M. Alain Joyandet. Monsieur le Premier ministre, j'ai bien entendu vos réponses. Il n'en est pas moins vrai que la quatorzième manifestation est actuellement en train de tourner autour du bassin de l'Arsenal contre la loi Travail.
Depuis le mois de février, vous essayez de convaincre votre majorité, vous n'y parvenez pas. C'est normal, puisque François Hollande n'avait jamais annoncé cette réforme du code du travail et ceux qui ont voté pour lui, comme la CGT, se sentent aujourd'hui trompés, pour ne pas dire plus.
En tout cas, beaucoup parmi tous ces gens sont désarçonnés. On le voit même ici, sur les travées de la gauche, au Sénat.
En plus, vous fuyez le débat à l'Assemblée nationale, en recourant à l'article 49.3. Quand il n'y a plus de débat, c'est la rue qui prend le relais. Il a vraiment fallu un revirement de dernière minute pour que la manifestation d'aujourd'hui ne soit pas annulée.
Je vous ai entendu réaffirmer votre détermination ; vous êtes droit dans vos bottes, mais on ne peut pas laisser le pays dans cette situation.
Nous vivons une escalade, il faut bien le reconnaître ; on prend des risques, cela a été dit. Je ne reviens pas sur les différentes questions qui ont été posées. Mais, dans ce contexte, j'imagine que vous avez un plan pour sortir la France de cette situation…
M. André Reichardt. Un plan B !
M. Didier Guillaume. Il est sûrement meilleur que le vôtre !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le sénateur, j'ai un peu de mémoire. J'étais ministre de l'intérieur quand ont eu lieu de nombreuses manifestations contre le texte instaurant le mariage pour tous, avec des violences en marge de ces manifestations (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.),...
M. François Grosdidier. C'est la paille et la poutre !
M. Manuel Valls, Premier ministre. ... y compris à l'égard des forces de l'ordre, avec des groupes, comme je l'ai rappelé tout à l'heure, identifiés à l'extrême droite, particulièrement dangereux.
M. Francis Delattre. L'extrême gauche, elle n'est pas dangereuse ?
M. François Grosdidier. Il n'y avait pas d'état d'urgence !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Chacun souhaitait alors que ces manifestations puissent avoir lieu et que le texte de loi, en même temps, fasse l'objet d'une discussion approfondie à l'Assemblée nationale et au Sénat. C'est ainsi que les choses se passaient.
Pour répondre précisément à votre question, il n'y a pas de plan,...
M. François Grosdidier. On s'en rend compte !
M. Manuel Valls, Premier ministre. ... sauf d'assurer l'ordre public, dans des conditions toujours difficiles, évidemment. On ne peut pas, d'un côté, rendre hommage à la police et à la gendarmerie et, de l'autre, mettre en cause la manière dont on assure l'ordre public. Ce sont les mêmes hommes, policiers et gendarmes, qui assurent l'ordre public sur le terrain.
M. François Grosdidier. Ils ne peuvent pas tout faire !
M. Manuel Valls, Premier ministre. L'ordre public, monsieur le sénateur, ça commence aussi par un minimum de respect pour les orateurs !
M. Didier Guillaume. Il en est incapable !
(Sourires.)
M. Manuel Valls, Premier ministre. Je connais bien M. Grosdidier, il avait le même comportement à l'Assemblée nationale et j'ai plaisir à le retrouver au Sénat !
(Nouveaux sourires.)
S'agissant du projet de loi, son examen ira à son terme, monsieur le sénateur, et chacun doit prendre ses responsabilités. Dans une démocratie, il y a de la place pour le débat, la manifestation et la contestation, dans le respect de chacun. Mais le respect consiste aussi à permettre au texte d'être adopté au terme du processus parlementaire.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet, pour la réplique.
M. Alain Joyandet. Je retiens que vous n'avez pas de plan. Vous aviez annoncé le mariage pour tous, mais pas la loi Travail. Vous vouliez vous attaquer à la finance ; vous avez déstabilisé le monde du travail : les salariés du privé, du public, les professions libérales, tout le monde !
Monsieur le Premier ministre, aujourd'hui, en France, quand on est un travailleur, qu'on bosse, qu'on paye ses impôts loyalement, qu'on est un citoyen « normal », les fins de mois sont très difficiles ! On se fait du souci pour sa famille, pour ses enfants et on se demande où vous emmenez la France. Il n'y a plus que les Bleus et l'Euro de football pour redorer le blason bleu-blanc-rouge ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
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