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Michelle Demessine
Question d'actualité au gouvernement N° 1071 au Secrétariat d'État


Travailleurs détachés

Question soumise le 16 décembre 2016

Mme Michelle Demessine. Ma question s'adresse à Mme El Khomri, ministre du travail.

Celle-ci est, avec sept autres ministres européens du travail, signataire d'une tribune appelant à ce que les travailleurs détachés puissent bénéficier d'une rémunération équivalant à celle des travailleurs du pays d'accueil. Dont acte !

Il aura fallu la vague populiste et la perspective des prochaines échéances électorales pour voir cette détermination affichée clairement et publiquement.

Il eût peut-être mieux valu, en 2005, écouter les Français, qui, en refusant le traité constitutionnel, faisaient passer un message fort, celui de leur refus d'une Europe du dumping social.

De fait, la directive européenne de 1996, objet d'une révision qui patine, organise, depuis des années, la mise en concurrence des peuples, pour tirer les conquêtes sociales vers le bas, tout en opposant les travailleurs européens les uns aux autres. Le résultat, c'est l'explosion du nombre de travailleurs détachés : ceux-ci sont 2 millions en Europe. On en comptait 230 000 en France en 2014, chiffre qui a connu un bond de 25 % en 2015.

Dans cette enceinte, les membres de notre groupe n'ont cessé de dénoncer les risques pour l'emploi et les conditions de travail dans notre pays et d'alerter sur ceux-ci. Mais nous refusons aussi de stigmatiser les travailleurs détachés, qui sont les premiers à subir des conditions de travail et de vie intolérables. Nous défendons sans relâche une Europe de l'égalité des droits et de la solidarité, pour lutter contre les entreprises qui souhaitent encore renforcer le dumping social.

Le Gouvernement semble à présent prendre position pour que les droits des travailleurs détachés soient ceux du pays d'accueil, comme mon collègue et ami Éric Bocquet l'avait déjà proposé dans un rapport sénatorial.

L'interdiction du détachement en cascade est une priorité, mais elle nécessite un renforcement considérable des moyens de contrôle, avant et après le détachement.

Madame la secrétaire d'État, que comptez-vous faire ?

Comptez-vous vous donner les moyens de vos nouvelles ambitions affichées ?

Enfin, parce qu'il ne s'agit pas d'attendre une nouvelle fois la Saint-Glinglin, il n'y a qu'une seule réponse efficace à ce vaste dumping social intra-européen : la suspension de la directive « travailleurs détachés ». Comptez-vous prendre cette décision ?
(Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Réponse émise le 16 décembre 2016

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage. Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question sur ce sujet, qui, effectivement, inquiète nombre de nos concitoyens et concerne, comme vous l'avez souligné, l'un des principes fondamentaux de l'Union européenne : celui de la liberté des prestations de services en son sein.

Vous comprendrez que l'on ne puisse interdire l'application de ce principe, ce qui ne veut pas dire pour autant que nous ne nous battons pas contre les fraudes, qui, vous avez raison, minent notre modèle social. C'est pourquoi le Gouvernement lutte avec détermination, depuis le début du quinquennat, contre ces fraudes.

Nous agissons au niveau européen. Ainsi que vous l'avez dit, Myriam El Khomri travaille avec les ministres de l'Union européenne. Nous ne sommes pas seuls. Un article de presse a mis en avant les positions communes. C'est un premier élément dans la remise en cause de la directive de 1996.

De la même façon, sur le plan national, nous agissons avec détermination depuis plusieurs années. Vous le savez, la législation française a été modifiée à trois reprises pour renforcer de plus en plus la législation et la lutte contre les fraudes, si bien que nous avons sans doute aujourd'hui la législation la plus stricte de l'Union européenne.

Cette législation nous a permis de renforcer les contrôles.

Premièrement, nous sommes passés, rien qu'entre 2015 et 2016, de 500 à 1 500 contrôles en moyenne. Deuxièmement, nous avons généralisé la carte d'identification professionnelle dans le BTP, qui est également un moyen de contrôle. Troisièmement, nous avons renforcé massivement les sanctions, puisque les employeurs peuvent désormais être condamnés à hauteur de 500 000 euros en cas de manquement. Les chantiers peuvent également être suspendus, ce qui est quand même un élément important.

Ces mesures sont efficaces. Depuis juillet 2015, 840 amendes administratives, pour un produit de 4,5 millions d'euros, ont été prononcées. Ces chiffres vous montrent l'ampleur des contrôles !

M. le président. Il faut conclure.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. J'ai presque terminé, monsieur le président.

Depuis le début de l'année 2016, une trentaine de chantiers ont aussi été arrêtés.

M. Philippe Dallier. Ce n'est pas la question !

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, nous agissons avec détermination et les résultats sont là. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

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