M. Christian Namy attire l'attention de M. le ministre de la défense sur la décision concernant les mesures de dissolution, de réorganisation et de transfert des unités et établissements du ministère de la défense qu'il a signée le 31 juillet 2012, et qui condamne dès 2013 le 8e régiment d'artillerie de Commercy.
Le bassin de vie de Commercy se trouve menacé par ce départ brutal. Au-delà de la rupture historique entre un régiment et un territoire, c'est tout le confort de vie des habitants qui est menacé. Bien entendu, les soldats ne vont pas être licenciés. Mais c'est toute la structure entourant ces serviteurs de la patrie qui s'écroule. Les collectivités ont investi des sommes importantes depuis de nombreuses années afin de renforcer la qualité de vie des habitants du bassin de Commercy, rénovant les établissements scolaires, l'habitat, accompagnant des entreprises qui souhaitaient se développer sur la base de perspectives qui se trouvent aujourd'hui faussées par le départ du 8e RA.
Aussi il lui demande s'il ne peut pas revenir sur sa décision de fermer dès 2013 la base militaire de Commercy afin de permettre de trouver une solution satisfaisant le plus grand nombre, et assurant surtout la survie d'un territoire fragilisé par cette décision.
M. Christian Namy. Je souhaite attirer l'attention du ministre de la défense sur la disparition, dès 2013, du 8e régiment d'artillerie de Commercy dans le cadre des mesures de dissolution, de réorganisation et de transfert des unités et établissements du ministère de la défense prises le 31 juillet dernier.
Si la réduction du format, voire la suppression, du 8eRA était évoquée depuis de nombreuses années, il était convenu, et le précédent président de la République s'y était engagé, de surseoir à ces choix tant que des compensations correspondantes ne seraient pas garanties. Le contrat de développement du bassin de Commercy avait ainsi été signé le 18 juillet 2011 afin de permettre de préparer en douceur la réduction du format du régiment. Toutefois, le contrat ne prévoyait en aucun cas la disparition de ce dernier.
Le bassin de vie de Commercy se trouve donc menacé par ce départ brutal, l'arrivée future de l'entreprise Safran et les effets du contrat de développement ne correspondant pas, à ce jour, aux pertes subies par la suppression du régiment. Je vous rappelle que ce territoire est structurellement fragilisé, avec un taux de chômage atteignant pas moins de 12 % de la population active, ce qui lui a valu d'être placé en zone de revitalisation rurale.
Au-delà de la rupture historique entre un régiment et un territoire, c'est tout le confort de vie des habitants qui est menacé. En effet, les soldats du 8eRA ont des conjoints et des enfants. Les uns exercent une activité professionnelle qu'ils avaient une quasi-certitude de pouvoir poursuivre pendant quelques années encore. Les autres remplissent les écoles et ont noué des liens affectifs avec des habitants du territoire environnant.
Dans la sphère publique, les collectivités ont investi des sommes importantes afin de renforcer la qualité de vie des habitants du bassin de Commercy, rénovant les établissements scolaires, l'habitat, et accompagnant des entreprises qui souhaitaient se développer.
Ces entreprises se sont organisées en se fondant sur un objectif prévisionnel tronqué, engageant des investissements lourds afin de répondre aux besoins de leur clientèle. C'est donc encore une fois l'esprit d'innovation et le dynamisme des entreprises qui sont frappés en plein vol, autant d'éléments non pris en compte dans cette décision brutale et justifiée par la seule nécessité comptable.
Alors même que le Gouvernement annonce vouloir agir pour l'emploi, cette décision menace, dans un contexte de crise d'une violence inouïe, le quotidien de centaines de familles, au-delà des seuls militaires du 8eRA. L'État, loin de nous venir en aide, nous plonge dans le néant.
Madame la ministre, le Gouvernement ne pourrait-il revenir sur sa décision de fermer dès 2013 la base militaire de Commercy, afin que nous puissions trouver une solution satisfaisant le plus grand nombre et, surtout, assurant la survie d'un territoire fragilisé par cette décision ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de Jean-Yves Le Drian, retenu par d'autres obligations.
La dissolution du 8erégiment d'artillerie, qui interviendra effectivement à l'été 2013, a été décidée dès 2008 par le précédent gouvernement. Elle s'inscrit dans la logique de rationalisation de l'artillerie qui a prévalu lors des travaux du précédent Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale.
Commercy bénéficie depuis le 18 juillet 2011 d'un contrat de développement économique, seul contrat de ce type signé dans le cadre du plan de restructuration des armées 2008-2015, qui a la particularité de permettre d'engager les actions de redynamisation économique du territoire en amont de la dissolution effective de la formation.
L'effort budgétaire ainsi consenti par l'État est exceptionnel : il s'élève à 14,5 millions d'euros sur un total de 25 millions d'euros de financement prévus par le CDE.
Une enveloppe de 4 millions d'euros a été plus spécifiquement mise à la disposition de la commission locale du FRED, le Fonds pour les restructurations de la défense, qui a déjà accordé, en un an, plus d'un million d'euros de subventions à vingt-sept entreprises du bassin de Commercy, ce qui a permis la création de plus de cent trente emplois.
