M. Henri de Raincourt attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur la grave crise que traverse actuellement le secteur des travaux publics qui, depuis 2007, a perdu près de 22 500 emplois.
La baisse des dotations de l'État aux collectivités territoriales aggrave encore plus une situation déjà dramatique, puisqu'elle contraint les politiques d'investissement dans ce secteur : - 21 % d'ici à 2017 selon les estimations.
En conséquence, même si la nécessité de réduire les dépenses publiques de notre pays est claire, un secteur aussi important ne peut être laissé dans une situation critique, avec un manque à gagner de plusieurs milliards d'euros.
Dans la région de Bourgogne, près de 9 000 emplois directs et presque autant d'emplois indirects sont concernés par ce constat mais combien d'autres le sont au niveau national.
Alors qu'un taux de chômage record est subi, chaque secteur qui peut être source de création d'emploi doit pouvoir être protégé.
En conséquence, il souhaiterait savoir comment il entend pallier les baisses d'investissement des collectivités dans le domaine des travaux publics pour soutenir et encourager les entreprises dans ce secteur.
M. Henri de Raincourt.Monsieur le secrétaire d'État, je voudrais attirer l'attention du Gouvernement sur la situation des entreprises de travaux publics.
Élu local de longue date, vous connaissez les conséquences que la crise dans ce secteur peut entraîner à la fois sur l'emploi, à un moment où le chômage atteint déjà des sommets dans notre pays, avec toutes les difficultés induites, et sur le réseau routier. Je ne sais si l'ensemble des départements sont concernés, mais, dans l'Yonne, le réseau routier se dégrade, et de manière très rapide. Quand il faudra engager des crédits pour sa remise en état, je me demande combien cela coûtera, notamment pour le département dont je suis élu ; en tout cas, il est certain que la somme sera très importante.
Cependant, les budgets des collectivités locales étant ce qu'ils sont, les dotations de l'État étant ce qu'elles sont, les communes et les départements sont obligés de réduire leurs engagements en matière d'investissement, en particulier en ce qui concerne les routes.
Les entreprises de travaux publics nous alertent très régulièrement et de nombreux médias confirment leurs chiffres, très élevés. Ainsi, 22 500 emplois auraient déjà été supprimés en France et, plus particulièrement en Bourgogne, près de 9 000 emplois directs et indirects seraient concernés.
Monsieur le secrétaire d'État, je n'insiste pas davantage sur le constat, que vous connaissez. Je voudrais savoir si le Gouvernement, conscient de cette situation, envisage de prendre ou a déjà pris les mesures de nature à réduire les difficultés que nous connaissons, dans un secteur d'autant plus important pour l'économie locale et pour le développement économique et social du pays qu'il contribue à la création d'emplois et, ce faisant, irrigue l'ensemble du territoire.
Quelle est donc la politique du Gouvernement en la matière ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Vallini,secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Monsieur de Raincourt, le Gouvernement est évidemment très conscient de la situation que vous évoquez.
Cependant, je serai plus nuancé concernant l'état de notre réseau routier. Pour voyager en Europe, je peux faire des comparaisons : les routes de France ne sont pas en mauvais état. Nous avons toujours l'un des réseaux routiers les plus développés et les mieux entretenus, comme j'en ai eu encore confirmation jeudi et vendredi derniers, quand j'ai effectué un aller et retour entre l'Isère et la Lozère.
Monsieur le sénateur, les routes de notre pays sont très bien entretenues, même si nous devons, en effet, rester vigilants.
Le secteur des travaux publics, dont l'activité est dépendante de la commande publique, notamment locale - l'investissement public local représente 70 % de l'investissement public général - ne doit pas être pénalisé par la contribution nécessaire que nous demandons aux collectivités locales pour redresser les comptes publics de notre pays.
Le Gouvernement a donc veillé, d'une part, à ce que les collectivités locales contribuent en fonction de leur situation financière, mesurée par leurs recettes réelles de fonctionnement : grâce à la péréquation verticale et horizontale, on demande davantage d'efforts à celles qui sont plus favorisées et moins d'efforts à celles qui sont en difficulté.
