M. Bruno Retailleau appelle l'attention de M. le Premier ministre sur les inquiétudes relatives aux conséquences du transfert précipité de la bande des 700 MHz, dit deuxième dividende numérique.
Il apparaît clairement, et les dernières auditions réalisées au Sénat le soulignent, que la réaffectation de cette bande, sans concertation et anticipation, aura de lourdes conséquences : la réduction de 30 % du spectre hertzien pour la télévision numérique terrestre (TNT) imposera naturellement la généralisation, prévue pour avril 2016, de la technique de compression MPEG4 pour sa diffusion. Ce changement de grande ampleur nécessitera l'équipement des téléspectateurs ne disposant pas à l'heure actuelle de récepteurs compatibles et un apport financier, sans quoi une fragilisation de la couverture TNT du territoire et une perturbation certaine de la réception de celle-ci sont à craindre.
Par ailleurs, cette perte de réception aura inévitablement un impact sur les collectivités qui prennent à leur charge 310 sites TNT; une intervention certaine qui représentera assurément un coût dont on ne peut leur faire porter la responsabilité.
Enfin, l'extinction inéluctable des 7e et 8e multiplex entraînera une dépréciation des investissements consentis pour le déploiement des six nouvelles chaînes en haute définitiion (HD) lancées en 2012.
Les modalités du projet de réallocation étant incertaines, ces prévisions font craindre une réelle atteinte à la couverture du territoire et le mécontentement assuré des utilisateurs comme des élus locaux.
Il lui demande donc quelles mesures législatives et budgétaires le Gouvernement entend prendre pour faciliter cette opération dans un souci constant de préservation de l'offre audiovisuelle.
Le passage à la télévision tout numérique aura permis un enrichissement considérable de l'offre de télévision hertzienne terrestre (TNT), rendue accessible à plus de 97 % de la population française, et ce en maintenant un niveau de couverture locale meilleur ou équivalent à l'analogique. Une nouvelle transition technologique de la TNT, d'ampleur toutefois plus limitée que le passage au tout numérique, est prévue au cours de l'année 2016 : la norme de codage vidéo MPEG-4 aujourd'hui utilisée en outre-mer pour la diffusion de l'ensemble des services et en métropole pour la diffusion des services en haute définition (HD) sera généralisée. Ceci permettra, d'une part, de transférer la bande de fréquences 694-790 MHz, dite « bande 700 MHz », aux opérateurs de communications électroniques mobiles afin de répondre à la croissance des besoins en fréquences pour les services d'accès à l'Internet haut-débit en mobilité, tout en valorisant le patrimoine immatériel de l'État. D'autre part, cette transition permettra à l'ensemble des foyers métropolitains recevant la télévision via la TNT d'avoir accès, en sus des 19 autres chaînes gratuites, aux 6 nouvelles chaînes diffusées depuis le 12 décembre 2012, et à une qualité d'image enrichie sur un plus grand nombre de chaînes (seulement 10 chaînes gratuites sur 25 sont accessibles en HD aujourd'hui). Seuls devront être adaptés les téléviseurs non compatibles MPEG-4 qui reçoivent le signal par l'antenne râteau. L'achat d'un adaptateur externe, commercialisé à partir de 25-30 €, permettra de continuer à recevoir l'ensemble des services gratuits de la TNT. Selon les données de l'observatoire de l'équipement audiovisuel, le nombre de foyers qui ne possèdent aucun récepteur compatible avec le MPEG-4 et reçoivent la télévision uniquement via la voie hertzienne terrestre est en nette diminution depuis plusieurs années et concernait à la fin 2014 environ 6 % des foyers. Aussi, la loi n° 2015-1267 du 14 octobre 2015 relative au deuxième dividende numérique et à la poursuite de la modernisation de la télévision numérique terrestre prévoit un dispositif d'aide qui permettra aux foyers les plus démunis de s'équiper en récepteurs compatibles, à l'instar de l'aide à l'équipement mise en place pour le passage au tout numérique. Les personnes âgées ou en situation de handicap pourront en outre bénéficier d'une assistance technique à l'installation et au branchement de leur équipement. Enfin, une aide sera versée sans condition de ressources aux foyers perdant la réception de la TNT lors des opérations de réaménagements de fréquences, qui leur permettront d'adapter leur installation de réception pour continuer à recevoir gratuitement les services de télévision. Une large campagne nationale de communication a été lancée dès le mois de novembre 2015 afin de garantir l'information des téléspectateurs sur les différentes opérations et les dispositifs d'accompagnement. S'agissant des collectivités territoriales titulaires d'autorisations de rediffuser les signaux de la TNT au titre de l'article 30-3 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, seuls les ré-émetteurs pilotés par satellite devront être adaptés suite au passage au MPEG-4 des offres satellitaires gratuites de TNT SAT et FRANSAT dont ils reprennent le signal. Cette opération n'étant pas liée à l'arrêt du MPEG-2 sur la TNT décidée par le Gouvernement, sa prise en charge doit revenir à la collectivité au même titre que les opérations de maintenance ou les coûts d'exploitation de ces ré-émetteurs. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a fait récemment part de sa décision concernant les multiplex dont la diffusion sera arrêtée pour permettre la libération progressive de la bande 700 MHz : il s'agit des multiplex dits « R5 » et « R8 », qui diffusent, respectivement, les déclinaisons en haute définition des chaînes TF1, France 2 et M6, ainsi que les chaînes 6ter, RMC Découverte et Numéro 23 lancées fin 2012. Alerté par les opérateurs de diffusion du fait de l'arrêt anticipé des contrats qui les lient aux opérateurs des multiplex R5 et R8, le Gouvernement a confié à l'Inspection générale des finances la mission d'évaluer l'impact de cette opération sur les acteurs du marché de la diffusion. Des discussions bilatérales se sont engagées avec les opérateurs de diffusion dès la remise des conclusions de la mission, en vue d'une solution acceptable par l'ensemble des parties. Enfin, la généralisation du MPEG-4 sur la TNT n'aura pas d'impact sur la couverture du territoire. Les obligations faites aux éditeurs de services nationaux de télévision de couvrir au moins 95 % du territoire ont même été renforcées lors de la discussion au Sénat de la proposition de loi suscitée. Limitées précédemment aux services nationaux de télévision en clair diffusés en mode analogique, ces obligations de couverture s'étendent à présent, sous réserve de la disponibilité de la ressource radioélectrique, à l'ensemble des éditeurs de services nationaux sur la TNT.
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