M. Michel Teston appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur l'application des règles européennes en matière d'autorisation d'enrichissement des vins.
En effet, l'organisation commune de marché (OCM) viti-vinicole permet l'enrichissement du vin par addition de saccharose (chaptalisation), de moût concentré ou de moût concentré rectifié (MC/MCR) ou encore par des techniques soustractives.
En outre, la chaptalisation est interdite dans le sud de la France, en Italie, en Espagne et au Portugal. Toutefois, elle peut être autorisée exceptionnellement, à titre dérogatoire, par l'État membre, lorsque les conditions climatiques sont reconnues comme défavorables.
Pour le sud de la France, ces restrictions géographiques sont définies par territoire de ressort des cours d'appel. Ainsi, le département de l'Ardèche, qui dépend de la cour d'appel de Nîmes, est le seul département de la région Rhône-Alpes dans lequel la chaptalisation est interdite.
Cette application de la règlementation européenne engendre, d'une part, des situations incohérentes. Ainsi, les producteurs ardéchois d'appellation d'origine contrôlée (AOC) Côtes-du-Rhône n'ont pas été autorisés, en 2013, à enrichir leurs vins par addition de saccharose, alors que les producteurs d'AOC Côtes-du-Rhône voisins, drômois ou ligériens, ont pu le faire ; et, d'autre part, des coûts supplémentaires importants car l'enrichissement par MC/MCR est beaucoup plus coûteux et ne bénéficie plus, depuis le 31 juillet 2012, de l'aide octroyée à titre transitoire qui visait à compenser cette différence de coût.
Aussi lui demande-t-il de lui indiquer s'il entend modifier l'application des règles européennes en matière d'autorisations d'enrichissement des vins, notamment concernant le zonage, afin de supprimer les cas de distorsion de concurrence entre viticulteurs voisins produisant sous la même appellation.
M. Michel Teston. Madame la secrétaire d'État, permettez-moi à mon tour de vous féliciter de votre nomination.
L'organisation commune de marché, l'OCM, vitivinicole, entrée en vigueur le 1erjuillet 2008, permet l'enrichissement des vins par addition de saccharose - c'est la chaptalisation -, de moût concentré, dit MC, ou de moût concentré rectifié, dit MCR, ou encore par des techniques soustractives. La chaptalisation est toutefois soumise à des restrictions géographiques : elle est interdite dans le sud de la France, en Italie, en Espagne et au Portugal. Elle peut cependant être autorisée exceptionnellement, à titre dérogatoire, par l'État membre lorsque les conditions climatiques sont reconnues comme défavorables.
Pour le sud de la France, ces restrictions géographiques sont définies sur la base du ressort des cours d'appel. Les dispositions nationales en matière d'enrichissement ont été modifiées par le décret n° 2012-655 du 4 mai 2012 et l'arrêté du 24 juillet 2012. Depuis la récolte 2012, les autorisations d'enrichissement sont délivrées par les préfets de région. Pour la récolte 2013, le département de l'Ardèche, qui dépend de la cour d'appel de Nîmes, a été le seul département de la région Rhône-Alpes dans lequel la chaptalisation a été interdite.
Je m'interroge donc sur la cohérence des modalités d'application par la France de la réglementation européenne.
D'une part, ces modalités d'application donnent lieu à des distorsions de concurrence entre les zones de production : le périmètre d'autorisation ne pouvant être restreint à une aire géographique AOP ou IGP, les producteurs ardéchois d'AOC côtes-du-Rhône n'ont pas été autorisés cette année à enrichir leurs vins par addition de saccharose, alors que les producteurs d'AOC côtes-du-Rhône voisins - drômois, ligériens ou rhodaniens - ont pu le faire.
D'autre part, pour les départements dans lesquels la chaptalisation est interdite, ces modalités d'application engendrent des coûts supplémentaires importants : non seulement l'enrichissement par ajout de MC ou de MCR est beaucoup plus coûteux, mais, en outre, l'aide octroyée à titre transitoire pour compenser cette différence de coût a été supprimée le 31 juillet 2012. L'union des coopératives viticoles ardéchoises indique que, pour la récolte 2013, le coût de l'enrichissement par ajout de MC ou de MCR s'est élevé à 500 000 euros ; c'est un coût près de trois fois supérieur à celui d'un enrichissement par addition de saccharose.
Je souhaiterais donc, madame la secrétaire d'État, que vous m'indiquiez s'il est envisageable de modifier les modalités d'application par la France des règles européennes en matière d'autorisation de l'enrichissement des vins, notamment s'agissant du zonage, afin de supprimer les différences de coût entre viticulteurs voisins produisant sous la même appellation.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, je vous prie bien vouloir excuser l'absence de Stéphane Le Foll, qui m'a chargée de vous répondre. Je vous remercie de votre question, qui m'intéresse tout particulièrement en tant qu'élue des Pyrénées-Orientales.
Votre beau département produit lui aussi du vin. Comme vous l'avez rappelé, la réglementation communautaire permet aux États membres, lorsque les conditions climatiques sont défavorables - ce qui est relativement rare dans nos départements respectifs et dans le sud de la France en général ; voilà pourquoi nous avons du bon vin -, d'autoriser l'enrichissement des vins par ajout de MC ou de MCR sur tout le territoire de l'Union européenne. En revanche, le recours à l'enrichissement par sucrage à sec des vins, ou chaptalisation, n'est permis que dans les pays du nord de l'Europe et dans le nord de la France.
Pour les vingt-sept départements du sud de la France, dont le vôtre, dans lesquels la chaptalisation est interdite, la réglementation communautaire en vigueur prévoit une dérogation lorsque des circonstances exceptionnelles le justifient. Par ailleurs, le règlement OCM de 2008 a décidé la suppression de l'aide à l'enrichissement par ajout de MC ou de MCR à compter des vendanges 2012. Les opérateurs concernés étaient donc informés depuis 2008 de cette suppression.
À la suite de la campagne 2013, les représentants nationaux des viticulteurs ont demandé aux ministres en charge de l'agriculture et de la consommation la réintroduction de l'aide communautaire à l'enrichissement des vins par ajout de MC ou de MCR et l'harmonisation des décisions d'autorisation d'enrichissement au niveau national. En réponse, il a été convenu avec les professionnels de la filière vitivinicole d'intégrer la problématique de l'enrichissement des vins à la réflexion stratégique menée par la filière à la demande de Stéphane Le Foll ; cette réflexion doit s'achever en juin 2014. La France disposera ainsi d'une stratégie d'ensemble cohérente et partagée par toute la filière, qui lui permettra, le cas échéant, de présenter des demandes d'évolution de la réglementation communautaire à l'automne 2014.
En parallèle, la rénovation du dispositif d'autorisation d'enrichissement des vins a été engagée afin, d'une part, de renforcer la coordination interrégionale - vous y avez fait allusion - et, d'autre part, de mettre à la disposition des préfets de région des lignes directrices permettant d'harmoniser le cadre de décision au niveau national.
M. le président. La parole est à M. Michel Teston.
M. Michel Teston. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse.
Vous avez fait référence au groupe de travail mis en place par FranceAgriMer à la demande du ministre de l'agriculture. Il est important que ce groupe de travail présente des propositions équilibrées, et il serait bon que celles-ci soient formulées avant la récolte 2014. En effet, il n'est pas cohérent que, lorsqu'un État autorise à titre dérogatoire l'enrichissement des vins au motif que les conditions climatiques ont été défavorables, certains producteurs d'une appellation puissent enrichir leur vin par addition de saccharose tandis que d'autres sont obligés d'utiliser du MC ou du MCR, dont le coût est près de trois fois plus élevé.
Je souhaite que le groupe de travail publie rapidement ses propositions - vous avez parlé du mois de juin -, afin que des mesures soient prises avant la récolte 2014.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.