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Robert Tropeano
Question orale sans débat N° 363 au Ministère des transports


Recours à des protéines animales pour les poissons d'élevage

Question soumise le 28 février 2013

M. Robert Tropeano appelle l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la récente décision de la Commission européenne d'autoriser à nouveau, dans l'alimentation des poissons d'élevage et des autres animaux de l'aquaculture, le recours aux protéines animales transformées
(PAT).

Cette annonce provoque de vives réactions en France et, notamment, des réactions de défiance parmi les consommateurs qui n'ont pas oublié que les farines animales ont été à l'origine de la propagation de l'encéphalopathie spongiforme bovine (dite maladie de la « vache folle ») dans les années 90. Il lui demande si elle considère que les conditions permettant une utilisation sécurisée de ces protéines animales transformées sont désormais totalement réunies. Il lui demande, puisqu'il faut prendre acte de la décision de la Commission européenne, de quelle manière elle pourrait rassurer tous ceux qui s'alarment de ce non-respect de la chaîne alimentaire qui consiste à nourrir des poissons de protéines issues du porc ou de la volaille. Il lui demande enfin si elle compte mettre en œuvre la proposition qu'elle a récemment avancée, d'un label « sans farine animale » pour que les consommateurs français soucieux de se procurer une nourriture de qualité et de respecter la chaîne alimentaire puissent s'approvisionner dans des conditions satisfaisantes.

Réponse émise le 24 avril 2013

M. Robert Tropeano. Monsieur le ministre, ma question porte sur la récente décision de la Commission européenne d'autoriser de nouveau, dans l'alimentation des poissons d'élevage et des autres animaux de l'aquaculture, le recours aux protéines animales transformées, les PAT.

Cette annonce a provoqué de vives réactions en France, notamment des réactions de défiance parmi les consommateurs, qui n'ont pas oublié que les farines animales ont été à l'origine de la propagation de l'encéphalopathie spongiforme bovine, dite « maladie de la vache folle ».

En 1997, l'utilisation des farines animales avait en conséquence été interdite pour les ruminants, cette interdiction ayant été étendue en 2001 aux aliments destinés à tous les animaux de consommation. On aurait pu penser que cette interdiction, justifiée par la terrible épidémie qui avait sévi, ferait loi pour l'avenir. Or il n'en est rien !

Monsieur le ministre, comment pouvez-vous nous assurer que les conditions permettant une utilisation sécurisée de ces protéines animales transformées sont malgré tout réunies ?

Puisqu'il faut prendre acte de la décision de la Commission européenne, monsieur le ministre, comment allez-vous rassurer tous ceux qui s'alarment de ce non-respect de la chaîne alimentaire consistant à nourrir des poissons avec des farines issues du porc ou de la volaille ?

Enfin, comptez-vous mettre en œuvre la proposition récemment avancée par Mme Delphine Batho, qui évoquait la création d'un label « sans farine animale », lequel pourrait effectivement, je le pense, sécuriser les consommateurs français soucieux du respect de la chaîne alimentaire et de la qualité des produits nutritionnels ? Une autre piste mériterait d'être étudiée : l'instauration d'un étiquetage spécifique portant la mention « nourri avec ».

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, les protéines animales transformées de porc ou de volaille ont été autorisées de nouveau pour l'alimentation des poissons d'élevage à partir du 1erjuin 2013. Cette décision a suscité une certaine émotion. Pour autant, même si la France s'y est opposée, il convient d'être précis pour rassurer à la fois les consommateurs et les producteurs. Notre opposition, il convient de le souligner, n'était pas d'ordre sanitaire. Nous souhaitions simplement promouvoir les efforts réalisés par les professionnels en matière de qualité de leur production.

Que ce soit clair, et Stéphane Le Foll, actuellement retenu à l'Assemblée nationale, l'a expliqué à plusieurs reprises, les farines animales ne sont pas des protéines animales transformées. Nous pensons, lorsque nous évoquons les farines animales, à la maladie de la vache folle, mais ces protéines sont issues non de la transformation de cadavres d'animaux, mais d'animaux sains et propres à la consommation humaine.

