Mme Catherine Deroche attire l'attention de Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique sur l'impossibilité pour les collectivités territoriales, dans certaines circonstances, de reclasser les fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions. Les employeurs locaux mettent alors en œuvre la procédure d'admission à la retraite, ou bien maintiennent les agents en congé longue maladie.
Les agents placés dans cette situation ne peuvent pas bénéficier d'actions de formation réservées aux seules personnes en situation de travail. Ce cadre statutaire, qui ne correspond pas à une situation d'activité des agents concernés, empêche juridiquement ces derniers de bénéficier d'actions de formation.
Dès lors, ne peut-on pas créer une position statutaire nouvelle (de type congé de reconversion) pour permettre aux agents, maintenus en congé longue maladie, de bénéficier de la position d'activité et leur donner ainsi un accès à des démarches de formations qualifiantes et professionnalisantes susceptibles de favoriser leur reclassement ?
Elle lui demande son avis sur cette proposition et, le cas échéant, dans quel délai elle pourrait être mise en œuvre.
Mme Catherine Deroche. Madame la ministre, en cas d'accident de travail ou de maladie professionnelle, dans certaines circonstances, des agents territoriaux, sans être inaptes à toute fonction, ne peuvent être reclassés au sein de leur propre collectivité. Ils sont alors soit indéfiniment maintenus en arrêt de maladie, soit admis à la retraite après la procédure mise en œuvre par la collectivité.
Or les agents placés dans cette situation ne peuvent pas bénéficier d'actions de formation, réservées aux seules personnes en situation de travail, puisque le cadre statutaire actuel les en empêche.
Dès lors, ne peut-on pas créer une position statutaire nouvelle, du type du congé de reconversion, afin de permettre aux agents maintenus en congé de longue maladie d'être placés en position d'activité et de reconversion et de leur donner ainsi accès à des démarches de formations qualifiantes et professionnalisantes susceptibles de favoriser leur reclassement ?
Madame la ministre, je souhaite avoir votre avis sur cette proposition et, le cas échéant, savoir dans quel délai elle pourrait être mise en œuvre.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique. Madame la sénatrice, votre question est extrêmement intéressante parce que les modalités de reclassement des fonctionnaires devenus inaptes à exercer leurs fonctions du fait d'une invalidité sont aujourd'hui insuffisamment adaptées pour permettre aux employeurs publics, comme d'ailleurs aux fonctionnaires, de dérouler une seconde carrière.
Un vrai problème se pose à ce sujet, les procédures actuelles mettant en jeu des instances au fonctionnement lourd ainsi que des cadres statutaires qui n'offrent que peu d'alternatives aux employeurs publics. Votre préoccupation est pleinement justifiée puisque tout cela conduit souvent à une désinsertion professionnelle des fonctionnaires ayant eu un accident de la vie, quelle qu'en soit la nature.
Vous l'avez rappelé, le reclassement des fonctionnaires territoriaux est régi par les articles 81 et suivants de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et par le décret du 30 septembre 1985.
En droit, un fonctionnaire territorial peut, à l'issue d'un congé de maladie, n'être plus physiquement apte à exercer ses fonctions. Cette inaptitude est constatée par le comité médical, qui est souverain en la matière.
L'autorité territoriale a alors une obligation de moyens pour reclasser cet agent, conformément à ce qu'a indiqué le Conseil d'État dans un arrêt du 2 octobre 2002 condamnant la chambre de commerce et d'industrie de Meurthe-et-Moselle. Le fonctionnaire peut se voir proposer par l'autorité territoriale, si cela se révèle possible, un changement d'emploi ou même, s'il n'est plus apte à exercer l'ensemble des emplois de son grade, un changement de cadre d'emplois. Dans le cadre de cette reconversion, une formation peut s'avérer nécessaire.
Toutefois, les textes ne prévoient pas de formation spécifique liée, par exemple, à une reconversion pour raison de santé.
Par conséquent, dans un contexte d'allongement des carrières, du fait notamment du recul de l'âge de départ à la retraite, il est nécessaire d'ouvrir une vraie réflexion non seulement sur la prévention, mais aussi sur la prise en charge de l'invalidité dans la fonction publique.
C'est la raison pour laquelle, dans le cadre de la négociation sur l'amélioration des conditions de vie au travail, que j'ai ouverte avec les organisations syndicales représentatives de la fonction publique, je souhaite aborder l'ensemble des aspects que recouvrent ces questions.
La prévention des risques professionnels fera l'objet de plusieurs groupes de travail, concernant en particulier la prévention des risques psychosociaux, que l'on a sous-estimés dans la fonction publique, des risques liés à la pénibilité physique ainsi que de tous les troubles musculo-squelettiques, malheureusement connus de tous aujourd'hui.
L'amélioration du fonctionnement des instances médicales participant aux procédures de reclassement fera également l'objet de discussions, sans doute longues mais absolument nécessaires.
Enfin, sur la base d'un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales, l'IGAS, j'examinerai avec les organisations syndicales les conditions dans lesquelles une reconversion professionnelle peut être mise en place.
J'ai organisé cette négociation de manière que des groupes soient constitués sur les sujets importants que sont les parcours professionnels, la formation professionnelle, le changement d'affectation, le passage d'une administration à une autre, d'une collectivité locale à l'État, de l'État aux collectivités locales ou à la fonction publique hospitalière... Aujourd'hui, nos pratiques ne sont pas les bonnes.
Madame la sénatrice, je m'engage à trouver une réponse à votre question avec les organisations syndicales.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche.
Mme Catherine Deroche. Madame la ministre, je vous remercie de la réflexion que vous avez lancée, même si l'échéancier n'est pour le moment pas précisément établi.
Pour avoir organisé une table ronde avec le centre de gestion et l'association des maires de mon département, je me suis aperçue que de réels problèmes existent, notamment pour les petites collectivités : difficultés financières, manque de postes, blocages statutaires. D'autres problèmes concernent les avis des commissions de réforme.
Dans ces conditions, le chantier que vous lancez est très attendu, notamment par les maires et par les présidents de communautés de communes.
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