M. Roland Courteau interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche sur l'avenir, en France, du transport fluvial et sur le soutien qu'il pourrait espérer au regard de ses atouts environnementaux face à la route.
Il lui indique, notamment, que l'optimisation prioritaire du système de transport existant et les nécessaires entretien et modernisation de l'existant devraient s'appliquer, tout particulièrement, au réseau fluvial à petit gabarit.
Il lui fait remarquer que le réseau à petit gabarit est sous-utilisé, voire délaissé, alors qu'il pourrait, au contraire, grâce à une politique volontariste, accueillir de nouveaux trafics et, ainsi, jouer un rôle important dans le cadre de la transition énergétique.
Dès lors, il attire son attention sur le canal des Deux-Mers, qui n'accueille plus de transport de marchandises, alors qu'il existe un fort potentiel sur le canal de Garonne et des possibilités sur le canal du Midi.
À titre d'exemple, il lui signale que 75 % des quelques 400 000 tonnes de céréales provenant des régions traversées par le canal, transitent par la route, jusqu'à Port-la-Nouvelle, sur la côte méditerranéenne, alors que le port audois est embranché fluvial.
Il lui demande s'il est dans ses intentions d'examiner les possibilités de développement du transport de marchandises sur le canal des Deux-Mers et quelles mesures concrètes de soutien, il entend prendre en faveur du report modal vers les canaux du Midi et de Garonne.
M. Roland Courteau. Monsieur le ministre, c'est avec quelque regret que j'ai découvert, en prenant connaissance du rapport Mobilité 21, que très peu de projets, sinon aucun, étaient envisagés en matière de fret fluvial pour les vingt prochaines années.
Force est de constater que, depuis trente ans, le fret fluvial a été délaissé, voire abandonné aux évolutions spontanées du marché, au profit du transport routier.
Le transport routier, de marchandises ou de personnes, reste étrangement privilégié, alors qu'il émet plus de 130 000 tonnes de CO2 par an. Il bénéficie ainsi de plusieurs dizaines de milliards d'euros d'investissements par an, quand le transport fluvial ne se voit accorder que 0,9 % de ces montants.
Monsieur le ministre, nous avons mené le débat sur la transition énergétique et même formulé des propositions afin de développer des modes de transport de marchandises moins consommateurs d'énergies fossiles et plus respectueux de l'environnement, tout en restant en adéquation avec les besoins.
Je souhaiterais connaître le sentiment du ministre chargé des transports sur cette question. Compte-t-il relancer le fret fluvial et le considérer comme une vraie filière, conformément à son potentiel et aux engagements pris lors du débat sur la transition énergétique ? Notre pays est très en deçà de ses voisins européens dans ce domaine, alors qu'il bénéficie d'un des réseaux les plus développés.
J'ajouterai que le réseau à petit gabarit est actuellement sous-utilisé, alors même qu'il pourrait accueillir de nouveaux trafics. Il ne doit pas être marginalisé par le réseau à grand gabarit.
À cet égard, je prendrai un exemple qui m'est cher : le canal des Deux-Mers ne sert plus au transport de marchandises, alors qu'il existe de forts potentiels sur le canal de Garonne et sur le canal du Midi. Faut-il rappeler que le canal du Midi, le canal de jonction et le canal de la Robine ont été mis au gabarit Freycinet dans les années soixante-dix et quatre-vingt, à l'exception d'un tout petit tronçon entre Baziège et Argens ?
Ces canaux ont un réel potentiel, qui ne demande qu'à être exploité. Alors qu'il est beaucoup question de transition énergétique, faut-il rappeler que si une péniche fonctionne avec un moteur deux fois plus puissant que celui d'un poids lourd, elle transporte vingt-cinq fois plus de fret ?
M. Robert Tropeano. Tout à fait !
M. Roland Courteau. Je souhaiterais donc que puissent être examinées les possibilités de développement du transport de marchandises sur le canal des Deux-Mers. Dans cette perspective, je demande que le ministre chargé des transports fasse diligenter une étude. Ces canaux ne doivent pas avoir pour unique vocation le tourisme fluvial, même s'il s'agit là d'un facteur de développement. Eu égard aux énormes investissements réalisés dans le passé, ils méritent d'être davantage utilisés : un canal sans transport est un canal mort. Une réflexion sur le retour du fret sur cette voie d'eau, ainsi que sur la mise en place d'un plan de relance du transport fluvial, s'impose donc.
Vous est-il possible, monsieur le ministre, de m'éclairer sur les intentions du Gouvernement à cet égard ?
M. Robert Tropeano. Très bien !
Mme Valérie Létard. Très bonne question !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Guillaume Garot, ministre délégué auprès du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, chargé de l'agroalimentaire. Monsieur le sénateur Courteau, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de Frédéric Cuvillier, qui accompagne le Président de la République en Israël.
Vous savez que le Gouvernement attache une grande importance au transport fluvial, s'agissant en particulier du transport de marchandises.
Le canal des Deux-Mers, composé du canal du Midi et du canal latéral à la Garonne, est limité en gabarit, en termes tant de mouillage que de hauteur libre sous ouvrage ou de longueur d'écluses. Dans ces conditions, il ne permet pas au transport fluvial de véritablement concurrencer le transport routier. Pour cela, il faudrait réaliser des travaux incompatibles avec le classement du canal du Midi au patrimoine mondial de l'humanité.
Toutefois, cela n'exclut pas que le transport fluvial puisse répondre à des marchés ponctuels se satisfaisant des caractéristiques actuelles du canal.
Quoi qu'il en soit, le canal du Midi dispose de nombreux atouts en matière de développement touristique et de loisirs. C'est cette dernière vocation qui est confortée en priorité par l'État, Voies navigables de France et les régions Aquitaine et Midi-Pyrénées, ainsi que par les collectivités riveraines. Ces acteurs ont engagé un partenariat constructif pour restaurer le canal des Deux-Mers, améliorer les conditions d'accueil des usagers et contribuer à la préservation de l'environnement et du patrimoine.
Ainsi, la charte interrégionale du canal des Deux-Mers exprime les ambitions de ce partenariat. Une instance de gouvernance et de coordination des actions a été créée, et nous nous réjouissons que la région Languedoc-Roussillon prévoie aujourd'hui d'intégrer le cadre de cette charte.
Telle est, monsieur le sénateur, la réponse que je souhaitais vous apporter au nom de Frédéric Cuvillier. Notre volonté est d'accompagner le développement que les territoires peuvent construire ensemble autour de ce canal.
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Je persiste à affirmer que le canal des Deux-Mers peut être un instrument de développement économique. Par exemple, 75 % des quelque 400 000 tonnes de céréales produites dans les régions traversées par le canal transitent par la route jusqu'à Port-la-Nouvelle, sur les bords de la Méditerranée, alors que ce port est raccordé au réseau fluvial !
Il ne s'agit que d'un exemple parmi bien d'autres. Je crois savoir que l'Union européenne table sur un renouveau de la batellerie. Ainsi, la Commission européenne a confirmé sa volonté de développer le transport fluvial du fret, notamment sur le canal des Deux-Mers. Dans ces conditions, monsieur le ministre, je ne comprends pas très bien votre réponse...
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