Concernant un risque éventuel pour la santé humaine, les avis des agences indépendantes d'évaluation des risques sanitaires, européenne et française, convergent sans ambiguïté : la réintroduction des PAT de porc et de volaille dans l'alimentation des poissons d'élevage ne présente aucun risque pour le consommateur ou pour l'environnement.

Par ailleurs, je tiens à préciser qu'il n'y a pas d'aberration biologique, comme cela est parfois dénoncé. Les protéines animales transformées sont en effet destinées à des poissons d'élevage carnivores - contrairement aux anciennes pratiques, qui concernaient des ruminants herbivores. Plus de 80 % des poissons sont carnivores et mangent, dans la nature, d'autres poissons ; permettre l'introduction des protéines animales dans leur alimentation n'est donc pas totalement contre nature.

Ces précisions semblent utiles, le grand public n'ayant pas précisément connaissance de cette situation. Toutefois, je tiens à ajouter que l'aquaculture française est aujourd'hui de très grande qualité. J'ai eu l'occasion de rencontrer des aquaculteurs, notamment au Salon de l'agriculture, qui cherchent toujours à améliorer la qualité de leur production. La filière piscicole produit, je le précise, environ 50 000 tonnes de poissons d'élevage par an, très majoritairement des truites.

Les aquaculteurs français sont d'ores et déjà engagés par une charte volontaire, qui couvre aujourd'hui 80 % de la production, la Charte qualité - Aquaculture de nos régions, qui interdit notamment de nourrir les poissons avec des produits d'animaux terrestres. Nous pouvons donc rassurer les consommateurs : 100 % des poissons élevés en France et destinés à la consommation humaine sont d'ores et déjà alimentés sans PAT, essentiellement avec des matières premières végétales ou des farines de poisson.

Acheter du poisson certifié Agriculture biologique, Label Rouge ou sous la marque collective « Charte qualité - Aquaculture de nos régions », c'est l'assurance, pour l'acheteur, de consommer la chair d'un poisson nourri sans PAT. L'origine française de l'aquaculture garantit la sécurité et la qualité alimentaires. Il convient donc de s'intéresser à l'origine du produit.

Les aquaculteurs français ont d'eux-mêmes décidé un moratoire, lequel sera toujours en application le 1er juin 2013.

La filière piscicole française et les pouvoirs publics ont réaffirmé ensemble, ces derniers mois, leur totale détermination à poursuivre dans l'engagement de la durabilité et de la qualité. De ce point de vue, l'aquaculture est une filière qui est composée de professionnels de grande qualité. Votre question est l'occasion pour moi, monsieur le sénateur, de saluer de nouveau leur initiative et leur esprit de responsabilité

M. le président. La parole est à M. Robert Tropeano.

M. Robert Tropeano. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Il n'en demeure pas moins que l'autorisation des farines de porc et de poulet à destination des poissons sème le trouble et représente pour beaucoup un pas en arrière des plus fâcheux. Il ne semble pas que nous ayons pris l'avertissement de la vache folle au sérieux ! À ne pas signifier notre vive désapprobation, nous ouvrons une brèche. N'est-ce pas emprunter la voie de la surenchère en matière d'utilisation de farines animales, et donc de toutes les aberrations ?

C'est si vrai que la Commission européenne projette déjà de réintroduire l'utilisation des PAT de porc et de volaille pour les volailles et les porcs à l'horizon 2014 ! Ainsi, bien que le cannibalisme reste interdit au sein des mêmes espèces, on pourrait cependant autoriser, à l'avenir, que les volailles soient nourries par des farines de porc, et les porcs par des farines de volaille ! Voilà des signaux inquiétants de phénomènes contre lesquels nous devrions marquer notre plus vive opposition.

Cela étant, je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir souligné que nous avions un système d'aquaculture performant et de très grande qualité.

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