L'entreprise Système Bois Massif a également déjà transféré son siège social et une partie de sa production de la région parisienne à Commercy. Ce transfert a été subventionné par les crédits du FRED, à hauteur de 0,6 million d'euros, en contrepartie de l'engagement pris par la société de créer soixante emplois sur trois ans.
Le groupe aéronautique Safran, dont vous avez parlé, va également s'implanter à Commercy. Cette unité de production, qui représentera un investissement d'environ cinquante millions d'euros, créera dans un premier temps cent quatre-vingts emplois. L'effectif pourrait atteindre, au total, quatre cents salariés.
Le site français devrait alors produire 50 % des aubes et carters nécessaires à la nouvelle génération de moteurs LEAP, plus économes en carburant, dont 3 500 exemplaires sont déjà commandés pour l'équipement des futures flottes d'avions courts et moyens courriers d'Airbus ou de Boeing.
Ce projet a par ailleurs reçu l'appui du conseil régional de Lorraine, soucieux de développer la filière aéronautique de la région, du conseil général de la Meuse et de la ville de Commercy.
Le groupe Cockerill Maintenance & Ingénierie, domicilié en Belgique, est en pourparlers avec le ministère de la défense afin d'étudier l'opportunité et la faisabilité de la création, sur le site de Commercy, d'un centre de formation de tireurs canons et de mécaniciens de tourelles dans le cadre d'une assistance à l'exportation de matériels militaires.
Ainsi, ce sont près de six-cents emplois directs qui sont déjà attendus sur le territoire.
Certes, il y a un décalage qu'on ne peut nier entre le calendrier du départ du dernier militaire et l'arrivée effective de ces nouveaux emplois sur la zone. Néanmoins, d'une part, on retrouve la même situation dans tous les contrats de site, et, d'autre part, le niveau des futurs emplois, ainsi que leur pérennité au vu des projections de commandes de Safran, constitueront un avantage réel par rapport au passé.
En effet, contrairement au 8eRA, qui est autonome pour son gardiennage, sa restauration et ses transports, les entreprises qui s'installent, en particulier Safran, seront créatrices d'un nombre important d'emplois indirects dans ces domaines de soutien.
S'agissant des emplois induits, il importe de rappeler que les effectifs du 8eRA sont très largement composés de personnels célibataires logés au quartier. Le nombre de familles de militaires résidant actuellement sur Commercy est relativement faible, et s'il est bien entendu trop tôt pour évaluer l'importance des ménages qui s'installeront sur le bassin d'emploi dans les années à venir, il n'est pas exclu que le bilan soit positif sur ce plan également.
Par ailleurs, la commune de Commercy bénéficie aussi du dispositif de cession à l'euro symbolique. Elle a d'ailleurs commencé à en profiter par la cession du pavillon des Capucins, ensemble de logements de famille inutilisés.
En conclusion, le contrat de Commercy fait l'objet de beaucoup d'attention, d'investissements humains et de financements. Les résultats attendus sont très encourageants et seront à la hauteur des promesses, voire supérieurs à celles-ci.
Le ministre de la défense a demandé qu'une réunion placée sous le pilotage du préfet soit organisée dans les meilleurs délais afin de faire un point précis sur le degré d'avancement des mesures d'accompagnement de cette restructuration.
M. le président. La parole est à M. Christian Namy.
M. Christian Namy. Madame la ministre, je vous remercie de vos propos. Je note que, le ministre de la défense ne pouvant être parmi nous, vous l'avez représenté, mais j'observe aussi qu'il ne répond même pas aux courriers que, élus nationaux de toutes sensibilités politiques, nous lui adressons.
Je ne peux pas non plus dire que je suis pleinement satisfait de votre réponse.
En ce moment même, le maire – socialiste – de Commercy manifeste devant l'Élysée avec l'ensemble des élus locaux pour faire savoir à quel point il est insatisfait des mesures qui sont prises actuellement.
En fait, tout le monde reconnaît l'effort accompli par le Gouvernement, par les gouvernements successifs. Je rappelle toutefois, et c'est là le vrai sujet de contentieux entre nous et l'État actuellement, que le précédent président de la République – et je considère que, en République, quand un président prend une décision le président suivant doit la tenir – s'était engagé à ce que la disparition du 8eRA n'intervienne que dès lors que les emplois seraient effectivement créés sur place. Or, actuellement, il ne s'agit que de propositions de créations d'emploi.
Certes, l'implantation de l'usine Safran représente un formidable investissement, auquel mon département contribue d'ailleurs largement, avec l'aide de la région Lorraine, mais la décision prise par le ministre de fermer purement et simplement le 8eRA n'en est pas moins incompatible avec les engagements pris antérieurement.
Je vous demande donc simplement, madame la ministre, d'insister auprès de M. le ministre de la défense et de lui dire qu'il y a peut-être d'autres solutions.
D'une part, puisque nous sommes en train d'établir le Livre blanc, nous aurions peut-être pu attendre que celui-ci soit achevé pour savoir quelles étaient les conséquences effectives sur le terrain.
D'autre part, vous avez parlé, avec raison, du contrat de développement économique, mais, et c'est là la difficulté, ce contrat s'applique dans des conditions strictes et draconiennes et il n'a pas l'ampleur que nous souhaitions.
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