Mme Hélène Lipietz interroge Mme la ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement, au sujet de la parité lors des élections de délégués de classe.
Depuis la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République, l'article premier de la Constitution, à son alinéa 2, précise l'objectif de parité : « la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales ».
Or, les élections de déléguée de classe n'obligent pas à la parité des deux élues.
Comme l'a indiqué le Conseil d'État dans sa décision n° 362280 du 7 mai 2013, seule la loi peut imposer la parité.
Elle lui demande quand elle entend prévoir dans la loi une telle obligation.
En attendant cette loi, elle lui demande comment elle entend inciter à l'objectif de parité dans les élections des délégués de classe.
Mme Hélène Lipietz. Depuis la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la VeRépublique, l'article 1erde la Constitution mentionne à son second alinéa l'objectif de parité : « La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales. »
Compte tenu de cette loi, certains enseignants, afin de respecter l'objectif de parité, organisaient les élections des délégués de classe en deux listes - candidates et candidats - ou en binôme paritaire obligatoire. Cependant, le Conseil d'État a précisé, dans sa décision n° 362280 du 7 mai 2013, que seule la loi pouvait imposer la parité. C'est pourquoi, à la rentrée 2013, l'inspection académique de Paris a indiqué aux professeurs qu'il était inconstitutionnel d'obliger les élèves à élire deux délégués de sexe différent.
La Constitution est certes applicable à tous et par tous, même si le risque qu'un contentieux naisse d'une pratique de vote paritaire est extrêmement faible. Il n'en reste pas moins vrai que c'est dès le plus jeune âge que la parité doit faire son chemin au quotidien et qu'il doit apparaître évident aux enfants, à défaut d'apparaître évident aux adultes et d'être naturel dans nos sociétés, qu'une élection de deux personnes est forcément, obligatoirement, une élection paritaire.
De la maternelle jusqu'au lycée, l'école est le premier lieu d'apprentissage de l'égalité des sexes. Les élections de délégués d'élèves sont aujourd'hui régies par l'article R. 421-28 du code de l'éducation. Cet article est en avance sur certains points, puisque aucune condition de nationalité n'est requise, mais il appartient à la partie réglementaire et non à la partie législative du code. C'est pourquoi je vous demande, madame la secrétaire d'État, quand le Gouvernement entend introduire par voie législative l'obligation de parité dans le code de l'éducation. J'aimerais également savoir comment il compte inciter dès à présent au respect de l'objectif de parité dans les élections des délégués de classe.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche. M. Benoît Hamon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche vous prie de bien vouloir excuser son absence. Pour ma part, madame la sénatrice, je suis heureuse de répondre en son nom à cette question qui nous touche particulièrement.
Avant d'aborder la question de la parité lors des élections des délégués d'élèves, je souhaite revenir un instant sur le rôle de l'élu au sein des établissements scolaires.
Un élu au collège ou au lycée dispose d'une place différente de celle des autres élèves. Il doit participer à plusieurs instances, et sa parole compte. Il doit pouvoir, en tant qu'élu, et parce qu'il est élu, compter sur la prise en considération de son avis, de son analyse et de ses propositions, qui doivent faire l'objet de discussions avec les professionnels. Il sera ainsi en mesure de rendre compte efficacement et objectivement de ses activités électives auprès de ses camarades de classe.
Or nombreux sont les élus qui disent leur désarroi face à la difficulté d'être reconnus comme tels, avec des responsabilités et des droits. Ces représentants ne revendiquent pas de pouvoirs supplémentaires, mais ils souhaitent que les professionnels reconnaissent leur autorité issue de l'élection. L'éducation nationale s'est penchée sur cette question à travers l'excellent rapport de la députée Anne-Lise Dufour-Tonini, intitulé Pour un acte II de la vie lycéenne : vers la démocratie lycéenne. Néanmoins, madame la sénatrice, vous avez raison, aucun dispositif ne permet aujourd'hui d'instaurer la parité dans les élections des instances représentatives des élèves.
Comme vous l'avez souligné, seul un dispositif législatif nous permettrait de remédier à cette situation. Cependant, la démarche que vous proposez rencontre deux limites. La première est la lourdeur des procédures législatives. La partie législative du code de l'éducation nationale a déjà été modifiée très profondément par la loi du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République. La seconde limite, que vous connaissez, tient au fort déséquilibre du ratio garçons/filles dans certains établissements : par exemple, les filles sont très largement majoritaires dans les carrières médico-sociales et esthétiques, tandis que les garçons le sont dans les filières techniques et mécaniques. On peut le regretter, mais c'est la réalité actuelle.
Pour autant, il ne s'agit pas de rester inactif. Selon l'idée émise par le rapport Pour un acte II de la vie lycéenne : vers la démocratie lycéenne, il nous faut œuvrer non pas tant pour garantir une parité stricte que pour améliorer l'équilibre de la représentation des filles et des garçons au sein des instances électives, afin de parvenir à terme à la parité. Pour ce faire, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche demandera très prochainement aux recteurs de sensibiliser les chefs d'établissement à ce sujet de société qui mérite - vous avez eu raison de le souligner - notre pleine et entière attention.
Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Lipietz.
Mme Hélène Lipietz. Je suis ravie que Mme la secrétaire d'État ait souligné le rôle fondamental des délégués d'élèves. Certains d'entre eux viennent d'ailleurs visiter cet hémicycle, les directeurs des collèges et des lycées étant bien conscients du rôle des délégués d'élèves : ils exercent un mandat électif, le premier de leur vie. Je pense qu'il s'agit de reconnaître non pas une autorité naturelle, mais la légitimité née de l'élection.
Quant aux arguments sur la parité, j'ai l'impression de les entendre depuis deux ans, à tous les niveaux : la parité serait absolument impossible, il n'y aurait pas assez de femmes, etc. On a vraiment l'impression que tout est bloqué dans notre société, qu'on ne veut pas aller vers la parité parce que cela coûterait cher, parce que les hommes - ici les élèves de sexe masculin - n'ont pas démérité... La Constitution n'exige pas une parité stricte, mais elle pose un objectif de parité, qu'il faut atteindre là où c'est possible.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de nous annoncer que, heureusement, à la rentrée 2014, le ministre de l'éducation nationale adressera aux recteurs des consignes afin que l'objectif de parité soit mis en avant. Cela n'avait pas été le cas à la rentrée 2013.
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