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Cécile Cukierman
Question d'actualité au gouvernement N° 819 au Ministère de la justice


Moyens accordés à la justice

Question soumise le 6 avril 2016

Mme Cécile Cukierman. Monsieur le garde des sceaux, il semblerait que vous ayez découvert soudainement l'état calamiteux de la justice de notre pays. Après avoir été quatre ans président de la commission des lois à l'Assemblée nationale, il n'est jamais trop tard… (Rires et applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur quelques travées de l'UDI-UC.) Rappelons qu'à l'époque vous votiez sans sourciller les maigres budgets alloués à la justice.

À ce sujet, je tiens à saluer l'initiative du Syndicat de la magistrature et du Syndicat des avocats de France, qui mettent en scène des « tribunaux d'opinion » où le prévenu, l'État, est poursuivi pour « mise en danger de la justice » et « non-assistance à justice en danger ». Il y a effectivement urgence à lui donner les moyens de se redresser : il y va de la remise à flot du service public de la justice et de l'accès à un procès équitable pour tous. Mais, des moyens, pour quoi faire ? Du tout-carcéral ? Certainement pas pour nous, comme nous venons de le dénoncer lors du vote précédent.

Mon interpellation porte plus précisément sur la situation des personnels d'insertion et de probation fortement mobilisés depuis plusieurs semaines. Vous avez enfin reçu hier l'intersyndicale. Vous vous félicitez d'avoir déjà pu avancer sur certains points comme celui du dispositif de la « pré-affectation ». Pourtant, l'heure n'est pas aux félicitations. Il faut aujourd'hui des mesures urgentes pour mettre fin à l'indigence des ressources humaines qui paralyse l'action même de ces agents favorables à une politique pénale progressiste et humaniste, les seuls agents de la pénitentiaire exclus de toute revalorisation. Le plan triennal d'ouverture des postes doit se prolonger, pour assurer la réinsertion en milieu ouvert comme fermé, garantie indispensable contre la récidive.

Monsieur le garde des sceaux, ma question porte sur la situation de ces personnels mobilisés. Comme tous les agents de la pénitentiaire, ils n'ont pas le droit de grève et expriment leur colère et leur revendication par d'autres biais : des « jeudis morts » du SPIP à une grande manifestation nationale le 10 mai prochain. Or certains reçoivent aujourd'hui des menaces de leur administration, sur leurs évolutions de carrière ou leur salaire. Que comptez-vous faire pour leur garantir, comme à tout citoyen, la possibilité de s'exprimer librement ?
(Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Réponse émise le 6 avril 2016

M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question, qui me permet de dire toute ma considération pour les personnels d'insertion et de probation. Sachez que je ne les ai pas « enfin » reçus ; je les ai reçus hier comme nous en étions convenus avec les trois organisations composant l'intersyndicale. Je les reverrai d'ailleurs dans huit jours, parce que je veux avancer avec eux sur un diagnostic partagé.

Vous l'avez évoqué, 1 000 créations de postes ont été décidées pour la période 2014-2017, dont 640 conseillers d'insertion et de probation. Il existe un désaccord entre l'administration et les syndicats sur l'état des lieux - j'ai besoin que l'administration confirme les chiffres qu'elle m'a donnés -, mais les engagements pris par Christiane Taubira concernant les créations de postes, y compris les 70 directeurs d'insertion et de probation, seront tenus.

Je ne découvre pas la situation ; je l'ai d'ailleurs dit au Sénat dès mes premières réponses aux questions d'actualité. J'ai simplement souhaité donner l'alerte sur la gravité de la situation.

Le budget de la justice, qui est le huitième de l'État en importance, s'élève à 8 milliards d'euros. Cela montre l'effort considérable qui a été fait depuis 2012. J'imagine que, lors de chaque discussion budgétaire, vous avez apprécié les progressions enregistrées, notamment en termes de postes - si nous pouvons créer 1 000 postes, c'est justement grâce aux efforts qui ont été réalisés. Reste que nous sommes dans une situation d'urgence. Je l'ai dit pour que nous puissions, là aussi, partager ce diagnostic et pour que nous puissions, ensemble, dans la logique et la solidarité de la trajectoire budgétaire du Gouvernement, décider des mesures utiles à une bonne administration de la justice, à laquelle font appel chaque année 4 millions de Français. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

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