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Alain Bertrand
Question d'actualité au gouvernement N° 94 au Ministère de l'agroalimentaire


Réforme de la PAC

Question soumise le 8 février 2013

M. Alain Bertrand. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé de l'agroalimentaire.

Monsieur le ministre, des négociations décisives, portant sur le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020, se tiennent aujourd'hui et demain à Bruxelles. De l'accord qui sera trouvé – demain, j'en suis sûr ! – dépend le prochain budget de la politique agricole commune. Dans ces conditions, on comprend l'inquiétude qui sourd dans les territoires ruraux.

Il y a deux jours, à Strasbourg, le Président de la République a confirmé que la PAC allait « voir ses crédits diminuer par rapport aux propositions de la Commission européenne », et que « cela engendrera nécessairement des restructurations difficiles dans un secteur essentiel pour nos territoires ».

Monsieur le ministre, quelles seront ces « restructurations » ?

La PAC doit rester une politique forte et équilibrée. Je le rappelle, notre agriculture, qui représente 20 % de l'espace agricole européen, est la première de l'Union.

Mais, au-delà de ces chiffres, la nouvelle PAC devra s'attacher à privilégier les filières les plus en difficulté – et elles le sont de plus en plus –, qui sont aussi celles qui rendent le plus de services aux territoires, en termes d'aménagement du territoire et de développement durable. À ce titre, l'élevage devra faire l'objet d'une attention ciblée, tout comme les territoires de l'hyper-ruralité, pour lesquels l'activité agricole est une question de survie économique.

Monsieur le ministre, le contribuable européen ne comprendrait pas – et il aurait raison ! – que l'on aide de la même façon un céréalier,…

M. Simon Sutour. Absolument !

M. Alain Bertrand. … qui gagne, en moyenne, plus de 70 000 euros par an, et un éleveur bovin, qui dégage à peine 15 000 euros de bénéfices par an, en moyenne, alors qu'il concourt davantage, je le redis, à l'aménagement du territoire et à la biodiversité, à laquelle vous savez, mes chers collègues, que je suis très attaché.
(Sourires sur certaines travées du RDSE. - On crie : Au loup ! sur plusieurs travées de l'UMP.)

C'est pourquoi la prochaine PAC devra mettre en place des soutiens spécifiques. Il est indispensable de rééquilibrer les aides à l'hectare – on nous en parle depuis un moment déjà… – entre productions végétales et productions animales, en faveur de ces dernières. Il y va, ni plus ni moins, de l'avenir de l'élevage dans notre pays.

Privilégier le financement des cinquante premiers hectares, comme vous en avez l'intention, monsieur le ministre, est une excellente initiative. Cependant, il convient, là encore, d'établir les différences qui s'imposent et de privilégier le soutien aux surfaces fourragères. Cela doit aller de pair avec l'obtention d'une convergence nationale de l'aide de base, un paiement de base distinct entre surface fourragère et non fourragère, ainsi qu'une forte augmentation des indemnités compensatoires de handicaps naturels, les fameuses ICHN, dont le montant stagne depuis de nombreuses années.

Monsieur le ministre, je terminerai mon intervention par quelques questions. Quelles sont les positions de la France dans les négociations en cours? De quelles informations disposez-vous sur les critères qui seront finalement retenus pour définir la nouvelle PAC ? Pouvez-nous rassurer en nous confirmant que les éleveurs seront mieux aidés et les céréaliers un peu moins (Oh ! sur les travées de l'UMP.), ce qui entrerait dans le cadre de la politique souhaitée par le Président de la République, une politique de justice ?
(Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Réponse émise le 8 février 2013

M. Guillaume Garot, ministre délégué auprès du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, chargé de l'agroalimentaire. Monsieur le sénateur, c'est en effet au moment où s'ouvre au Sénat cette séance de questions d'actualité au Gouvernement que débute également le sommet européen, qui viendra donner - espérons-le - un budget à l'Europe pour la période 2014-2020.

Vous m'interrogez sur la politique agricole commune. Nous l'avons dit et répété, le Président de la République en tête, la PAC ne peut pas, ne doit pas être la variable d'ajustement du budget européen.

M. François Patriat. Très bien !

M. Guillaume Garot, ministre délégué. Lors du discours, d'ailleurs très applaudi, qu'il a prononcé lundi au Parlement européen, François Hollande, le Président de la République, a rappelé son attachement au socle des politiques européennes que sont à la fois la politique de cohésion et la PAC.

Nous défendons plusieurs principes pour la PAC.

Le premier principe est extrêmement important. Vous l'avez dit, monsieur le sénateur, la PAC doit être plus juste. L'idée serait de pouvoir réorienter les aides en faveur des régions d'élevage, qui seraient majorées pour les cinquante premiers hectares. Cette majoration se ferait donc au bénéfice direct des éleveurs.

Le deuxième principe est tout aussi important que le premier. Nous voulons, en effet, une PAC plus respectueuse de l'environnement. C'est ce que l'on appelle le « verdissement » de la PAC. Nous avons énoncé un objectif : ce verdissement doit être ambitieux, et doit représenter 30 % du budget du premier pilier. Là aussi, le changement serait considérable.

Au-delà, il me semble important de redire l'ambition qu'a la France de revenir sur la logique libérale de la PAC.
(Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)

M. Jean Desessard. Ah !

M. Jean Bizet. Ce n'est pas ce qu'il y a de mieux !

M. Guillaume Garot, ministre délégué. Nous avons montré le chemin, nous avons posé des actes.
(M. Jean Bizet proteste.)

Le premier d'entre eux fut le maintien des droits de plantation. Rappelez-vous, mesdames, messieurs les sénateurs, que leur suppression avait été acceptée par la précédente majorité.
(Protestations et dénégations sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Jacques Mirassou. Eh oui !

M. Guillaume Garot, ministre délégué. Nous avons obtenu que le maintien de ces droits de plantation soit reconnu à partir de 2015. C'est essentiel pour l'ensemble des viticulteurs de France.

Nous travaillons également à la stabilisation du marché du lait.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Guillaume Garot, ministre délégué. Ce point est tout aussi important pour rassurer les éleveurs et les producteurs de lait, dont nous voulons qu'ils puissent regarder l'avenir avec confiance, même après la fin des quotas laitiers, en 2015.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, mesdames, messieurs les sénateurs, notre ambition pour l'Europe et pour la PAC est grande.

M. Jean Bizet. Cela ne se voit pas, non !

M. Jean-Louis Carrère. Il faut mettre des lunettes !

M. Guillaume Garot, ministre délégué. La PAC doit être légitime aux yeux de tous les citoyens et de tous les agriculteurs. C'est pourquoi nous voulons qu'elle reconnaisse la diversité de l'agriculture française et soutienne le travail de tous nos agriculteurs.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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