Le texte de cette question sera publié dès sa transmission par le Journal Officiel. Dans cette attente, vous pouvez vous reporter aux vidéos de la rubrique « Questions au Gouvernement » accessible depuis la notice électroniquedu Sénateur auteur de la question.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la sénatrice, dans votre question, il y a deux aspects de la parole publique.
D'un côté, vous évoquez les petites phrases et ce que vous appelez les « dérapages », qui, il est vrai, rétrécissent considérablement le débat politique et affaiblissent incontestablement la démocratie, ou, du moins, en ternissent le lustre.
De l'autre, vous faites référence à certains propos qui ont été tenus ces derniers jours s'agissant d'une décision judiciaire.
L'article XVI de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui, vous le savez, fait partie de notre bloc de constitutionnalité, érige clairement la séparation des pouvoirs au rang de principe fondateur d'un État de droit.
Nous sommes dans un État de droit, et cela suppose de respecter quelques règles. La séparation des pouvoirs implique que la parole parlementaire ne puisse pas se porter inconsidérément sur l'institution judiciaire.
Nous réitérons le respect du Gouvernement à l'égard de l'institution judiciaire, qui est l'épine dorsale de notre démocratie. Les femmes et les hommes qui l'animent sont extrêmement dévoués et totalement conscients de la hauteur de la mission qui leur est confiée. Je pense aux magistrats instructeurs mais aussi à tous les juges du siège, aux procureurs, généraux ou non, aux greffiers et à l'ensemble des fonctionnaires qui font vivre l'œuvre de justice.
Nous avons exprimé la confiance du Gouvernement à l'ensemble des personnels judiciaires. Lundi, j'ai saisi le Conseil supérieur de la magistrature pour connaître les conséquences possibles de tels propos et de l'ambiance qu'ils créent sur le fonctionnement de l'institution judiciaire.
Vous le savez, l'un de ces magistrats a reçu hier un courrier avec des munitions à blanc et des menaces.
(Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. François Grosdidier. Les élus aussi en reçoivent !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Voilà qui place l'œuvre de justice dans un climat délétère.
Nous avons rappelé que, si les magistrats décidaient d'agir en justice, ils pourraient évidemment bénéficier de la protection judiciaire prévue par l'ordonnance de 1958.
M. Alain Fouché. Il ne faut pas exagérer !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Emmanuel Lévinas écrivait : « L'élection est un surplus d'obligation pour lequel se profère le « je » de la conscience morale. » Pour ma part, je préférerais parler d'« éthique ». Mais c'est la même idée, celle du niveau d'exigence.
J'espère que, lors des prochains débats, et, d'une manière générale, lors de chaque débat, la parole publique sera une parole responsable, à la hauteur de cette conscience éthique.
(Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
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