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Philippe Dallier
Question crible thématique N° 332 au Secrétariat d'État


La réforme de la dotation globale de fonctionnement

Question soumise le 12 juin 2015

M. Philippe Dallier. Chacun, à quelque groupe qu'il appartienne, est prêt à reconnaître qu'il est nécessaire de réformer la dotation globale de fonctionnement, aujourd'hui illisible et inefficace, ainsi que les mécanismes de péréquation, lesquels sont suffisamment étranges pour qu'une commune de Seine-Saint-Denis comme la mienne soit à la fois éligible à la DSU et contributrice au FPIC.

La question est de savoir si l'on peut mener cette réforme dans un contexte budgétaire singulièrement difficile pour les collectivités territoriales.

Je rappelle que les dotations aux collectivités territoriales vont baisser de 12,5 milliards d'euros. Messieurs les secrétaires d'État, croyez bien que c'est extrêmement difficile à supporter ! Du reste, nous en voyons les premières conséquences dans la chute de l'investissement des collectivités territoriales, qui réalisent 70 % de l'investissement public en France ; le secteur du bâtiment et des travaux publics est le premier à en pâtir. Certains vont jusqu'à prévoir une perte de croissance de 0,6 point du fait des baisses des dotations.

Oui, nous devons réaliser des économies et contribuer au redressement des comptes publics. Il s'agit de savoir à quel rythme nous pouvons le faire. Or je crois, messieurs les secrétaires d'État, que les décisions qui sont prises aujourd'hui vont plonger nombre de collectivités territoriales dans une situation budgétaire extrêmement délicate. Songez que, d'ici à deux ans, comme une étude du Sénat l'a démontré, les deux tiers des communes n'auront plus les moyens d'autofinancer leurs investissements et seront dans le « rouge » !

Que devrons-nous faire, alors ? Nous endetterons-nous, alors qu'il faut désendetter le pays ? Augmenterons-nous les impôts, alors qu'il faut réduire la pression fiscale ? Des économies, nous en rechercherons, mais nous n'en trouverons pas en proportion de la diminution des dotations.

Oui à la réforme de la DGF et des mécanismes de péréquation, car elle est nécessaire, mais nous avons besoin d'un moratoire sur les baisses des dotations aux communes, ou du moins d'un allongement de la période au cours de laquelle elles seront opérées. Messieurs les secrétaires d'État, y êtes-vous prêts ?
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-François Longeot applaudit également.)

Mme Françoise Laborde. Très bien !

Réponse émise le 12 juin 2015

M. Christian Eckert,secrétaire d'État. Je me réjouis, monsieur le sénateur, que, par deux fois, vous ayez dit : « oui à une réforme de la DGF ! » Venant d'un membre du groupe Les Républicains, je vois dans cette prise de position un point tout à fait positif, car il s'agit bien d'une de ces idées susceptibles de nous rassembler.

Pour le reste, vous avez plutôt mis l'accent sur ce qui nous divise.

Permettez-moi de faire un simple calcul de « coin de table ». Les 12,5 milliards d'euros de baisse des dotations aux collectivités territoriales que vous avez évoqués s'étalent sur une période de cinq ans : la première année a donné lieu à un moratoire ; la deuxième a vu une baisse de 1,5 milliard d'euros ; au cours des trois autres les dotations baisseront de 3,6 milliards d'euros. Par ailleurs, cette baisse représente environ 6 % des recettes réelles de fonctionnement de l'ensemble des collectivités territoriales, qui sont de l'ordre de 220 milliards d'euros. Une baisse de 6 % en cinq ans, dans le contexte que nous savons, ce n'est certes pas un effort négligeable ; il est même significatif ; mais je pense qu'il peut être géré.

Est-il opportun de le réaliser en ce moment ? Je pense que oui, car la situation actuelle est marquée par une forte hétérogénéité : certaines situations étant confortables et d'autres plutôt tendues, demander le même effort à tous reviendrait à infliger à certains une forme de double peine. Il faut donc rebondir sur cette difficulté collective pour mener à bien une réforme de la DGF ; mesdames, messieurs les sénateurs de l'opposition, le Gouvernement se réjouit que vous la souteniez, et il attend vos propositions.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour la réplique.

M. Philippe Dallier. La baisse des dotations appliquée aux collectivités territoriales porte bien sur quatre ans : elle s'est élevée à 1,5 milliard d'euros l'an dernier et atteindra 3,6 milliards d'euros par an entre 2015 et 2017.

M. Christian Eckert,secrétaire d'État. Vous oubliez que, pendant une année, elle a été nulle !

M. Philippe Dallier. Je vous l'accorde, monsieur le secrétaire d'État. Toujours est-il que la baisse se produit sur quatre ans.

Vous considérez qu'une baisse de 6 % étalée sur quatre ou cinq exercices, ce n'est finalement pas grand-chose. Seulement, pendant que nos recettes baissent, les dépenses, elles, ne baissent pas ! Nous pouvons certes ralentir leur hausse, mais il est extrêmement difficile de les réduire. Vous savez bien que les dépenses de personnel représentent 60 % du budget des communes, et que celles-ci ne maîtrisent ni l'augmentation du point d'indice, ni le glissement vieillesse technicité, ni les augmentations de charges que Gouvernement décide ou que le Parlement vote régulièrement. Sans compter que tout le reste augmente également : l'électricité, le gaz, les frais de télécommunications !

Les communes sont donc victimes d'un effet de ciseau, prises entre la baisse des recettes et la hausse continue des dépenses, fût-ce à un rythme ralenti. Le Sénat a démontré dans son étude qu'elles allaient se trouver dans une situation très difficile. Le Gouvernement doit en tenir compte, sinon, en définitive, ce sont les entreprises qui trinqueront. On nous annonce 30 000 chômeurs supplémentaires dans le bâtiment en 2015 ! Malheureusement, c'est ce que nous devrons constater à la fin de l'année !
(Applaudissementssur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur quelques travées de l'UDI-UC.)

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