M. Alain Bertrand attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur certaines dispositions de la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014.
L'article 41 de cette loi énonce, notamment, que « lorsqu'elles répondent à des critères d'isolement géographique, les activités mentionnées au 1° de l'article L. 162-22 exercées par des établissements de santé situés dans des zones à faible densité de population peuvent être financées selon des modalités dérogatoires aux articles L. 162-22-6 et L. 162-22-10, sous réserve que les prestations d'hospitalisation assurées par ces établissements et la situation financière de ceux-ci le justifient ».
Afin que cette disposition soit mise en œuvre, le texte précise qu'un « décret en Conseil d'État détermine ces modalités dérogatoires de financement, les critères permettant de caractériser l'isolement géographique des activités concernées ainsi que les critères d'éligibilité des établissements de santé tenant, d'une part, à la densité de population des zones dans lesquelles ils sont situés et, d'autre part, aux prestations qu'ils assurent et à leur situation financière ». Ce dispositif est d'une importance cruciale pour la Lozère, dont la quasi totalité du territoire est classée en zone de revitalisation rurale
(ZRR).
Afin de le voir entrer le plus rapidement possible en vigueur, il lui demande si ce décret va être publié dans un délai rapproché.
M. Alain Bertrand. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 prévoit, en son article 41, que « lorsqu'elles répondent à des critères d'isolement géographique, les activités mentionnées à l'article L. 162-22 exercées par des établissements de santé » - le plus souvent des hôpitaux - « situés dans des zones à faible densité de population, peuvent être financées selon des modalités dérogatoires aux articles L. 162-22-6 et L. 162-22-10, sous réserve que les prestations d'hospitalisation assurées par ces établissements et la situation financière de ceux-ci le justifient ».
En d'autres termes, il s'agit d'extraire ces établissements, au moins en partie, du dispositif de la tarification à l'activité, ou T2A. Ces établissements hospitaliers, anciennement appelés « centres hospitaliers généraux », c'est-à-dire des hôpitaux de territoire, se caractérisent par l'éloignement des métropoles, des agglomérations et des grandes villes, ainsi que par une offre généraliste et des missions nombreuses, étendues et indispensables aux territoires, aux citoyens et à la politique de santé publique.
Or le dispositif de la T2A, certes vertueux, est, par essence, inadapté aux hôpitaux situés en zone à faible densité de population, qui répondent par nature à un besoin de santé publique - les Français y sont très attachés -,...
M. Jacques Mézard. C'est vrai !
M. Alain Bertrand. ... pour un faible nombre d'habitants et donc génèrent moins de recettes d'activité représentatives d'un faible nombre d'actes. Il s'agit ainsi de centres hospitaliers qui, couvrant tout un territoire mais peu de patients, et réalisant peu d'actes, se trouvent dans l'impossibilité d'équilibrer leurs comptes.
L'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 permet donc de corriger ce déséquilibre.
Afin, toutefois, que cette disposition soit mise en œuvre, le texte précise qu'un « décret en Conseil d'État » doit être pris pour déterminer les« modalités dérogatoires de financement, les critères permettant de caractériser l'isolement géographique des activités concernées ainsi que les critères d'éligibilité des établissements de santé tenant, d'une part, à la densité de population des zones dans lesquelles ils sont situés » - ce devrait être assez est simple à déterminer - « et, d'autre part, aux prestations qu'ils assurent et à leur situation financière ».
Ce décret est d'une importance cruciale pour les hôpitaux de territoire en Lozère, comme dans d'autres territoires hyper-ruraux.
Aussi ma question est simple, madame la secrétaire d'État : quand ce décret si important sera-t-il publié ?
M. Jacques Mézard. Excellent ! Judicieux !
(Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ségolène Neuville,secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Mme Marisol Touraine. Je vais répondre à la question précise que vous posez sur le système de tarification des hôpitaux ruraux.
Vous l'avez dit, l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a introduit une excellente disposition prenant en compte la spécificité de ces établissements de santé pour lesquels la tarification à l'activité ne convient absolument pas, dans la mesure où elle requiert l'augmentation du nombre d'actes réalisés, ce qui est impossible quand il n'y a pas assez de patients, à moins d'imaginer d'augmenter le nombre d'actes par patient, ce qui irait à l'encontre d'une bonne prise en charge médicale.
Il était donc logique d'imaginer un autre système de financement pour ces établissements de santé, et c'est tout l'esprit de cet article 41.
L'article prévoit une fixation par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, sur proposition de chaque directeur général d'agence régionale de santé, de la liste des établissements éligibles à ce financement spécifique. C'est bien ici que réside la difficulté : établir la liste des établissements qui pourront disposer de ce financement, ceux qui sont situés dans des zones très rurales et qui présentent un risque de désertification médicale. Il me semble que la Lozère pourrait, en effet, être concernée.
Vous l'avez évoqué, un décret en Conseil d'État est nécessaire pour permettre la bonne application de cette disposition. Il a vocation à encadrer strictement les critères d'éligibilité au financement. Il précisera, notamment, les critères d'isolement géographique et de faible densité démographique, ainsi que les autres critères d'éligibilité sur la base desquels la ministre fixera la liste des établissements retenus ; il encadrera également strictement le ou les modèles de financement adaptés.
Ce décret d'application est en cours de finalisation. Pourquoi un tel délai ? Tout simplement parce que Marisol Touraine a souhaité recueillir l'avis des représentants des fédérations hospitalières sur les conditions de mise enœuvre de la mesure. Cette concertation est en cours et devrait encore se poursuivre durant quelques jours, voire quelques semaines.
Vous posez une question précise et je vous réponds non moins précisément : l'objectif de la ministre est d'adresser le projet de décret au Conseil d'État avant l'été, en vue d'une sélection définitive des établissements concernés par le dispositif.
J'ajoute que cette disposition s'inscrit dans le cadre plus global de la réforme d'ensemble du modèle de financement des établissements de santé que Marisol Touraine a engagée dès sa nomination en qualité de ministre des affaires sociales et de la santé, et qui constitue l'une de ses priorités.
Pour terminer, monsieur le sénateur, je m'associe à Marisol Touraine pour saluer votre implication en faveur de votre territoire, la Lozère, dont vous savez porter avec beaucoup de conviction les dossiers !
M. Yvon Collin. Voilà un bel hommage !
(Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Bertrand.
M. Alain Bertrand. Je remercie Mme la secrétaire d'État pour sa réponse, ainsi que Mme Marisol Touraine, qui va prochainement adresser ce projet de décret au Conseil d'État après propositions des agences régionales de santé. Cela me satisfait pleinement.
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