M. Roger Karoutchi. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget.
Hier, le Sénat a rejeté le projet de budget. Ce matin, il a confirmé son rejet du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. Selon nous, il y a trop d'impôts, trop de taxes, pas assez de baisse de la dépense publique.
(Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Entre le « ras-le-bol » fiscal relevé par M. Moscovici et la pause fiscale souhaitée par le Président de la République, vous avez fait trop d'annonces, de promesses, alors que les Français, à la lecture de leur avis d'imposition, ne voient ni pause fiscale ni réduction de l'impôt. Quant à l'engagement du Premier ministre d'engager une réforme fiscale, c'est évidemment un leurre.
M. Roland Courteau. Qu'en savez-vous ?
M. Roger Karoutchi. En réalité, sans baisse massive des dépenses publiques, il ne peut pas y avoir de diminution de l'impôt. On peut ainsi, durant tout le quinquennat, promettre beaucoup et ne pas tenir grand-chose…
Choc du verbe et promesses prévalent également en matière de chômage. Voilà quelques mois, le Président de la République annonçait l'inversion de la courbe du chômage, mais on continue de détruire des emplois, notamment industriels, de manière massive, les plans sociaux se multiplient, les délocalisations se poursuivent,…
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cela n'a pas commencé il y a deux ans !
M. Roger Karoutchi. … les investisseurs nationaux et étrangers n'y croient pas et n'investissent pas chez nous !
(Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Le Président de la République, ce matin, ne semblait plus tout à fait d'accord avec lui-même, c'est le moins que l'on puisse dire ! Il a affirmé qu'il y aurait une inversion de la courbe du chômage « un jour », le problème étant de savoir quel jour…
(Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Roland Courteau. Vous ne manquez pas d'air, avec votre bilan !
M. Roger Karoutchi. En réalité, c'est toujours pareil : le choc du verbe d'un côté, la réalité concrète, immédiate, de l'autre.
Monsieur le ministre, manifestement, la boîte à outils a disparu ou elle a été enterrée dans le jardin ; manifestement, il n'y a plus de solution miracle ; manifestement, la situation de la France continue d'être pire que celle de ses voisins. Eux se redressent. Nous, nous sommes en berne, pour l'investissement, pour l'emploi, pour la fiscalité !
Je n'aurai pas la cruauté, monsieur le ministre, de demander, comme certains députés socialistes l'ont fait hier encore, quand nous allons changer de gouvernement. (Sourires sur les travées de l'UMP.) Pour nous, ce n'est pas une question d'hommes, c'est une question d'orientations, de ligne politique. Monsieur le ministre, quand ce gouvernement va-t-il décider de changer de cap pour redonner confiance aux Français ? Vous devez écouter l'exaspération de nos concitoyens et prendre conscience que la France ne peut pas continuer comme cela !
(Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UDI-UC.)
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. Monsieur le sénateur Karoutchi, je vous remercie de vos propos tout en nuances (Sourires sur les travées du groupe socialiste.), parfaitement équilibrés, absolument pas partisans, frappés au coin de la plus pure bonne foi.
Vous évoquez trois sujets : la fiscalité, la dépense et l'emploi.
En ce qui concerne la dépense, vous considérez qu'elle est insuffisamment maîtrisée aujourd'hui.
M. Roger Karoutchi. C'est la réalité !
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Je vous rappellerai quelques chiffres, car eux seuls sont à même de nous mettre d'accord.
Sous le gouvernement auquel vous avez participé,...
M. Alain Gournac. C'est reparti !
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. ... la dépense publique a fortement augmenté. (Protestations sur les travées de l'UMP.) En pourcentage, elle s'est accrue, entre 2002 et 2012, de plus de 2 % par an en moyenne.
M. Alain Gournac. C'est vous qui tenez les manettes, maintenant !
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Le projet de budget que vous avez rejeté hier prévoit une diminution de 1,5 milliard d'euros des dépenses de l'État, dans le cadre d'un effort d'économie de 15 milliards d'euros.
M. Roger Karoutchi. Ce n'est pas assez !
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Ce n'est pas assez, dites-vous, monsieur Karoutchi ? Voilà qui est intéressant à entendre : 15 milliards d'euros en un an, ce n'est pas assez, mais lorsque le gouvernement que vous souteniez proposait 10 milliards d'euros d'économies en trois ans, c'était beaucoup ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) J'ai du mal à comprendre cette logique !
(Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Christian Cointat. Vous ne savez pas compter !
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. En ce qui concerne les impôts, monsieur Karoutchi, ils ont augmenté de 20 milliards en 2011, de 20 milliards en 2012,...
M. Roger Karoutchi. C'était déjà vous !
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. ... de 20 milliards en 2013.
M. Roger Karoutchi. C'était encore vous !
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Quand le gouvernement auquel vous apparteniez a augmenté les impôts, il a pris un certain nombre de mesures, telles que la désindexation du barème de l'impôt sur le revenu ou la suppression de la demi-part des veuves, qui ont considérablement accru les inégalités.
Pour notre part, nous réindexons le barème de l'impôt sur le revenu, nous augmentons le revenu fiscal de référence, nous mettons en place une décote et nous créons les conditions d'une augmentation de la pression fiscale de 1 milliard d'euros si l'on neutralise l'effet de la lutte contre la fraude fiscale, soit vingt fois moins que le dernier budget préparé par Mme Pécresse ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) Voilà la réalité !
En ce qui concerne l'emploi, durant le précédent quinquennat, 750 000 emplois industriels ont été détruits.
M. Francis Delattre. Moins 130 000 depuis le début de l'année !
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Je vous confirme que l'objectif d'inverser la courbe du chômage à la fin de l'année est bien maintenu (M. Roger Karoutchi s'exclame.) et que nous faisons de la lutte contre le chômage, pour l'emploi, la croissance et le redressement de notre appareil productif la priorité du quinquennat !
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
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