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Roland Courteau
Question orale sans débat N° 883 au Ministère de l'agriculture


Viticulture dans le département de l'Aude

Question soumise le 16 octobre 2014

M. Roland Courteau fait part à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement de ses plus vives préoccupations, au regard de la situation de la viticulture et du secteur agricole en général, tout particulièrement, dans le département de l'Aude.

Il lui rappelle que la grêle, la sécheresse et le gel ont durement frappé ce département au cours des précédents mois, entraînant ruine et désolation dans les campagnes.

Ainsi, s'achemine-t-on vers la plus petite récolte de l'histoire viticole du département.

Il attire donc son attention sur l'urgence qu'il y a à ce que les mesures annoncées se mettent en place : dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétaire non bâties ; prise en charge des prêts de trésorerie et des intérêts sur les prêts professionnels ; prise en charge auprès des caisses de la Mutualité sociale agricole (MSA) des cotisations sociales. Concernant ce dernier point (exonération de la MSA), il lui indique que le syndicat des vignerons lui a fait part de ses plus vives préoccupations relativement au montant de l'enveloppe.

Enfin, sur un plan plus général, il lui fait part des fortes inquiétudes concernant le contrat « vendanges » et des menaces portant sur les exonérations de cotisations salariales, ainsi que sur la demande forte de la profession de voir rétablie, au niveau européen, pour 2015, l'aide aux moûts concentrés. Il lui demande donc de bien vouloir lui apporter sur l'ensemble de ces points, les apaisements souhaités.

Réponse émise le 22 octobre 2014

M. Roland Courteau. Monsieur le ministre, comme vous le savez, la terre d'Aude est dans une situation des plus préoccupantes depuis le cataclysme qui a ravagé près de 15 000 hectares agricoles, le 6 juillet dernier. Certes, il n'y a pas eu de victimes humaines, mais les blessures morales et les conséquences sociales et économiques sont, elles, très profondes pour ces femmes et ces hommes qui ont vu leurs parcelles de vignes, d'arbres fruitiers, de maraîchage ou de tournesols entièrement dévastées.

En fait, ce dimanche 6 juillet, le ciel est tombé sur un tiers du vignoble audois. Un véritable cataclysme ! La récolte de 2014 a été anéantie ; or peu de viticulteurs sont assurés. Nous sommes donc en situation de grande urgence. De surcroît, d'importantes parts de marchés difficilement gagnées par le passé sont aujourd'hui perdues.

Mais, plus grave encore, les conséquences seront lourdes aussi pour les récoltes de 2015 et de 2016, tant les pertes de fonds sont importantes. Et tout cela alors que notre viticulture se relevait tout juste de six années de crise et d'arrachages successifs !

Lors de votre visite sur le terrain, monsieur le ministre, qui a été particulièrement appréciée et dont je vous remercie, vous avez pu constater l'ampleur du désastre. Dans un tel contexte, il y a urgence à aider les viticulteurs sinistrés.

Pouvez-vous faire le point sur les mesures qui ont été engagées : dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, prise en charge des prêts de trésorerie et des intérêts sur les prêts professionnels, prise en charge, auprès des caisses de la Mutualité sociale agricole, des cotisations sociales ?

Sur ce dernier point, le syndicat des vignerons nous a fait part de ses plus vives préoccupations concernant le montant de l'enveloppe. Certes, l'annonce faite par vos soins, monsieur le ministre, d'une enveloppe de prise en charge des cotisations sociales passant de 15 millions à 23 millions d'euros a suscité beaucoup d'espoirs. Cependant, les propos tenus par certains responsables sur le plan régional ont tempéré lourdement un certain optimisme.

Je rappelle que les viticulteurs audois estiment la prise en charge nécessaire à hauteur de 2,5 millions d'euros. Je veux donc croire, compte tenu du contexte que je viens de décrire, que les taux de prise en charge ne seront pas en deçà des attentes.

Le monde viticole vous fait confiance, monsieur le ministre. Il attend beaucoup de vous sur ce dossier de la Mutualité sociale agricole, tout comme il attend beaucoup de vous sur d'autres dossiers : je pense notamment aux menaces pesant sur les exonérations de cotisations salariales liées aux contrats « vendanges » ; je pense aussi à la demande forte de la profession de voir rétablie sur le plan européen, pour 2015, l'aide aux moûts concentrés ; je pense en outre aux mesures en faveur des exploitants agricoles qui s'engagent à souscrire une assurance climatique et, enfin, aux inquiétudes soulevées par la réforme du forfait agricole.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll,ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je sais que vous êtes mobilisé depuis très longtemps sur les questions viticoles, en particulier dans le département de l'Aude.

Tout d'abord, je ne comprends pas, je n'accepte pas et je condamne le fait que l'on ait pu, dans l'Aude, dégrader les locaux d'une Mutualité sociale agricole.

