M. Jacques Chiron attire l'attention de Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique concernant les effets du décret n° 2006-1827 du 23 décembre 2006 qui a institué de nouvelles règles de classement d'échelon consécutif à la nomination, dans certains corps de catégorie A, des agents issus de la promotion interne (liste d'aptitude et examen professionnel).
Ce décret prévoit notamment le classement lors de la nomination et non plus, sauf cas particuliers, à l'issue de la formation d'un an. Par ailleurs, il introduit un dispositif de classement, pour les fonctionnaires issus de la catégorie B, en fonction de l'indice détenu dans le grade d'origine et non plus de l'ancienneté reconstituée. Enfin, il supprime le buttoir qui limitait le classement au 8ème échelon et prend désormais en compte l'ancienneté détenue dans le grade précédent.
Le décret incriminé définit de nouvelles règles de classement après titularisation, en lieu et place de celles du décret n°95-866 du 2 août 1995 alors même que les conditions pour concourir et les critères de sélection sont demeurés inchangés et que les promus sont placés dans la même position administrative suite à leur sélection tout au cours de l'année de formation.
Les nouvelles mesures sont nettement plus avantageuses pour les promus à compter du 1er janvier 2007, ce qui a répondu aux revendications exprimées depuis longtemps par les organisations syndicales de la fonction publique d'État.
Malheureusement, leur stricte application engendre de graves phénomènes d'enjambements d'échelon entre les lauréats des promotions d'avant 2006/2007 et suivantes, les lauréats des promotions antérieures (2000 à 2005) étant pénalisés, ce qui peut être interprété comme une atteinte au principe d'égalité de traitement des fonctionnaires recrutés du fait d'une discrimination entre des fonctionnaires appartenant à un même corps.
Le décret ne prévoit aucune mesure rétroactive ni de dispositif transitoire des agents promus antérieurement au décret qui se trouvent en situation d'inversion de carrière suite à l'application des nouvelles mesures de classement.
Le Médiateur de la République, saisi sur ce sujet, a reconnu, par courrier en date du 15/01/2009, cette iniquité. Il a proposé des pistes de travail, qui prendraient la forme de mesures transitoires qui « devront permettre le reclassement à l'échelon résultant de l'application des dispositions du décret n° 2006-1827 des fonctionnaires issus d'un corps ou d'un cadre d'emploi de catégorie B et nommés dans un corps de catégorie A au titre de la promotion interne, à la date de leur nomination ».
Les agents lésés par l'entrée en application des mesures nouvelles ne demandent pas la rétroactivité des mesures incriminées mais réclament un dispositif permettant de corriger les enjambements et les inversions de carrière intervenus du fait de l'application du décret par l'octroi, à partir de son entrée en vigueur le 1er janvier 2007, d'une majoration d'ancienneté qui les rétablirait dans leurs droits afin qu'ils ne soient plus devancés par les nouveaux promus.
Un tel dispositif a été mis en œuvre dans un passé très proche sans qu'il y ait eu un reclassement rétroactif au sens strict : le Gouvernement a aménagé un dispositif (décret n° 97-972 du 20 octobre 1997 et décisions ministérielles des 3 juillet et 29 septembre 1997) en faveur des ex-contrôleurs divisionnaires qui avaient subi des inversions de carrière du fait de l'application au 1er août 1995 du protocole « Durafour ».
Quelles mesures peuvent être envisagées pour répondre à cette rupture de l'égalité dans la progression des carrières de ces agents de l'État ?
Le Gouvernement a élaboré un projet de décret visant à corriger les enjambements de carrière subis par certains fonctionnaires de catégorie B, promus en catégorie A avant l'entrée en vigueur des dispositions de reclassement prévues par le décret n° 2006-1827 du 23 décembre 2006 relatif aux règles du classement d'échelon consécutif à la nomination dans certains corps de catégorie A de la fonction publique de l'État. Toutefois, ce projet de décret relatif à certains personnels de catégorie A relevant des ministres chargés de l'économie et du budget n'a pas reçu l'avis favorable du Conseil d'État lorsque celui-ci l'a examiné en août dernier. La Haute assemblée a certes considéré que l'objet du texte, qui consistait à faire bénéficier des dispositions de reclassement, plus favorables, prévues par l'article 5 du décret du 23 décembre 2006, certains fonctionnaires de catégorie B ayant été nommés dans des corps de catégorie A avant l'entrée en vigueur, au 1er janvier 2007, de cet article, n'était pas illégal, dès lors que le reclassement, intervenant à la demande des intéressés, n'avait d'effet que pour l'avenir. Le Conseil d'État a en revanche écarté, comme étant susceptible de porter atteinte au principe d'égalité de traitement entre membres d'un même corps, le dispositif, figurant dans le projet, consistant à prolonger fictivement la carrière des agents concernés dans le corps de catégorie B jusqu'à la date du 1er janvier 2007, date d'entrée en vigueur du décret du 23 décembre 2006, et à réserver le bénéfice d'un nouveau reclassement aux seuls fonctionnaires dont la situation, à la date de leur demande de reclassement, était moins favorable que celle résultant de la carrière fictivement reconstituée. Dans ces conditions, il n'a pas pu être donné de suite au projet de décret relatif à certains personnels de catégorie A relevant des ministres chargés de l'économie et du budget. Ces derniers examinent les modalités selon lesquelles les enjambements de carrière constatés, qui ne constituent pas sur le plan juridique des inversions de carrière, pourraient être corrigés.
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