M. Ronan Kerdraon. Madame la ministre, mon intervention portera sur les préoccupations des gens de mer quant à l'avenir de la caisse maritime d'allocations familiales, ou CMAF.
Cette dernière, née de la fusion, voilà maintenant dix ans, des CAF commerce et pêche, accompagne les familles de marins en versant les prestations familiales ; elle joue également un rôle d'URSSAF.
Cet organisme développe aussi une action adaptée aux spécificités du monde maritime et assure une homogénéité de traitement sur l'ensemble du littoral. Il coopère également avec l'Établissement national des invalides de la marine.
Le territoire breton, dont je suis élu, compte ainsi près de 22 000 bénéficiaires.
Je rappelle que le trépied de la protection sociale du monde maritime est composé de l'Établissement national des invalides de la marine – l'ENIM –, de la caisse maritime et du service social maritime.
Or, à l'heure de la signature de la COG de la branche famille, l'État prévoit de répartir les allocataires dans les caisses d'allocations familiales de chaque département.
Une telle décision, si elle devait se concrétiser, fragiliserait le système de protection sociale du monde maritime, alors même que les orientations des organismes dédiés au monde maritime s'inscrivent pleinement dans une recherche d'efficacité au meilleur coût, par le développement des téléprocédures, la coopération entre les organismes de protection sociale pour faciliter l'accès aux droits, l'accompagnement des publics fragilisés ou encore la simplification des procédures administratives.
La disparition de la caisse maritime constituerait un signal négatif, au moment où la France veut à juste titre développer une politique maritime ambitieuse.
Par ailleurs, elle n'engendrera aucune économie majeure : les frais de personnels, qui représentent 82 % du budget, resteront intégrés dans les budgets de la branche famille – la CMAF ne représente que 0,05 % des coûts de la branche famille.
En revanche, sa disparition ne manquera pas de provoquer un problème de lisibilité pour les familles de marins, avec un risque fort sur les problématiques d'accès aux droits. Elle remettrait aussi en cause, à terme, la spécificité de l'ENIM.
Aussi, madame la ministre, pourriez-vous nous préciser les dispositions que le Gouvernement entend prendre afin non seulement de rassurer les gens de mer, mais aussi de conforter la CMAF dans son rôle essentiel au dispositif social du monde maritime ?
(Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste. – MM. André Gattolin et Yvon Collin applaudissent également.)
Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Madame Procaccia, le projet de loi sur les droits des femmes apportera une réponse à la question de l'allocation de soutien familial, l'ASF, et le rapport de Christophe Sirugue répondra à votre autre question sur les jeunes. Donc, pas d'impatience !
En ce qui concerne la caisse maritime d'allocations familiales, il faut tenir compte des remarques de l'Inspection générale des affaires sociales, l'IGAS, sur la fusion de la CMAF avec le régime général, auquel elle est déjà liée par convention. La population couverte par la CMAF est en forte décroissance, tout comme le nombre de marins. Elle ne compte que 6 388 allocataires, lorsque la plus petite CAF métropolitaine couvre 17 000 allocataires.
Par ailleurs, compte tenu de sa petite taille, cette caisse affiche un ratio de frais de gestion sur prestations très élevé ; elle ne couvre pas l'ensemble des marins et dispose d'un ancrage territorial réduit puisqu'elle ne possède qu'une caisse à La Rochelle et quatre antennes locales.
Une réflexion est donc menée pour tenir compte à la fois de la particularité de la CMAF, ne pas heurter cette population dont la spécificité doit être totalement reconnue, et de la volonté d'harmonisation, de rapprochement pour que le système soit tout aussi efficace, sur la base d'une intégration des personnels de la CMAF, sur le fait que les prestations légales familiales versées par la CMAF sont identiques à celles qui sont versées par le régime général, et afin de pouvoir bénéficier d'un réseau d'accueil plus important. Mon collègue chargé des transports et moi-même réfléchissons à la meilleure adéquation possible entre le maintien d'une spécificité et la nécessité d'être plus efficace.
(MM. Michel Teston, André Gattolin et Yvon Collin applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour la réplique.
M. Ronan Kerdraon. J'ai bien entendu votre réponse, madame la ministre. Je veux simplement rappeler l'attachement de la profession à cette caisse, un attachement récemment réaffirmé par le Conseil supérieur des gens de mer.
Par ailleurs, des réflexions sont en cours en matière de recherches d'optimisation de la structure. Elles concernent le renforcement du partenariat entre l'ENIM et la CMAF, la simplification des démarches administratives, le domaine du recouvrement. Il est aussi question de permettre aux allocataires de la CMAF de bénéficier de toutes les prestations familiales au sein de la caisse, étant rappelé, par exemple, que celle-ci ne verse pas pour l'instant l'aide personnalisée au logement, l'APL. Le travail mené avec le service social maritime sur l'accompagnement des familles est également poursuivi. Grâce au guichet unique, il sera possible d'optimiser l'accès aux droits tout en simplifiant les démarches administratives.
Je soulignerai, pour conclure, que la profession de marin est une profession à risque, que les familles sont relativement isolées et que les marins pêcheurs connaissent une importante fragilité de leur rémunération. Ils sont particulièrement attachés, même uniquement sur les littoraux, à leur caisse spécifique.
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