La Mutualité sociale agricole - je le rappelle à tous les agriculteurs - représente certes des cotisations à payer, mais également des prestations rendues. Dans les pays où il n'existe pas de mutuelle pour se protéger des accidents et de la maladie, c'est l'assurance qui intervient. Or, partout où il existe un système assurantiel, celui-ci coûte beaucoup plus cher et assure une moins bonne protection que le système mutualiste. Comme je l'avais déjà dit lors des incidents qui se sont produits en Bretagne, je répète que s'attaquer à la MSA au nom des charges, c'est oublier les prestations et oublier qu'un système mutualiste est le meilleur système pour se protéger contre les accidents et la maladie.

Monsieur le sénateur, vous m'avez interrogé sur plusieurs points. Oui, je confirme l'augmentation de l'enveloppe de la caisse centrale de la MSA de 15 millions à 23 millions d'euros. J'ai pu constater, dans l'Aude, la catastrophe qui a affecté près de 15 000 hectares. Je veillerai personnellement à l'application des mesures, en fonction des critères que j'avais indiqués à l'époque, afin que les coopératives et les viticulteurs qui ont subi cet aléa climatique majeur puissent passer cette période difficile.

La préfecture, le travail qui est engagé, les crédits qui ont été augmentés de près de 50 % sont là pour apporter les réponses nécessaires à cette situation. J'ajouterai les négociations qui sont en cours sur les prêts bancaires - c'est un point important - ainsi que sur la taxe sur le foncier non bâti. Bien entendu, l'ensemble du dispositif sera mis en place pour permettre une aide nécessaire et absolument légitime : les dégradations subies par ces 15 000 hectares sont en effet irréversibles pour la récolte de cette année, et les conséquences seront également lourdes pour les années suivantes compte tenu des importantes pertes de fonds.

Vous m'avez interrogé sur les moûts concentrés rectifiés, monsieur le sénateur, un débat qui date de la fameuse OCM viti-vinicole négociée en 2008-2009. Nous sommes revenus sur les droits de plantation, mais la question des moûts concentrés reste en suspens. Je me suis engagé à rouvrir le débat sur ce point avec la future Commission afin d'offrir le choix entre le saccharose et des moûts concentrés, qui sont d'ailleurs très utiles pour valoriser une partie de la production viticole.

Je suis mobilisé sur ce sujet comme je l'ai été sur celui des droits de plantation. À moi de trouver des accords et de travailler avec les autres pays européens, car je me suis engagé sur cette question.

S'agissant du contrat « vendanges »,je rappellerai deux choses.

Monsieur le sénateur, nous avons décidé de supprimer les exonérations liées au contrat« vendanges », parce qu'elles sont de même nature que les exonérations de charges salariales sur les bas salaires proposées par le Gouvernement et censurées par le Conseil constitutionnel. Se substitue donc à cette disposition la suppression de la première tranche de l'impôt sur le revenu, qui vaut pour tout le monde.

Le caractère spécifique du contrat« vendanges » est maintenu, en particulier la possibilité de le cumuler avec un congé salarié ou un emploi de fonctionnaire. Seul le dispositif d'exonération des charges salariales a été supprimé.

S'agissant de la question des assurances climatiques, nous sommes obligés de travailler sur un projet global en raison de la demande légitime de la profession de pouvoir s'assurer contre les aléas climatiques. Nous avons connu de tels aléas en Gironde, en Languedoc-Roussillon... Leur intensité et leur fréquence étant de plus en plus importantes, nous devons être capables de mettre en place un système assurantiel.

Un travail - technique - est engagé avec les coopératives et les grandes banques afin de développer des produits d'assurance et de mettre en place une mutualisation. J'insiste sur ce dernier point : la mutualisation est essentielle, car si l'on demande aux personnes les plus fragiles, les plus soumises aux aléas climatiques de payer une assurance, cela ne marchera pas non plus ! Ce sera trop cher, donc impossible à mettre enœuvre ! La mutualisation est par conséquent indispensable. D'ici à la fin de l'année, nous serons en mesure de vous faire des propositions. Il s'agit d'un travail à la fois long et lourd.

J'ajouterai encore un point, monsieur le sénateur : nous enverrons à tous les parlementaires un document sur l'application du crédit d'impôt pour la compétitivité et pour l'emploi, le CICE, filière par filière. S'agissant de la filière viticole, la montée en charge du CICE et du Pacte de responsabilité devrait permettre d'enregistrer 60 millions d'euros d'allégements de charges supplémentaires entre 2014 et 2015, le total des allégements de charges sur le coût du travail dans la viticulture s'élevant, en 2015, à 344 millions d'euros.

Cette baisse, qui s'ajoute au maintien du dispositif des travailleurs occasionnels-demandeurs d'emploi, les TO-DE, ainsi qu'à l'ensemble des mesures déjà prises, est un choix stratégique qui doit permettre à la viticulture de poursuivre son développement.

Le grand Languedoc-Roussillon a été exemplaire depuis quinze, vingt ans dans sa restructuration, dans sa nouvelle ambition, dans la montée en gamme des produits viticoles. Je tiens à vous dire que ces baisses du coût moyen du travail constituent une potentialité supplémentaire pour investir encore dans les choix stratégiques que la filière a faits depuis longtemps en faveur de la qualité et de l'exportation.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Je remercie M. le ministre. Je savais que l'on pouvait lui faire confiance.

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