M. Hervé Maurey attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique, sur la couverture du territoire par la téléphonie mobile et sur les critères de mesure de celle-ci.
Alors qu'à grands renforts de publicités, plusieurs opérateurs de téléphonie mobile annoncent l'ouverture de services 4 G, de nombreux territoires restent encore privés de couverture en 2 G et 3 G.
À cet égard, au cours d'une audition devant le Sénat, le 24 avril 2013, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) indiquait que « s'agissant des zones non couvertes par la 2 G et la 3 G, la solution relève du Gouvernement qui pourrait réunir les opérateurs, les élus et l'ARCEP pour définir un nouveau programme de couverture des zones blanches ».
Une telle initiative est d'autant plus attendue par les élus et les populations concernées, qu'à ce jour, les opérateurs, considérés comme respectant les engagements contenus dans les licences d'attribution des fréquences, ne sont nullement tenus d'améliorer la couverture dans les zones concernées, ni même d'équiper les infrastructures passives même lorsqu'elles sont déployées, à leur frais, par les collectivités.
Par ailleurs, les critères de couverture sont très largement reconnus comme ne rendant pas compte de la couverture effective du territoire.
En effet, si la couverture en 2 G est, officiellement, de 99 %, et celle en 3 G de 98 %, la réalité vécue par nos concitoyens est tout autre. La différence entre ces statistiques et la réalité tient, notamment, au fait que les critères de couverture ne s'apprécient qu'à l'extérieur des bâtiments et en situation statique, ce qui est pour le moins paradoxal.
Un groupe de travail avait été mis en place, en février 2012, par le précédent Gouvernement. Ses conclusions, tout à fait insuffisantes, auraient nécessité une initiative du Gouvernement en ce domaine, ce qui n'a pas été fait.
Aussi, lui demande-t-il quelles mesures le Gouvernement entend adopter pour assurer enfin une réelle couverture mobile du territoire et pour réviser les critères de mesure de la couverture mobile afin que ces derniers rendent réellement compte de la réalité de cette couverture.
M. Hervé Maurey. Madame la ministre, je me dois, hélas ! d'appeler une nouvelle fois votre attention sur la couverture du territoire par la téléphonie mobile. Dans le département de l'Eure, il reste de nombreux secteurs qui ne sont pas couverts. Cette situation est due au fait que, depuis de nombreuses années, l'État se désintéresse de ce sujet, tandis que les opérateurs n'interviennent qu'en zone rentable. En outre, le conseil général de l'Eure a refusé de signer la convention de couverture des zones blanches.
Vous comprendrez que nos concitoyens n'admettent plus d'être encore privés, en 2013, de toute couverture par la téléphonie mobile 2G et 3G. Ils le supportent d'autant moins que les opérateurs vantent à grand renfort de publicité les mérites d'une 4G totalement inaccessible pour eux et répètent inlassablement qu'il n'existe aucun problème de couverture, l'ensemble du territoire, ou presque, étant couvert.
Lors de son audition par la commission des affaires économiques du Sénat, le 24 avril dernier, le président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l'ARCEP, a d'ailleurs reconnu que des zones devaient encore être traitées et indiqué que, « s'agissant des zones encore non couvertes par la 2G et la 3G, la solution relève du Gouvernement, qui pourrait réunir les opérateurs, les élus et l'ARCEP pour définir un nouveau programme de couverture des zones blanches ». Pourtant, rien n'a été fait. Ni l'État, ni le conseil général, ni les opérateurs ne semblent se soucier de cette question !
Plusieurs maires et présidents de communauté de communes de l'Eure ont reçu en novembre dernier, à leur grande surprise, une lettre du préfet de région leur proposant d'installer à leurs frais un pylône pour un montant de 100 000 euros, en précisant toutefois que des subventions pourraient leur être versées. De très nombreux élus ont été scandalisés par cette demande, le coût étant particulièrement élevé au regard de la taille des collectivités concernées : la plus grande commune compte 519 habitants. Certains élus étaient cependant prêts à s'engager dans ce projet, avant d'apprendre, de la bouche des opérateurs, que, de toute manière, ils ne travailleraient pas sur les infrastructures quand bien même elles seraient construites. Vous comprendrez donc aisément leur déception et leur colère.
Madame la ministre, je vous avais saisie de cette question lors de votre audition le 11 décembre dernier, et vous m'aviez indiqué votre surprise. Malheureusement, la situation n'a pas évolué depuis, et je n'ai eu aucun retour de votre part.
Par ailleurs, et ce n'est un secret pour personne, les critères retenus pour mesurer la couverture du territoire ne rendent pas compte de la réalité. La couverture est en effet mesurée en zone habitée, à l'extérieur des bâtiments et en situation statique, ce qui est pour le moins paradoxal. Le Sénat a demandé à plusieurs reprises que ces critères soient revus, mais, pour le moment, vous n'avez pas jugé bon de vous atteler à cette tâche.
Ma première question est très simple et appelle une réponse très claire : que compte faire le Gouvernement pour mettre un terme à cette situation insupportable et s'assurer que toutes les communes de France puissent enfin bénéficier d'une couverture par la téléphonie mobile, sans avoir à attendre le déploiement de la 4G, prévu à un horizon de quinze ans ?
Ma seconde question est tout aussi simple : quelles initiatives le Gouvernement entend-il prendre pour réviser les critères de mesure de la couverture par la téléphonie mobile afin que ces critères rendent fidèlement compte de la réalité ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique. Monsieur Maurey, vous m'interrogez sur la question de la couverture en téléphonie mobile des territoires.
