Photo de Jean-Vincent Placé

Jean-Vincent Placé
Question orale sans débat N° 603 au Ministère des personnes


Risques d'exploitation et d'exploration des gaz de schiste dans le département de l'Essonne

Question soumise le 17 octobre 2013

M. Jean-Vincent Placé attire l'attention de M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les risques d'exploitation et d'exploration des gaz de schiste dans le département de l'Essonne.

En décembre 2011, la société Vermilion Energy, entreprise canadienne spécialisée dans l'exploitation des gaz de schiste par fracture hydraulique, a acheté des concessions de mines d'hydrocarbures essonniennes situées sur les communes d'Itteville, de Vert-le-Grand, Vert-le-Petit et du Plessis-Pâté.

Bien que la loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011 visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique interdise l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par des forages suivis d'opérations de fracturation hydraulique de la roche et que les multiples engagements du président de la République, lors de la conférence environnementale de 2012 et, plus récemment, lors du discours du 14 juillet 2013 la consolident, des mouvements suspects ont été repérés dans ces concessions.

En effet, une tour très haute a été installée, en toute discrétion, dans la concession d'Itteville, pendant le mois d'août, et nombre d'observateurs ont craint un repérage pour une future exploitation des gaz de schiste.

Le 11 octobre 2013, le Conseil constitutionnel a entériné la loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011 par sa décision n° 2013-346 QPC. Il a, par ailleurs, confirmé, dans ses considérants, que le « législateur a poursuivi un but d'intérêt général de protection de l'environnement » et que « le législateur a entendu prévenir les risques que ce procédé de recherche et d'exploitation des hydrocarbures est susceptible de faire courir à l'environnement ».

La position gouvernementale étant confortée sur ce dossier, il lui demande donc s'il compte prendre des mesures afin de surveiller les agissements sur les concessions d'Essonne, ainsi que celles sur le territoire national, afin de respecter la bonne application de la loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011.

Réponse émise le 18 décembre 2013

M. Jean-Vincent Placé. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question porte sur le problème majeur des recherches de gaz et pétrole de schiste dans le département de l'Essonne.

Au mois de décembre 2011, une société canadienne, Vermilion Energy, spécialisée dans l'exploitation des gaz et pétrole de schiste par fracturation hydraulique, a obtenu des concessions de mines d'hydrocarbures situées sur les communes d'Itteville, de Vert-le-Grand, de Vert-le-Petit et du Plessis-Pâté.

Bien que l'entreprise se défende de vouloir procéder à une production de gaz et pétrole de schiste, divers aménagements ont été remarqués à l'intérieur des concessions. Ainsi, pendant le mois d'août, une très haute tour a été discrètement installée dans la concession d'Itteville.

Parce que cette tour ressemble à celles qui sont utilisées dans les recherches de pétrole de schiste, nombre d'observateurs ont craint un repérage. De surcroît, les préconisations du rapport de l'OPECST, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, sur ce sujet, dont les auteurs appellent à l'autorisation de forages expérimentaux, ont renforcé la méfiance, le terrain étant tout à fait approprié pour ce genre d'expérimentation.

Depuis lors, la contestation s'est progressivement mise en place. De nombreuses réunions publiques et manifestations ont été organisées et beaucoup d'élus ont marqué leur désapprobation au projet. Le 4 novembre dernier, le conseil général de l'Essonne a notamment adopté, à une très large majorité, toutes sensibilités politiques confondues, une motion visant à rappeler son opposition à l'exploitation et à l'exploration des gaz et pétrole de schiste par cette industrie pétrolière.

À ce titre, je tiens à évoquer la pugnacité du maire de Plessis-Pâté, mon ami Sylvain Tanguy, qui se bat avec courage pour préserver sa commune des nombreuses nuisances et pollutions liées à la fracturation hydraulique.

Fort heureusement, la décision du Conseil constitutionnel du 11 octobre dernier a permis d'apaiser une partie des craintes des riverains. Les Sages ont en effet entériné la loi visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique, en la déclarant conforme à la Constitution. La position ferme du Président de la République et du Gouvernement se voit donc confirmée.

Madame la ministre, les Essonniens et Essonniennes demandent à être rassurés encore davantage, car ils tiennent ardemment à la protection de l'environnement dans leur département et au respect de leur bassin de vie.

C'est pour cette raison que je me permets de vous demander de réaffirmer la position du Gouvernement sur ce dossier, pour ce qui concerne tant l'échelon national que mon département de l'Essonne.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, qui m'a demandé de répondre à sa place.

