Mme Caroline Cayeux. Monsieur le ministre de l'intérieur, notre pays traverse une période très difficile liée aux intempéries, aux attentats, aux grèves à répétition. Les Français subissent de plein fouet une crise économique et morale. Cette situation exige solidarité, mais aussi efficacité. La solidarité s'exprime chaque jour dans nos départements et dans nos communes et nous attendons des actes du Gouvernement.
Quelle image de la France donnons-nous aujourd'hui au monde ? Le monde en effet nous observe, et ce regard m'attriste profondément.
Comment une minorité peut-elle entraîner un pays entier dans le discrédit et le déshonneur ? En ce moment même, nous avons encore des casseurs dans la rue, et croyez bien que je m'associe aux propos du président Retailleau pour soutenir les forces de l'ordre et saluer leur engagement.
Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, la France perd de son attractivité. Le nombre de projets d'investissements étrangers a reculé en 2015, alors que, dans l'ensemble de l'Europe, il a progressé de 14 %. Seuls 11 projets de décisions ont été présentés en France, contre 150 en Grande-Bretagne. Le tourisme chute également de plus de 30 %. Même les agents de la tour Eiffel se mettent en grève !
Dans ces conditions, comment comptez-vous défendre notre candidature aux jeux Olympiques et à l'Exposition universelle ?
Monsieur le ministre, comment allez-vous passer aux actes qu'attend la représentation nationale ?
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Manuel Valls, Premier ministre. Madame la sénatrice, toute question est légitime, surtout dans cette enceinte, mais je regrette ce mélange des sujets. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Prenons-en un seul, celui du tourisme. Si le tourisme, comme on peut en effet le constater, a baissé au cours de ces derniers mois - c'est d'ailleurs l'une des rares activités économiques qui n'est pas en phase de reprise -, notamment à Paris et au mont Saint-Michel, où je me suis rendu voilà quelques mois avec M. Philippe Bas, c'est lié, et vous le savez parfaitement, aux attentats, à ce qui s'est passé au mois de novembre dernier.
Les chiffres du tourisme doivent être analysés en considération de ces événements. Croyez-moi, c'est pour nous un véritable sujet. Les Japonais ont ainsi décidé du jour au lendemain de ne plus venir en France. Voilà pour ce qui concerne le tourisme.
Par ailleurs, je regarde les chiffres avec le plus de lucidité possible. Je constate, madame la sénatrice, que la croissance a été plus importante au premier trimestre que ce qui avait été annoncé, que les prévisions de croissance pour cette année 2016 se confirment - autour de 1,5 %, peut-être davantage -, que l'investissement revient, que le moral des ménages, malgré la situation que nous connaissons depuis plusieurs mois, est à la hausse, notamment par rapport à l'emploi. Même si nous sommes et modestes et prudents, je note que l'on a enregistré une baisse du nombre des chômeurs de l'ordre de 70 000.
Madame la sénatrice, j'entends toutes les critiques - c'est le rôle de l'opposition -, mais je constate que, malgré toutes les difficultés, malgré tous les défis, les choses vont plutôt dans le bon sens.
M. Alain Gournac. Bref, « ça va mieux » !
(Sourires sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
M. Manuel Valls, Premier ministre. Vous évoquez la candidature de Paris aux jeux Olympiques de 2024 : nous pouvons partager cette volonté de voir cette candidature aboutir, et je vous rappelle que la France a été capable, quelques jours après les attentats terroristes, d'accueillir plus de 180 chefs d'État et de gouvernement étrangers lors de la COP 21.
Dans les conditions que nous connaissons aujourd'hui, en particulier en plein état d'urgence, et avec les difficultés malheureusement inhérentes à une telle compétition sportive, nous avons pu organiser l'Euro de football, qui n'est pas encore terminé, même si je déplore profondément les difficultés auxquelles sont confrontés les Français. Je le sais d'autant plus que, pour ne citer que cet exemple, en Île-de-France, c'est la ligne D du RER qui est la plus touchée par ces grèves incompréhensibles et inadmissibles.
Mme Éliane Assassi. C'est une obsession !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Les taux de grévistes dans les transports, aujourd'hui et demain - nous avons constaté la même chose dans le secteur aérien, chez Air France -, sont extrêmement faibles.
Il faut faire front face à ces événements. Nous tenons bon et nous ne changerons pas - nous l'avons déjà dit - les principaux articles de ce projet de loi, notamment son article 2, parce qu'il est bon pour les entrepreneurs et pour les entreprises.
Mme Éliane Assassi. Pas pour les salariés !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Mon rôle à moi, j'en suis désolé, madame la sénatrice, c'est de défendre la France, son attractivité, de faire en sorte qu'elle gagne des marchés à l'extérieur. C'est cela que je veux retenir. Pour ma part, que je sois dans l'opposition ou dans la majorité, je dis toujours du bien de la France.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme Caroline Cayeux, pour la réplique.
Mme Caroline Cayeux. Monsieur le Premier ministre, j'entends votre réponse, mais je ne partage ni votre optimisme ni votre confiance.
(Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Daniel Raoul. C'est dommage !
Mme Caroline Cayeux. Je crains, malheureusement, que la France ne doive dire adieu aux jeux Olympiques, adieu à l'Exposition universelle, adieu aux touristes américains et asiatiques, adieu à la relocalisation et à l'installation d'entreprises, adieu à l'emploi !
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. David Assouline. Ces propos sont scandaleux !
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