M. Bernard Fournier. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Monsieur le ministre, la violence ne cesse de croître dans notre pays. Ce sont tous les symboles de la République qui sont visés : l'autorité, le savoir, le service public.
La semaine dernière, c'était la police, avec le drame de Viry-Châtillon – police que l'on attaque désormais à coup de cocktails Molotov.
Lundi, incidents à Tremblay-en-France, mercredi, à Vénissieux et samedi soir, au Val-Fourré, où une centaine d'assaillants s'en sont pris aux forces de l'ordre après avoir tenté de détruire la mairie annexe.
M. Jean-Louis Carrère. Il faut vous faire soigner !
M. Bernard Fournier. La semaine précédente, c'était le corps enseignant, dont six membres ont été agressés, frappés au visage, parfois roués de coups à Argenteuil, Strasbourg, Saint-Denis, Colomiers et Calais, où un élève a fracturé la mâchoire d'un professeur.
Cette même semaine, deux médecins et un interne ont été agressés à l'hôpital de Tourcoing.
Le week-end précédent, un bus était incendié à La Courneuve.
M. Jean-Louis Carrère. Appelez les psychanalystes !
M. Bernard Fournier. À Saint-Étienne, dans mon département, plusieurs centaines d'individus cagoulés ont défilé violemment, malgré l'interdiction de la préfecture, critiquant de façon infamante et injurieuse les forces de l'ordre. Cassant, taguant, ils ont fini par saccager la permanence du parti socialiste…
(Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Fouché. Quel crime !
M. Jean-Louis Carrère. Quelle sollicitude !
M. Bernard Fournier. Tout ce qui représente l'autorité et le savoir est bafoué par une délinquance qui s'affirme désormais sans aucun complexe.
La réponse pénale n'est pas à la hauteur de la situation, l'impunité prédomine, les délinquants font la loi là où la République recule.
Avez-vous conscience de la gravité de la situation et de la vitesse à laquelle les choses se dégradent ? Allez-vous enfin, monsieur le ministre, renoncer à cette politique du déni de réalité ?
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, je prolonge la réponse que j'ai adressée à Roger Karoutchi. Je comprends bien la raison pour laquelle ces questions sont posées. Je pourrais toutefois me livrer au même exercice et évoquer les violences extrêmes qui sont intervenues à Strasbourg, en 2009, au moment du sommet de l'OTAN, lorsqu'un hôtel Ibis et un bâtiment des douanes ont été brûlés (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.), ou encore les violences urbaines, qui ont diminué de 40 % depuis quatre ans. Mais je ne le ferai pas, car ce ne serait pas responsable.
Je vois bien l'idée qui sous-tend l'ensemble de vos questions : lorsque vous êtes en situation de responsabilité, la fermeté de l'État est là ; lorsque d'autres le sont, elle ne l'est pas ! Ce positionnement, absolument irresponsable, a pour seul résultat de donner le sentiment à tous les populistes qu'ils ont raison lorsqu'ils contestent l'État dans sa volonté de respecter et de faire respecter le droit. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.) Je ne souhaite pas, monsieur le sénateur, que les populistes aient une audience grandissante dans ce pays. Jamais il ne me viendrait à l'idée de mettre en cause ceux qui ont gouverné le pays auparavant en laissant sous-entendre qu'ils ont fait preuve de laxisme face à la violence ! (Marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains.) Si je le faisais, j'oublierais l'essentiel, les principes du droit républicain et la nécessité de nous rassembler autour d'eux lorsque le principal est en jeu.
M. Didier Guillaume. Très bien !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je regrette franchement que vous ne soyez pas capable de tenir cette position, parce que vous vous livrez à un exercice de surenchère et d'abaissement politique qui s'appelle les primaires. Voilà la réalité !
(Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC, du groupe écologiste et du RDSE.)
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je veux en conclusion rendre hommage aux préfets, aux policiers, à tous ceux qui travaillent, notamment à ceux qui, pendant les manifestations violentes contre la loi Travail, ont procédé à 2 000 interpellations et 1 000 gardes à vue pour que le droit s'applique ! (Applaudissements sur les mêmes travées.)
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.