Nous veillons, d'autre part, à ce que les collectivités locales conservent une capacité d'investissement.
Pour ce qui est des dotations, les crédits de la dotation d'équipement des territoires ruraux, la DETR, ont été augmentés de 30 % par la loi de finances pour 2015, passant ainsi de 600 à 800 millions d'euros, pour financer des projets communaux et intercommunaux, plus particulièrement en milieu rural.
Une aide spécifique pour encourager la construction de logements par les communes a également été créée. En zone tendue, les maires bâtisseurs bénéficieront ainsi, sous certaines conditions, d'une aide de 2 000 euros par permis de construire délivré.
Les prochains contrats de plan État-région, qui sont en train d'être signés, mobiliseront 12,5 milliards d'euros sur les six années à venir.
Le Gouvernement a également souhaité renforcer le Fonds de compensation pour la TVA, qui constitue une ressource majeure pour les investissements locaux. D'une part, le FCTVA ne fait pas partie de l'enveloppe normée des concours financiers de l'État et échappe ainsi à la baisse des dotations ; d'autre part, son taux forfaitaire progresse, passant de 15,76 % à 16,40 % en 2015, ce qui représente un effort considérable pour l'État, de 29 millions d'euros cette année et de 248 millions d'euros à partir de 2017.
En avril dernier, le Gouvernement a annoncé que la Caisse des dépôts et consignations pourrait proposer aux collectivités locales qui le souhaitent des prêts à taux zéro pour qu'elles bénéficient d'une avance sur les sommes versées par l'État en remboursement de la TVA qu'elles acquittent.
Afin de soutenir l'investissement local et, par là même, le BTP, une enveloppe de 20 milliards d'euros de prêts sur fonds d'épargne a été mise à disposition par la même Caisse des dépôts et consignations en faveur des collectivités locales. Cette enveloppe est principalement destinée à financer, pour les années 2013 à 2017, des projets structurants locaux dans les domaines de l'eau, des transports, de l'assainissement, de la construction, de la rénovation des bâtiments publics ou encore du logement social.
L'Agence France locale, qui a obtenu son agrément en décembre dernier, a clôturé sa première émission obligataire, en mars 2015, pour un montant total de 750 millions d'euros sur sept ans et son ambition est de prêter, à l'horizon de dix ans, 25 % des besoins du secteur public français, soit 4 milliards d'euros par an.
Enfin, monsieur de Raincourt, un groupe de travail entre l'État et l'AMF associant les représentants des autres associations du bloc communal, a été lancé en mars dernier. Ses travaux sont suivis de près par le Premier ministre et ses collaborateurs. Le cabinet de Mme Lebranchu et le mien travaillent beaucoup avec l'Association des maires de France et les autres associations d'élus pour établir un diagnostic partagé de l'évolution des finances des communes et des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre.
Après-demain, à l'issue d'une rencontre entre le Premier ministre et le président de l'AMF, des mesures concrètes seront annoncées pour soutenir l'investissement public local.
Je vous propose donc d'attendre jeudi, le Premier ministre annoncera alors sans doute des éléments intéressants.
M. le président. La parole est à M. Henri de Raincourt.
M. Henri de Raincourt. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État. Je connais, bien entendu, la plupart des dispositifs que vous avez rappelés à l'instant et leur efficacité, plus ou moins importante selon les situations.
Mais attendons donc jeudi et les résultats de la concertation.
Nous verrons, en termes de compétence, ce que cela donne, mais il ne faut jamais oublier d'associer soit les départements soit les régions, en fonction des travaux réalisés sur les routes par les différents niveaux de collectivité. En la matière, il faut travailler en pleine concertation et tenter de trouver des solutions, c'est utile à tout le monde.
Encore merci, monsieur le secrétaire d'État, de nous préciser, mais nous n'en doutions pas, l'attention extrême que l'État porte à l'évolution de la situation de ce secteur très important, singulièrement en milieu rural.
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