Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, messieurs les secrétaires d'État, mes chers collègues, depuis quelques mois, Christine Pires Beaune, députée du Puy-de-Dôme, poursuit le travail qu'elle avait engagé avec Jean Germain, aujourd'hui décédé. Elle a déjà procédé à de nombreuses consultations pour définir, si possible avec les associations d'élus et les parlementaires, les principes communs d'une réforme de la DGF. Nous en avons discuté au sein tant du Comité des finances locales que de la commission des finances du Sénat.
Créée en 1979, la DGF constitue encore, avec 40 milliards d'euros en 2014 et 36,6 milliards d'euros en 2015, le principal concours budgétaire de l'État aux collectivités locales. Elle a connu bien des bouleversements au fil du temps, ses transformations jouant sur sa composition, sa fonction même et les objectifs poursuivis à travers son allocation.
Conçue dès l'origine pour remplacer des recettes fiscales supprimées par l'État, elle est un outil de prise en compte à la fois des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales et des manques à gagner dus aux transferts de compétences, mais aussi un outil de péréquation des ressources.
Pour Christine Pires Beaune, la DGF doit conserver ces caractères essentiels, et je partage cette vision. Mais comment envisager une réforme de la DGF au moment où les collectivités locales paient un lourd tribut – 12,5 milliards d'euros entre 2014 et 2017 – pour répondre au dogme du traité budgétaire européen, selon lequel la réduction de la dépense publique est l'instrument qui nous permettra de redresser la situation ?
Ma question est simple : peut-on, de manière responsable, concevoir une réforme de la DGF digne de ce nom, c'est-à-dire s'attaquant aux écarts injustifiés, et dont la réalité a été confirmée par la mission ? N'est-il pas temps de donner aux collectivités, quelle que soit leur taille, les moyens de leur action pour les services publics indispensables à leurs populations, ainsi que pour l'emploi et les investissements dont dépend la vie de nos territoires ?
M. André Vallini,secrétaire d'État. Madame la sénatrice, nous pensons que c'est précisément eu égard au contexte difficile que vous avez décrit que les inégalités inhérentes à la DGF doivent être corrigées.
Les écarts de dotation non justifiés par des écarts objectifs de richesse ou de charges ne sont plus acceptables. Des correctifs ont certes été apportés par le législateur, par exemple viala hausse de la péréquation, notamment cette année, mais comment obtenir une meilleure répartition des ressources en fonction de la richesse des collectivités quand près de la moitié de la dotation forfaitaire correspond à des parts figées, parfois depuis longtemps, à des compensations historiques qui n'ont plus de pertinence aujourd'hui ?
C'est dans cette optique qu'une première étape de la réforme de la DGF du bloc communal a été franchie dans le cadre de la loi de finances pour 2015. Elle a permis d'agréger les anciennes composantes de la dotation forfaitaire pour y intégrer la contribution au redressement des finances publiques. Cette première étape a également permis de rénover les modalités de financement de la péréquation, en faisant contribuer toutes les collectivités dont le potentiel fiscal est supérieur à 75 % de la moyenne, ce qui a introduit davantage d'équité, de justice et de solidarité.
Néanmoins, ce n'est pas suffisant. Il faut maintenant s'atteler à la recherche d'une meilleure répartition de la DGF, en revoyant ses critères d'allocation et ses objectifs, afin qu'elle soit plus lisible pour les élus locaux et plus juste, en prenant mieux en compte les collectivités les plus favorisées et celles qui le sont moins.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour la réplique.
Mme Marie-France Beaufils. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'État.
Vous le savez comme moi, la perte de ressources des collectivités territoriales vient d'avoir des conséquences très lourdes pour notre économie. L'Association des maires de France, l'AMF, a chiffré cette perte à 4,3 milliards d'euros ; c'est un montant très important. Je participe aux réflexions du groupe de travail, mais il me semble difficile, avec une diminution aussi importante de la masse globale, de donner aux collectivités territoriales des perspectives qui correspondent véritablement à ce qui est nécessaire sur le terrain.
Les modifications introduites en 2015 n'ont pas apporté de réponses aux questions soulevées tant par le Comité des finances locales que par les travaux de Christine Pires Beaune. Le niveau des charges supportées par les collectivités territoriales et l'aggravation du sort de leurs populations - je vous renvoie aux derniers chiffres du chômage - sont tels que, en face, les quelques modifications introduites cette année en matière de potentiel fiscal ne pèsent pas bien lourd. Je n'ai pas l'impression que les écarts constatés par le passé aient été modifiés de façon marquante. Quand certaines collectivités perdent plus de 20 % de leur DGF, même si elles sont éligibles à la dotation de solidarité urbaine- DSU -, leur situation devient très compliquée.
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