Mme Chantal Jouanno. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j'évoquerai un sujet cher à mon collègue Jean-Léonce Dupont, celui de la situation financière des universités.
Reconnaissons qu'il est difficile de se faire une idée claire de cette situation. Le Gouvernement se veut rassurant. Il est tout à fait dans son rôle quand il annonce que 5 000 postes universitaires devraient être créés au cours du quinquennat, que la loi du 22 juillet dernier a redéfini les missions de l'enseignement supérieur et que le budget de la mission interministérielle recherche et enseignement supérieur, la MIRES, augmentera de 0,44 % par rapport à 2013.
Et pourtant, les syndicats s'alarment, ceux des étudiants comme ceux des enseignants et chercheurs. Vous me direz qu'ils sont aussi dans leur rôle !
En revanche, quand la présidente de l'université de Montpellier-III ferme le site de Béziers pour protester contre sa dotation budgétaire, elle n'est sans doute pas totalement dans son rôle…
De fait, la situation budgétaire des établissements semble toujours très préoccupante : 15 universités sur 76 devraient être en déficit cette année ; 3 d'entre elles sont dans une situation critique et 38 autres ont un fonds de roulement inférieur au seuil de sécurité.
Dès lors, on peut se demander si les mesures prises sont bien à la hauteur de l'enjeu.
D'une part, le budget des créations de postes servirait en fait à couvrir les besoins de financement des établissements. Les présidents d'université annoncent le gel de 400 postes, soit 40 % des 1 000 postes promis.
D'autre part, une fois prise en compte l'inflation, le budget de la mission baisserait en réalité de 0,46 %. Et le glissement vieillesse technicité n'est pas encore répercuté dans le budget des universités !
Madame la ministre, comment entendez-vous concrétiser votre détermination à « remettre l'université et la recherche en mouvement » ?
Mme Geneviève Fioraso, ministre. Madame la sénatrice, je vous remercie de cette question. Effectivement, j'ai eu moi-même beaucoup de mal avant d'avoir des idées claires sur la situation réelle des universités, parce qu'en fait elles ne sont pas toutes passées aux RCE et n'ont pas toutes opéré la déconcentration des fonds à la même période ; quant à l'autonomie, les universités sont autonomes depuis leur création.
On observe que, dans l'année ou dans les deux ans qui suivent le passage aux RCE, les universités se retrouvent confrontées à des difficultés parce qu'il leur faut provisionner des dotations aux amortissements, ce qu'elles ne faisaient pas auparavant, mais aussi parce qu'elles n'ont pas été accompagnées dans ce passage et que mes prédécesseurs leur conseillaient même de saturer les postes. Or jamais aucune administration, aucun organisme ne sature complètement ses postes !
C'est ainsi que 98 embauches sont intervenues afin de faciliter le passage aux RCE de certaines universités de taille moyenne. Il est certain que le financement de ces 98 postes à temps plein cause, par la suite, certaines difficultés. N'importe quelle entreprise dont vous multipliez, artificiellement certes, le budget par dix sans accompagner les gestionnaires ni la gouvernance, va dans le mur. Nous n'en sommes pas là parce que nous provisionnons toujours 90 % du budget des universités, ce qui correspond à la masse salariale, mais, sur les 10 % restants, les universités rencontrent des difficultés.
D'autant qu'au moment du passage aux RCE, le GVT, le glissement vieillissement technicité, n'a pas été pris en compte dans le transfert. Pour le dire plus simplement, l'évolution des salaires n'a pas été prise en compte, pas plus que l'augmentation du compte d'affectation spéciale « Pensions ». Tous les organismes de recherche s'acquittent eux-mêmes de leur GVT, mais ce n'était pas le cas des universités. Nous avons donc dû aider ces dernières, ce que n'avaient pas fait mes prédécesseurs au cours des deux dernières années. Nous les accompagnons avec une ingénierie spécifique pour les amener à rassembler davantage leur offre de formation - 10 000 masters et 3 800 licences, c'est sans doute beaucoup ! - sans pour autant porter atteinte à ce qui est notre priorité : la réussite étudiante.
C'est un exercice difficile, mais nous avons trouvé une situation dégradée et nous faisons de notre mieux pour y remédier et donner une image positive des universités françaises, qui sont de très bonne qualité, mesdames, messieurs les sénateurs.
M. le président. La parole est à Mme Jouanno, pour la réplique,... qui n'est pas obligatoire, ma chère collègue !
Mme Chantal Jouanno. Elle n'est pas obligatoire, mais je tiens à remercier Mme la ministre. Elle est tout à fait dans son rôle en me faisant cette réponse, que je transmettrai aux personnes compétentes.
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