Mme Joëlle Garriaud-Maylam. En 2012, le Président de la République nous annonçait que son quinquennat serait centré sur la jeunesse. Quatre ans plus tard, qu'en est-il ?
Notre jeunesse, en plein désarroi, cherche de plus en plus à s'expatrier faute de trouver, en France, des raisons d'espérer. Nos jeunes ne croient plus pouvoir mener, dans notre pays, de carrière à la hauteur de leurs ambitions.
Mme Nicole Bricq. C'est faux !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Plus de 200 000 Français partent chaque année, soit l'équivalent de la population de Bordeaux !
M. Jean-Louis Carrère. C'est donc la faute de Juppé !
(Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Et 80 % d'entre eux ont entre 15 et 29 ans.
Certes, il y a une génération Erasmus, enthousiaste à l'idée de découvrir le monde. Mais beaucoup de ces jeunes ne veulent plus revenir, ayant perdu confiance dans notre capacité à leur offrir des chances de carrière.
(Mme Nicole Bricq s'exclame.)
Il est de notre devoir de leur redonner le goût de la France, notamment au travers de nos ambassades et de nos conseillers consulaires, pour que cette expatriation souvent subie devienne un vecteur de rayonnement économique et culturel.
À l'inverse, on trouve une jeunesse faussement intégrée, par le biais de dispositifs d'emplois aidés dont la plupart ne débouchent sur rien. La Cour des comptes souligne que les efforts publics en faveur de l'emploi des jeunes ont un coût supérieur à 10,5 milliards d'euros, pour des résultats très décevants.
L'accès des jeunes à l'emploi se détériore sur les plans tant quantitatif que qualitatif. Seuls 37 % des jeunes de 15 à 24 ans ont une activité, contre 67,5 % au Royaume-Uni. Voilà un constat accablant !
M. le président. Veuillez poser votre question, ma chère collègue.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Quand allez-vous prendre conscience que vos politiques économiques et financières, que votre conception de la formation uniformisée et votre rejet du mérite et de la valeur travail, non seulement étranglent le pays, mais démoralisent une jeunesse qui voit dans un départ à l'étranger la seule solution possible ?
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports. Madame la sénatrice, je m'inscris en faux contre le paysage catastrophique que vous venez de dessiner pour évoquer la jeunesse de notre pays.
Je veux vous rappeler la couleur de la page que nous avons trouvée en 2012…
Mme Colette Mélot. Encore cet argument !
M. Patrick Kanner, ministre. … s'agissant des politiques menées en faveur de la jeunesse : elle était quasi blanche, avec à peine 12 000 services civiques et moins de 10 000 RSA en faveur des jeunes actifs.
Madame la sénatrice, faites preuve d'un peu d'humilité ! Pour ma part, je suis très fier du bilan qui est celui du Gouvernement. Je tiens à vous rappeler les actions que nous avons conduites. Elles impliquent l'ensemble de mes collègues ici présents, ainsi que ceux qui nous écoutent sûrement.
Je suis fier que tous les jeunes de moins de 30 ans puissent, dès cette année, bénéficier d'un cautionnement pour accéder au logement ; je suis fier que les bourses aient été augmentées et qu'un échelon ait été créé pour les classes moyennes, sans oublier la hausse de 40 % des crédits du programme Erasmus ; je suis fier d'avoir étendu la prime d'activité, qui fonctionne sur vos territoires, à 500 000 jeunes, en supprimant le RSA jeunes ; je suis fier que le nombre de « décrocheurs » ait enregistré, grâce au rétablissement des moyens accordés à l'éducation nationale, une baisse de 30 000 personnes ; je suis fier d'avoir amélioré la couverture santé des jeunes ; je suis fier de porter le service civique à 350 000 jeunes d'ici à une demi-génération ; je suis fier d'avoir créé la grande école du numérique pour 10 000 jeunes en grande difficulté.
Madame la sénatrice, même si je peux entendre les critiques de la Cour des comptes, je suis fier que 300 000 jeunes, dont 80 % n'avaient pas le baccalauréat, aient bénéficié d'un emploi d'avenir. C'est aussi cela, notre bilan !
(Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Claude Carle. Des emplois d'avenir financés par qui ?
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Vous vous voilez la face !
M. Patrick Kanner, ministre. Madame Garriaud-Maylam, je ne me voile pas la face ; je connais les difficultés. Je sais aussi que, dans cet hémicycle, je défends des valeurs, notamment par le biais du projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté.
Or la seule proposition que vous avez votée en faveur de la jeunesse vise à la création d'un emploi d'appoint pour les jeunes, un sous-salariat de quinze heures par semaine, payé au SMIC, qu'il sera impossible de prolonger au-delà de 26 ans. Tel est votre bilan.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. N'importe quoi !
M. Patrick Kanner, ministre. Nous n'avons pas les mêmes valeurs s'agissant de la jeunesse française.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Ça, c'est sûr !
M. Patrick Kanner, ministre. Je serai là, avec d'autres, pour éviter que vous n'appliquiez des mesures aussi rétrogrades pour le pays et notre jeunesse.
(Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Jean-Louis Carrère. C'est l'arroseur arrosé !
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