Le texte de cette question sera publié dès sa transmission par le Journal Officiel. Dans cette attente, vous pouvez vous reporter aux vidéos de la rubrique « Questions au Gouvernement » accessible depuis la notice électroniquedu Sénateur auteur de la question.
M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Monsieur le sénateur, vous avez rappelé certains grands principes de la laïcité, notamment la séparation existant entre l'espace privé et l'espace public. Certains endroits sont, en quelque sorte, au croisement des deux ; vous avez évoqué la rue et l'entreprise.
En réalité, la question est de savoir comment appliquer de façon équilibrée ces principes dans ces espaces mixtes. Tous les espaces de travail ne le sont pas. Ceux qui offrent des services publics sont considérés comme faisant partie à 100 % de l'espace public : en l'espèce, le principe de laïcité, au sens où nous l'entendons dans cette enceinte, s'applique évidemment dans toute sa force. Aucun signe particulier ne doit permettre de distinguer les uns des autres.
S'agissant de l'entreprise - la crèche Baby Loup est une entreprise privée, mais son personnel est au contact avec le public -, la question est de savoir s'il est possible d'interdire catégoriquement pour tous les employés le port de signes distinctifs, ou si, comme l'autorise le code du travail, cette interdiction peut ne valoir que pour certaines catégories, comme celles qui sont au contact avec le public.
La question que je viens de poser est celle qui est aujourd'hui juridiquement soumise aux juridictions. Vous avez évoqué les différentes décisions rendues dans l'affaire de la crèche précitée. De mémoire, le conseil des prud'hommes a considéré que le licenciement pour port d'un signe distinctif était légitime ; une cour d'appel a confirmé ce jugement de première instance ; la Cour de cassation l'a infirmé, considérant que le règlement intérieur de la crèche était trop catégorique et trop général ; une nouvelle cour d'appel, celle de Paris, s'est « rebellée » contre cette dernière décision et est revenue à la position d'origine. Il revient maintenant à la Cour de cassation de rendre une décision finale, dont nous devrons tirer des conclusions.
Ma conviction est qu'il existe aujourd'hui, au sein du code du travail et dans les entreprises, des outils qui permettent de faire la différence, de réglementer sans interdire de manière catégorique. C'est plutôt dans cette voie que notre pays devrait, me semble-t-il, s'engager.
M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille, pour la réplique.
M. Hervé Marseille. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse. Nous attendons avec impatience la décision de la Cour de cassation, qui fera, sans nul doute, date, car cette question soulève, à l'évidence, des difficultés auxquelles de nombreuses entreprises risquent d'être confrontées.
Il est important de réaffirmer nos principes fondamentaux. Néanmoins, il sera peut-être nécessaire de compléter, sur certains points, les textes existants, car, le temps passant, l'évolution de la société rend utiles de telles adaptations.
Malgré tout, cette situation traduit malheureusement aussi un échec de notre système éducatif. L'esprit de tolérance, qui devrait être enseigné davantage dans les familles et à l'école, trouve là ses limites. Au-delà de ces structures, il revient au législateur et aux juridictions de faire en sorte que cet esprit de tolérance perdure dans notre pays.
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