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M. Bernard Cazeneuve,ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, vous venez avec beaucoup de force de rappeler ce que sont l'antisémitisme et toutes les formes de haine pouvant ronger la République de l'intérieur et conduire peu à peu, parfois imperceptiblement, à l'abandon des valeurs qui la fondent et auxquelles, collectivement, nous tenons tous dans cet hémicycle.
Je me suis rendu à Créteil dimanche dernier pour participer à la grande manifestation organisée par la communauté juive de cette commune, tout à fait blessée par l'acte abject subi par un jeune couple quelques jours auparavant.
J'ai vu des hommes et des femmes abattus- certains étaient révoltés. J'ai noté dans tous les regards une immense tristesse et, surtout, une incommensurable inquiétude, celle d'une communauté sachant que l'histoire a déjà parlé de façon monstrueuse ; qu'elle a conduit à la déportation, à l'assassinat de millions de juifs - hommes, femmes, enfants, personnes âgées -, dans les conditions que l'on sait ; une communauté qui ne comprend pas, alors que tous ces événements sont encore assez récents, finalement, que l'on puisse ne pas se souvenir.
Vous avez raison, il est important d'organiser une mobilisation générale. Celle-ci est d'autant plus essentielle au vu de ce qui se diffuse, notamment, dans l'espace numérique. Bien des digues sont tombées : dans de nombreux tweets, l'usage de la phrase brève est mis au service des idées courtes, voire de la haine.
Une mobilisation générale s'impose donc. Elle est souhaitée par le Premier ministre, qui s'est à plusieurs reprises exprimé avec beaucoup de force sur ce sujet et qui a souhaité que la délégation interministérielle à la lutte contre le racisme et l'antisémitisme soit dorénavant rattachée à ses services, de manière à mettre en place une véritable action interministérielle.
Bien entendu, le ministère de l'intérieur, en tant que chargé de la protection des lieux de culte, sera concerné. C'est aussi lui qui, par l'intermédiaire des préfets, porte plainte au titre de l'article 40 du code de procédure pénale chaque fois qu'un acte de haine raciste ou antisémite est constaté.
Le ministère de l'éducation nationale, qui porte avec le ministère de l'intérieur, ministère des cultes, l'ambition de laïcité, sera également mobilisé pour assurer la protection de tous les enfants de la République, pour les rassembler, dans l'école et dans l'espace public, autour de cette valeur fondamentale et de toutes les autres valeurs de la République. Le ministère de la jeunesse et celui de la ville pourront également, de façon transversale, faire entendre un message de lutte contre le racisme et l'antisémitisme.
Une mobilisation de l'ensemble de la société sera nécessaire. Faut-il rappeler que nous n'étions que 1 500 personnes rassemblées à Créteil ? À d'autres époques, nous aurions été infiniment plus nombreux. Les intellectuels se seraient exprimés, les forces sociales se seraient mises en mouvement.
Par conséquent, il est impératif que cette grande cause devienne la cause de tous et de garder en mémoire cette belle formule de Frantz Fanon : « Quand vous entendez dire du mal des juifs, tendez l'oreille, on parle de vous... »
(Applaudissements.)
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