M. Henri de Raincourt attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur l'injustice que fait peser le décret n° 2014-494 du 16 mai 2014 relatif au régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles.
En effet, si ce décret prévoit l'attribution de points gratuits de retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux, il n'en reste pas moins que les critères qu'il exige, à savoir, pour les retraités d'avant 1997, justifier de 32,5 années de carrière comme non salarié agricole, et, pour ceux retraités depuis 1997, justifier de 17,5 années de carrière comme non salarié agricole, sont de nature à exclure près de 80 000 conjoints et aides familiaux d'anciens exploitants agricoles.
Ce dispositif d'application leur paraît d'autant plus injuste que la loi prévoyait 557 000 bénéficiaires pour une enveloppe de 160 000 millions d'euros, ce qui n'est pas le cas dans les faits, puisque 477 000 personnes bénéficient de ce dispositif, pour un coût de 133 millions d'euros.
À l'heure actuelle, les réponses déjà apportées par le ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, ne sont pas de nature à rassurer les personnes concernées, puisque ni la question des droits de réversion, ni l'application réduite à un mois de cette mesure en 2014 ne peuvent justifier un tel écart.
Aussi, souhaiterait-il savoir ce qui justifie cette exclusion d'une partie des conjoints et aides familiaux d'anciens exploitants agricoles, car elle peut leur paraître arbitraire.
M. Henri de Raincourt. J'ai pu constater que l'attention du ministre de l'agriculture avait déjà été appelée par différents collègues sur l'incompréhension que suscite chez certains non-salariés agricoles le décret n°2014-494, portant application de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.
En effet, si ce décret prévoit fort opportunément l'attribution de points gratuits de retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux, il n'en reste pas moins que les critères qu'il exige - à savoir, pour les retraités d'avant 1997, justifier de 32,5 années de carrière comme non-salarié agricole et, pour ceux qui sont à la retraite depuis 1997, justifier de 17,5 années de carrière comme non-salarié agricole - sont de nature à exclure près de 80 000 conjoints et aides familiaux d'anciens exploitants agricoles.
Pour ces personnes, ce dispositif d'application paraît d'autant plus injuste que la loi prévoyait 557 000 bénéficiaires pour une enveloppe de 160 millions d'euros, mais que, dans les faits, on en compte 477 000, pour un coût de 133 millions d'euros. Le Gouvernement a expliqué que ce « décalage»résultait d'une application réduite du dispositif et qu'il fallait ne pas négliger la question des droits de réversion.
À ce sujet, j'ai étudié les arguments du ministre de l'agriculture. Sa réponse, d'ordre comptable, n'est pas, hélas ! de nature à satisfaire les principaux intéressés, raison pour laquelle ceux-ci n'ont de cesse de nous solliciter. On peut les comprendre quand sait ce qu'est aujourd'hui le niveau des retraites agricoles !
Pour dissiper définitivement le soupçon du caractère discrétionnaire de cette mesure, je souhaiterais connaître la raison qui justifie une telle exclusion d'une partie des conjoints et aides familiaux d'anciens exploitants agricoles et je voudrais savoir si le Gouvernement envisage d'autres dispositions, plus souples, pour répondre à leur situation.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Myriam El Khomri,secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la politique de la ville. Je vous prie tout d'abord, monsieur le sénateur, de bien vouloir excuser l'absence de M. Stéphane Le Foll.
Je rappelle qu'un plan ambitieux de revalorisation des retraites agricoles a été mis en œuvre dans le cadre de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites.
Cette réforme, conformément aux engagements pris par le Président de la République, est la plus ambitieuse en termes de revalorisation des petites retraites agricoles depuis la loi Peiro de 1998.
L'une des mesures mises en œuvre permet d'attribuer aux aides familiaux et aux conjoints d'exploitants- des femmes dans leur très grande majorité -des points gratuits de retraite complémentaire obligatoire au titre des années antérieures à l'obligation d'affiliation au régime.
Par souci de cohérence, les conditions d'accès au bénéfice de la mesure sont identiques à celles qui sont mises en œuvre depuis 2002 pour l'attribution de points gratuits aux chefs d'exploitation.
Ainsi, les personnes dont la retraite a pris effet avant 1997 doivent justifier d'une durée minimale d'assurance en tant que non-salarié agricole au moins égale à 32,5 années. Celles dont la retraite a pris effet à compter du 1erjanvier 1997 doivent justifier d'une durée minimale d'assurance en tant que non-salarié agricole égale à 17,5 années ainsi que d'une retraite à taux plein dans le régime des non-salariés agricoles.
Ces conditions d'accès à la mesure ont été présentées en toute transparence avant le débat parlementaire. En effet, c'est au mois d'août 2013, au cours d'une réunion présidée conjointement par Mme Marisol Touraine et M. Stéphane Le Foll et rassemblant l'ensemble des organisations professionnelles agricoles ainsi que les associations représentatives de retraités, qu'ont été exposées à la profession les conditions d'octroi des points gratuits de retraite complémentaire obligatoire, notamment celles qui sont relatives aux durées d'assurance nécessaires pour bénéficier de la mesure. Ces conditions ont d'ailleurs fait partie de l'étude d'impact du projet de loi.
Les décrets publiés au mois de mai 2014 sont conformes aux annonces et aux engagements pris et n'ont procédé à aucune restriction du champ d'application de cette mesure.
Le bilan provisoire qui a été réalisé au mois de juin 2014 ne prenait pas en compte les bénéficiaires des droits à réversion, ceux-ci n'ayant été versés, avec effet rétroactif, qu'à la fin de l'année 2014. De plus, en 2014, la mesure n'aura été appliquée que sur onze mois, ce qui minore son impact financier.
Enfin, il faut souligner que l'estimation des 557 000 bénéficiaires potentiels de la mesure correspondait à une simulation effectuée sur des effectifs de 2011. Or les effectifs de retraités subissent une érosion démographique naturelle, qui permet aussi d'expliquer le différentiel entre les effectifs estimés et les effectifs recensés.
M. le président. La parole est à M. Henri de Raincourt.
M. Henri de Raincourt. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. J'avoue que je n'attendais pas d'éléments franchement nouveaux sur ce sujet.
Je reconnais évidemment le côté positif de la mesure qui concerne les conjoints - qui sont bien souvent les épouses, comme vous l'avez rappelé - et les aides familiaux. Néanmoins, je souhaite que vous rappeliez au ministre de l'agriculture que, même si des efforts ont été accomplis, ce que nous reconnaissons, le niveau des retraites de ces personnes est véritablement une misère. Tout ce que la société pourra faire pour elles ne sera donc que justice.
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