Sur un plan général, votre intervention traduit bien la profonde crise de confiance qui opacifie aujourd'hui toutes les questions minières dans notre pays et sape les relations entre les industriels, l'État, les élus et l'ensemble de nos concitoyens.

Face à cette méfiance, une seule méthode peut être retenue : celle que le Gouvernement a mise en œuvre, lorsqu'il a repris en main l'examen des demandes de mutation de plusieurs permis de recherches en Île-de-France présentées par la société Hess Oil, à savoir la concertation, la transparence et le respect des expertises, y compris celle des citoyens.

Le Gouvernement a ainsi demandé à un conseiller d'État de formuler, dans la concertation, avec l'ensemble des parties prenantes, et en toute autonomie, des propositions de réforme du code minier.

Ces propositions lui ont été remises le 10 décembre dernier. Leur ambition est double : réconcilier économie et écologie et permettre une véritable participation des citoyens à l'élaboration des décisions minières ayant une incidence sur l'environnement, pour sortir de l'opacité et de la méfiance.

Pour le cas qui vous préoccupe, monsieur le sénateur, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie a souhaité faire une réponse précise. La société Vermilion REP est la filiale française d'un groupe canadien. Premier producteur français de pétrole, elle exploite des concessions, notamment en Aquitaine, où elle a son siège depuis plus de quinze ans. À ce titre, ses activités engendrent directement ou indirectement 600 emplois. En 2012, elle s'est acquittée de 65 millions d'euros d'impôts et de 10 millions d'euros de redevances locales sur ses activités minières.

Les concessions qu'elle exploite en Île-de-France, notamment celle d'Itteville dans l'Essonne, dont vous parliez à l'instant, sont anciennes et ont été délivrées à une époque où il n'était pas question de gaz de schiste. Ces exploitations ne concernent que du pétrole conventionnel.

La haute tour que vous évoquez est un rigpermettant de forer des puits pour récupérer les hydrocarbures. Il est inconcevable qu'un exploitant minier puisse procéder en catimini à l'exploration, à l'exploitation ou à la recherche de gaz de schiste par fracturation hydraulique. Les équipements nécessaires sont lourds, typiques, notamment en raison de leurs besoins en eau, et aisément repérables par les services du ministère chargés de la police des mines.

Par ailleurs - ce sera mon dernier point -, le Conseil constitutionnel, lorsqu'il a, le 10 octobre dernier, validé sans réserve la loi du 13 juillet 2011, a précisé que l'interdiction de recourir à la fracturation était « générale et absolue ». Cela signifie que celle-ci s'applique à tous les travaux et à toutes les substances, aux demandes de permis mentionnant les gaz de schiste comme aux autorisations anciennes qui n'évoquent que des objectifs conventionnels.

Tous les préfets et les services déconcentrés du ministère ont reçu instruction, le 19 septembre 2012, d'inspecter régulièrement les ouvrages miniers, les opérateurs devant faire un rapport de leurs activités.

S'agissant de la concession d'Itteville, ces contrôles n'ont pas révélé d'utilisation de la fracturation hydraulique.

Tout comme vous, monsieur le sénateur, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie reste vigilant concernant l'application de la loi du 13 juillet 2011. La position du Gouvernement, fixée par le Président de la République, est donc claire : il n'y aura ni exploration ni exploitation d'hydrocarbures de roche mère par fracturation hydraulique en France.
(M. Jean-Vincent Placé applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Vincent Placé.

M. Jean-Vincent Placé. Je vous remercie sincèrement, madame la ministre, de cette réponse complète et précise. Je tiens à saluer, sur ce sujet, la constance du Gouvernement, dont je ne doutais d'ailleurs pas. Il défend avec ténacité ses positions, malgré les nombreux obstacles placés sur sa route par les lobbyistes, invoquant des intérêts économiques singulièrement dans la presse.

Je tiens à saluer plus particulièrement le travail de Philippe Martin, qui, avec Pascal Canfin, se trouve en ce moment même à la présidence de la République pour évoquer la conférence Climat 2015.

Le message très clair que vous venez de transmettre avait déjà été diffusé le 28 novembre dernier : le Gouvernement avait en effet refusé de valider le transfert à la compagnie pétrolière Hess Oil de sept permis pétroliers situés en Seine-et-Marne et dans l'Aisne.

Votre réponse me satisfait totalement, madame la ministre. Dans la mesure où le procédé de fracturation hydraulique rend les choses irréversibles sur le plan environnemental, en particulier pour ce qui concerne les nappes phréatiques, votre positionnement me paraît particulièrement important pour notre environnement, nos espaces naturels et notre biodiversité.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion