en cause des capacités d'investissement de leur collectivité résultant des difficultés à obtenir de la part des établissements bancaires des prêts ou encore des lignes de trésorerie.

La Caisse des dépôts et consignations devrait débloquer 5 milliards d'euros et la Banque postale lancera une offre de crédits de développement local à hauteur de 2 milliards d'euros. Mais ces enveloppes sont financées via une société de crédit foncier sur le même modèle que le secteur bancaire et n'offrent pas davantage de solution. Il lui semble que ces initiatives répondent à une situation d'urgence et non à la pérennité de l'investissement des collectivités.

Les collectivités ont trop souffert du Gouvernement précédent qui les a vues comme des entités dispendieuses et irresponsables, comme des petits enfants capricieux et boulimiques.

Face à des banques craintives, une agence publique de financement serait la solution. Elle permettrait de concrétiser la volonté politique propre des collectivités en leur offrant des solutions de financement et sur le long terme, réduirait l'endettement grâce à l'accroissement de leur capacité d'autofinancement.

Il souhaite donc connaître les dispositions que le Gouvernement entend prendre sur ces questions et savoir si l'Agence de financement des investissements publics, soutenue largement par l'appel des élus locaux du 23 mai 2012, verra le jour.

Réponse émise le 25 juillet 2012

M. Marcel Rainaud. Madame la ministre déléguée, de nombreux élus locaux m'ont alerté sur la remise en cause des capacités d'investissement de leurs collectivités en raison des difficultés qu'elles rencontrent pour obtenir de la part des établissements bancaires des prêts ou des lignes de trésorerie. L'année 2012 est celle des incertitudes pour les élus locaux de tous les échelons.

Dans la mesure où les collectivités locales impulsent une dynamique économique dans les territoires et représentent 45 % du chiffre d'affaires des entreprises partenaires, la baisse des investissements aura une incidence forte en matière d'emplois. Rappelons-nous que un milliard d'euros d'investissement représentent 7 500 emplois directs.

Alors que les collectivités devraient créer de nouvelles infrastructures ou procéder au renouvellement des anciennes en vue d'améliorer la vie de la population, elles n'en ont pas, ou n'en ont plus les moyens.

À cet égard, je veux évoquer la situation du syndicat mixte des milieux aquatiques et des rivières de l'Aude, créé lorsque j'étais président du conseil général, au lendemain des inondations meurtrières de 1999. Il regroupe les 438 communes du département, organisées autour de 18 syndicats de bassin. Aujourd'hui, sa responsabilité est grande, puisqu'il mène le plan d'action de prévention des inondations, le PAPI, indispensable pour la mise en sécurité de nos communes face à la montée des eaux.

Or, à ce jour, un problème se pose, lié à l'accès à l'emprunt des maîtres d'ouvrage. Sur une enveloppe de 80 millions d'euros, 45 millions sont d'ores et déjà engagés et 35 millions sont en attente, parce que les syndicats de bassin n'obtiennent ni ligne de trésorerie ni prêt de la part des organismes bancaires.

La conséquence est, au mieux, un décalage dans le temps et, au pire, l'abandon des projets et la baisse de l'enveloppe pour le PAPI à venir. Ce n'est là qu'un cas particulier, mais le constat est général et la situation préoccupante.

La Caisse des dépôts et consignations et la Banque postale se sont mobilisées, mais ces initiatives répondent, sur le fond comme sur la forme, à une situation d'urgence et non au besoin de pérennité de l'investissement des collectivités.

Face à des banques craintives, une agence, ou une banque publique de financement serait la solution. Elle permettrait de concrétiser la volonté politique propre des collectivités en leur offrant des solutions de financement.

Madame la ministre, j'aimerais connaître les dispositions que le Gouvernement entend prendre sur la question de l'agence de financement des investissements publics et, si elle devait voir le jour, savoir quand elle sera mise en place.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation. Monsieur le sénateur, vous venez d'exprimer votre inquiétude quant aux difficultés auxquelles sont confrontées les collectivités territoriales. Vous avez cité, spécifiquement, le cas du syndicat mixte des milieux aquatiques et des rivières de l'Aude, que vous connaissez bien, et sur lequel vous avez cité des chiffres qui, effectivement, sont inquiétants.

Je voudrais vous dire combien, au cours des dernières semaines, voire des derniers jours, le Gouvernement s'est mobilisé sur ce problème de l'accès au crédit des collectivités locales, et ce dans un double objectif : d'une part, répondre aux problèmes les plus urgents qui lui ont été signalés - un certain nombre de collectivités territoriales se trouvaient en effet dans une grande difficulté ; d'autre part, rechercher un mode de financement durable et sécurisé, ces deux qualificatifs nous semblant essentiels.

S'agissant du premier point, je peux dire que deux dispositions ont immédiatement été prises à la suite de la révocation par Dexia des lignes de trésorerie de plusieurs collectivités.

D'une part, la Banque postale a fait passer de 2 milliards à 4 milliards d'euros l'enveloppe des crédits de court terme et a engagé, pour 2012, une enveloppe de crédits de long terme d'un montant de 2 milliards d'euros. D'autre part, la Caisse des dépôts et consignations devrait mettre à disposition un montant de 3 milliards d'euros, sur une enveloppe de 5 milliards d'euros ouverte pour 2012.

On le sait, si elles ont opportunément permis de soulager les collectivités en difficulté, ces deux dispositions ne répondent pas aux conditions préalablement évoquées de durabilité et de sécurisation pour financer des investissements à un coût raisonnable.

Vous l'avez dit, monsieur le sénateur, et nous le savons bien, les collectivités territoriales couvrent plus de 70 % des investissements nécessaires sur notre territoire.

J'en viens au deuxième point, portant sur les solutions à venir pour un financement durable et sécurisé.

Au-delà des initiatives particulières prises par les grandes collectivités, qui peuvent émettre directement sur les marchés financiers, il est nécessaire de travailler dès maintenant à la mise en œuvre de la banque de développement local, issue du rapprochement de la Banque postale et de la Caisse des dépôts et consignations. Nous y travaillons.

Vous avez également évoqué l'agence de financement des collectivités territoriales, dont plusieurs associations d'élus demandent la création.

Aujourd'hui, les promoteurs de ce dispositif comme le Gouvernement s'accordent à reconnaître que ce projet ne peut pas se traduire par une garantie de l'État sur l'agence et sur les prêts qu'elle accorderait aux collectivités locales. Or, à ce jour, la création d'un établissement public de cette nature n'est pas accompagnée de la certitude que serait écartée l'hypothèse d'une garantie implicite de l'État. C'est pourquoi nous travaillons main dans la main avec les promoteurs de cette agence, afin de trouver une solution efficiente et très rapidement opérante. Évidemment, nous le ferons dans le prolongement de la réflexion qui a également été conduite par la Cour des comptes, laquelle recommandait, dans son dernier avis sur le financement de l'économie, de permettre aux collectivités territoriales de disposer de plusieurs outils de financement pour leurs investissements. C'est tout le travail que nous sommes en train de conduire ensemble. Personnellement, je le conduis auprès de Marylise Lebranchu, dans le cadre de la délégation qui m'a été accordée par le Président de la République et le Premier ministre.

M. le président. La parole est à M. Marcel Rainaud.

M. Marcel Rainaud. Madame la ministre, les collectivités ont trop souvent souffert du discours du gouvernement précédent. Elles étaient vues comme des entités dispendieuses et irresponsables. Votre réponse témoigne de votre volonté de considérer les élus locaux comme des élus responsables, même si je dois vous dire que, à cet égard, je demeurerai attentif. En tout cas, voir s'établir une confiance réciproque entre l'État et les collectivités, c'est aussi cela, le changement, et je vous en remercie !

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