Mme Joëlle Garriaud-Maylam interroge Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur la volonté du Gouvernement de développer l'attractivité internationale des services de soins français.
Un an après la remise du rapport de Jean de Kervasdoué sur l'accueil des patients étrangers sur notre territoire, peu de mesures semblent avoir été mises en place pour améliorer notre attractivité.
L'accueil et le traitement de patients étrangers permettrait pourtant de créer 25 000 à 30 000 emplois, contribuerait au financement de notre recherche médicale et aurait des retombées positives sur l'hôtellerie, la restauration et les autres secteurs touristiques.
Pour structurer une filière de soins haut de gamme de réputation internationale, l'appui des pouvoirs publics est indispensable, de la simplification des démarches de visa à la création de partenariats entre structures hôtelières et hospitalières, en passant par l'élaboration de prestations « tout compris », la formation du personnel aux langues étrangères et la mise en place de structures susceptibles de donner une visibilité internationale aux filières d'excellence. La création d'un opérateur unique permettrait de rationaliser une offre actuellement dispersée.
Elle lui demande d'abord si le Gouvernement envisage la mise en œuvre d'une telle mesure et, si oui, selon quel calendrier.
L'expertise médicale française constitue un atout pour l'instant peu valorisé à l'international, alors que d'autres États – y compris parmi nos partenaires européens – ont, eux, investi dans ce domaine stratégique depuis quelques années et en tirent déjà les bénéfices. Dans un contexte de renforcement de la concurrence internationale, elle lui demande s'il juge opportun que la France se positionne.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Madame la secrétaire d'État, ma question porte sur l'attractivité internationale du système de santé français. Ce que l'on appelle le tourisme médical représente un marché considérable, estimé à 60 milliards d'euros sur le plan mondial, en croissance d'environ 20 % par an. Le nombre de patients qui se rendent à l'étranger pour recevoir des soins aurait doublé en cinq ans, passant de 7,5 millions en 2007 à 16 millions en 2012.
L'accueil de patients étrangers haut de gamme pourrait permettre de créer de 25 000 à 30 000 emplois, avec des retombées directes pour le secteur de la santé, de l'hôtellerie, de la restauration ou encore du BTP. Il contribuerait aussi au financement de notre recherche médicale. Il ne faut pas non plus sous-estimer les retombées en termes de stratégie d'influence, de diplomatie économique, de prestige international et de renforcement des partenariats internationaux dans le domaine médical.
Hélas, force est de constater que la France tarde à se positionner sur ce marché, alors même qu'elle dispose de filières d'excellence réputées au niveau mondial, avec un temps d'attente relativement court et un rapport qualité-prix compétitif. Quelques mois après la remise du rapport de Jean de Kervasdoué, peu de mesures semblent avoir été mises en place pour améliorer l'attractivité internationale de nos services hospitaliers.
Pour structurer une filière de soins haut de gamme de réputation internationale, l'appui des pouvoirs publics est indispensable. Cela passe par exemple par la création de partenariats entre structures hôtelières et structures hospitalières, avec l'élaboration de prestations « tout compris »,la formation du personnel aux langues étrangères et la mise en place de structures susceptibles de donner une visibilité internationale aux filières d'excellence, comme cela se fait en Suisse ou au Royaume-Uni.
La création d'un opérateur unique permettrait de rationaliser une offre actuellement dispersée et faciliterait une meilleure gestion de ces patients. Celle-ci est indispensable, comme le prouve la révélation, voilà quatre jours, de la dette de près de 120 millions d'euros accumulée par les caisses de sécurité sociale étrangères à l'égard de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Il faut tout de même prêter attention à ce que les nouvelles mesures ne viennent pas compliquer injustement l'accès aux soins des Français de l'étranger non affiliés à la sécurité sociale française, par exemple toutes les personnes employées en contrat local à l'étranger.
Madame la secrétaire d'État, quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour promouvoir l'attractivité de notre système de santé, qui est l'un des meilleurs au monde ? Quel sera le calendrier de mise en œuvre de ces mesures, à l'heure où de nombreux autres États se sont déjà positionnés sur ce marché stratégique ? Attendre revient à se fermer des portes !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Pascale Boistard,secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes. Madame la sénatrice Joëlle Garriaud-Maylam, le rapport définitif de M. de Kervasdoué a en effet été remis le 12 mars dernier à M. le ministre des affaires étrangères et à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Un groupe de travail a été mandaté par M. Laurent Fabius et Mme Marisol Touraine pour veiller à la concrétisation et à l'appropriation de la dynamique prévue dans ce rapport par la communauté hospitalière et médicale française. Ce groupe, auquel participent notamment la Fédération hospitalière de France, la Fédération de l'hospitalisation privée, la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne et la Fédération Unicancer, travaille actuellement à mieux valoriser l'excellence de l'offre de soins hospitalière française et à la faire connaître à l'international. Il rendra prochainement ses conclusions.
Le Gouvernement est décidé à créer un environnement favorable pour que les établissements de santé français valorisent leurs atouts en matière d'accueil de patients étrangers et se positionnent sur le plan international au titre de l'excellence médicale. En effet, des mesures sont prises pour améliorer les possibilités de formation en France de médecins étrangers, afin d'établir des liens durables avec certains pays et de favoriser ainsi l'orientation de la patientèle étrangère qui nécessite des soins hautement spécialisés vers les équipes médicales françaises.
Dans ce cadre, un amendement a été adopté lors de l'examen en première lecture à l'Assemblée nationale du projet de loi de modernisation de notre système de santé, qui vise à faciliter l'accueil des praticiens de pays extra-Schengen souhaitant accomplir un troisième cycle d'études médicales ou des formations post-doctorales en France.
Enfin, la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques adoptée le 10 juillet 2015 par le Parlement permettra aux centres hospitaliers universitaires de créer des filiales pour assurer des prestations de services et, ainsi, mieux valoriser leur expertise médicale à l'international.
M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, pour ces informations. Il me semble indispensable d'aller le plus vite possible dans le sens que vous évoquez.
Je veux rappeler que nous disposons de l'excellence. S'il faut, bien sûr, accueillir chez nous des médecins étrangers en vue de leur apporter une formation - c'est très important -, nous devons aussi offrir un service d'accueil. En Suisse et aux États-Unis, certains hôpitaux offrent un accueil quasiment « cinq étoiles » à des patients haut de gamme, avec des tarifs bien différents de ceux que nous, Français, payons.
Nous avons tous sur ces travées le souci des finances publiques. Il faut développer ce tourisme d'accueil médical haut de gamme, pour éviter que des personnalités ne se rendent dans d'autres pays au lieu de venir chez nous. Ce serait bon pour nos finances publiques, pour l'image de notre pays à l'étranger et pour le rayonnement de notre médecine, qui en est l'un des acteurs essentiels.
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