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Rachel Mazuir
Question d'actualité au gouvernement N° 815 au Ministère du travail


Carte d'identification professionnelle des salariés du BTP

Question soumise le 1er avril 2016

M. Rachel Mazuir. Ma question s'adresse à Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Madame la ministre, vous avez signé, le 23 février dernier, avec les représentants des organisations professionnelles du secteur du bâtiment et des travaux publics, la convention nationale de lutte contre le travail illégal et les fraudes au détachement.

S'agissant de la lutte contre le dumping social – résultant, pour l'essentiel, du recours non déclaré à des travailleurs détachés –, des mesures ont été prises.

J'en citerai trois : obligation de déclaration à la caisse « intempéries BTP » de l'Union des caisses de France, renforcement des contrôles par les agents de l'État, mise en place d'une carte professionnelle des travailleurs du BTP.

Cette dernière disposition, particulièrement attendue, est soumise à l'aval de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, la CNIL, cette carte professionnelle devant contenir des informations particulières et personnelles.

Dans quel délai, madame la ministre, pensez-vous pouvoir signer l'arrêté qui permettra, enfin, la mise en œuvre de cette carte professionnelle ?

En parallèle, à la demande de la France et de l'Allemagne, la Commission européenne a décidé, le 8 mars dernier, de renforcer certaines dispositions de sa directive de 1996 relative aux travailleurs détachés sur deux points particuliers : la rémunération des travailleurs détachés devra être alignée, si elle est lui inférieure, sur celle des travailleurs du pays où se situent les chantiers et la durée maximale de recours à ces travailleurs détachés ne devra pas excéder vingt-quatre mois. C'est un progrès. En revanche, rien n'est prévu en matière de charges sociales dues, qui restent celles du pays d'origine.

Madame la ministre, peut-on espérer voir les choses évoluer favorablement sur ce dernier point, les Allemands étant, comme nous, demandeurs en la matière ?
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Hermeline Malherbe applaudit également.)

Réponse émise le 1er avril 2016

Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Vous l'avez dit, monsieur le sénateur, la France possède le système législatif le plus répressif, le plus strict d'Europe en matière de lutte contre les fraudes au détachement de travailleurs.

Il s'agit pour nous de lutter non pas contre le recours aux travailleurs détachés - la France est le troisième pays d'origine des travailleurs détachés dans l'espace européen -, mais contre les fraudes et les abus en la matière, qui tendent à éroder notre modèle social et relèvent des pratiques de concurrence déloyale. Il y va aussi de la dignité des travailleurs dans l'espace européen.

À la suite de l'adoption, l'été dernier, de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, j'ai pris, le 22 février, un décret relatif à la carte d'identification dans le BTP, en accord avec la Fédération française du bâtiment et la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment, la CAPEB. C'est en effet dans ce secteur du BTP et dans celui de l'agriculture que sévit le plus cette forme de concurrence déloyale.

M. Marc Daunis. C'est vrai !

Mme Myriam El Khomri, ministre. La mise en œuvre de cette carte est très importante. Elle permettra, par un système de flash code, d'avoir accès à toutes les données sur la personne et l'entreprise. Tout travailleur intervenant sur un chantier de BTP devra en être muni. Les contrôles des inspecteurs du travail en seront grandement facilités.

Effectivement, cette carte est actuellement soumise à l'avis de la CNIL. Nous souhaitons que, d'ici à la fin du premier semestre de 2016, toute personne travaillant sur un chantier puisse en être munie.

M. Marc Daunis. Très bien !

Mme Myriam El Khomri, ministre. Parallèlement, j'ai renforcé les contrôles : leur nombre est passé de 600 par mois l'été dernier à 1 600 par mois aujourd'hui.

Nous mettons également en œuvre l'arrêt et la suspension de prestation de services, comme en Corse récemment. La loi sur le travail prévoira aussi la possibilité de suspendre une prestation de services internationale en l'absence de déclaration de détachement.

Enfin, le combat se mène au niveau européen. La Commission européenne a présenté, le 8 mars dernier, un projet de révision ciblée de la directive de 1996.

M. le président. Il faut conclure !

Mme Myriam El Khomri, ministre. Cela va dans le bon sens, certes, mais pas suffisamment loin. Nous souhaitons interdire le détachement en cascade de travailleurs intérimaires et les entreprises boîtes aux lettres.

Telle est la position française ; mesdames, messieurs les sénateurs, vous pouvez compter sur notre détermination !
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur certaines travées du RDSE.)

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