Comme vous, je constate que le groupe de travail auquel vous participiez, mis en place par le précédent gouvernement, n'a pas permis de trouver de solutions satisfaisantes en la matière.
Sur le fond, vous avez raison et je partage une bonne partie du constat que vous dressez. Toutefois, à mon sens, le problème de l'accès aux réseaux mobiles ne saurait se limiter à la seule question de la téléphonie, car cela reviendrait à avoir une vision trop étroite de ce qu'apportent les réseaux de communications à nos territoires, à nos concitoyens et à notre économie. La stratégie du Gouvernement en matière d'infrastructures se place dans un cadre plus large au travers du plan « France très haut débit » : il s'agit d'étendre progressivement les réseaux à très haut débit à chaque bourg, tout d'abord, en construisant les réseaux de collecte nécessaires, puis à chaque foyer.
Cette infrastructure à très haut débit en fibre optique, que nous construisons avec les opérateurs, les départements et les régions, servira également de support au renforcement des infrastructures mobiles sur l'ensemble de nos territoires. L'objectif du plan « France très haut débit » est de pouvoir apporter à tous, partout, de meilleurs services. À cet égard, nous devons avoir particulièrement à l'esprit les zones mal desservies aujourd'hui, que ce soit en haut débit fixe ou en téléphonie mobile.
Monsieur le sénateur, tout cela ne doit pas nous faire oublier que les réseaux de communication électronique sont non pas une fin en soi, mais un moyen de diffuser le numérique au bénéfice de nos concitoyens, de nos territoires et de nos entreprises.
Je suis d'accord avec vous : à quoi bon, au fond, afficher l'objectif du raccordement de tous nos concitoyens, la couverture de tous nos territoires, si nous ne faisons rien pour que chacun puisse en bénéficier, pour organiser la solidarité et l'inclusion de tous, en somme pour lutter contre la fracture numérique. C'est pourquoi j'ai demandé au Conseil national du numérique dans sa nouvelle formation élargie, c'est-à-dire comprenant le comité des assemblées et des territoires, lequel est composé de quatre parlementaires et de cinq élus locaux, de travailler sur la question centrale de l'inclusion numérique.
J'attends du Conseil national du numérique qu'il traite la problématique de l'inclusion numérique de façon étendue, au-delà de la fracture numérique et des problèmes d'accès, pour permettre la plus large diffusion des usages, et qu'il envisage la manière dont cet objectif peut être partagé avec les collectivités territoriales, qui sont les acteurs de proximité et les garants de l'inclusion, qu'elle soit sociale, générationnelle ou technologique.
Dans le cadre de ses travaux, le Conseil national du numérique a largement consulté, notamment les acteurs locaux. Son rapport devrait nous orienter prioritairement vers les besoins les plus forts et les plus immédiats pour que personne ne soit exclu des formidables avancées technologiques que nous connaissons. Aujourd'hui, la question principale à laquelle nous devons apporter une réponse est la suivante : comment permettre à chaque citoyen, sinon de participer, au moins de tirer avantage au quotidien des évolutions numériques de notre société ?
Pour relever ce défi, nous allons nous appuyer sur la montée en puissance des espaces publics numériques, qui vont bénéficier de 2 000 emplois d'avenir. Nous allons permettre à ces espaces de se renouveler en faisant évoluer leurs missions et en les soutenant fortement. Nous montrerons ainsi que le numérique n'est pas que l'affaire d'ingénieurs bac+5 ou bac+8. J'ai la conviction que, dans ce secteur plus que dans tout autre, les acquis personnels peuvent être un véritable tremplin pour des jeunes sans diplôme.
Ainsi se pose selon moi, au-delà de la seule question de la couverture en téléphonie, la question plus large et plus décisive de l'inclusion numérique de nos concitoyens.
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey.
M. Hervé Maurey. Madame la ministre, au moins vous me dites partager le constat que j'ai dressé, à savoir que nous sommes dans un pays et, en ce qui me concerne, dans un département où il y a encore de graves lacunes dans la couverture numérique du territoire. Pour le reste, je suis vraiment navré de constater que vous n'avez pas répondu à mes questions, qui étaient pourtant très claires : que fait-on pour assurer une couverture du territoire en téléphonie mobile ? Que fait-on pour avoir une mesure de cette couverture correspondant à la réalité, ce qui n'est pas le cas actuellement ?
À ces deux questions, je le répète, vous n'avez pas répondu, sauf pour me dire qu'il s'agissait d'une vision un peu étriquée de ma part que de m'intéresser uniquement à la couverture mobile du territoire. Allez donc dire ça aux élus et aux habitants qui cherchent désespérément un signal pour utiliser leur téléphone mobile !
C'est très bien d'avoir des ambitions plus grandes, de vouloir aller bien au-delà de mes questions qui sont très terre à terre, mais, quand on n'a pas cette couverture de base, je vous assure que les priorités sont tout autres.
Je suis donc vraiment déçu que, une fois de plus, vous ne répondiez pas à mes questions, faisant ainsi la démonstration que le Gouvernement se désintéresse totalement de ces territoires qui n'ont pas de couverture en téléphonie mobile. Vous vous contentez de noyer le poisson en nous renvoyant à des problématiques qui sont certes bien plus intéressantes, larges et ambitieuses, mais qui, malheureusement, ne permettent pas de régler le cas des populations habitant ces zones. Vous refusez même que l'on travaille à affiner les instruments de mesure, ce qui avait pourtant été commencé par votre prédécesseur.
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