M. Roland Courteau expose à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement que la viticulture méridionale, et plus particulièrement audoise, vient d'être sévèrement frappée, d'une part, sur les secteurs des communes de Tuchan et Paziols dans l'Aude, par un incendie et, d'autre part, sur un plan plus général dans plusieurs régions françaises, par la sécheresse.
Concernant les deux communes frappées par un incendie, il lui indique que selon des estimations provisoires, près de 200 hectares de cultures ont été calcinés sur une surface de 1 200 hectares impactés. Ainsi, près de 105 parcelles viticoles ont été touchées par l'incendie, soit 66 parcelles sur la commune de Tuchan (dont 28 parcelles où plus de la moitié des ceps sont détruits et 38 parcelles où les bordures ont été incendiées) et 39 parcelles sur la commune de Paziols
(soit 17 parcelles où plus de 50 % des ceps sont brûlés et 22 parcelles où les lisières ont été attaquées par les flammes).
Il lui fait donc remarquer que les dégâts sont d'importance (récoltes sévèrement amputées et pertes de fonds) et lui demande quelles mesures spécifiques il envisage de prendre en faveur des viticulteurs et des caves touchés par cette catastrophe qui se surajoute à une très faible récolte en raison de la sécheresse.
Concernant, plus particulièrement, cette sécheresse et ses conséquences sur le vignoble et les récoltes 2016, il lui indique que selon le syndicat des vignerons, les prévisions de vendanges pour 2016 font craindre la plus faible récolte du siècle.
Force est en effet de constater que la sécheresse de 2016 se surajoute à 15 années consécutives de sécheresse.
Ainsi les prévisions de récolte font état de baisses de rendements très importantes, de l'ordre de 15 à 50 %.
C'est la raison pour laquelle il lui demande de bien vouloir lui faire connaître, face à cette situation exceptionnelle, les dispositions qu'il envisage de prendre en faveur des viticulteurs sinistrés.
M. Roland Courteau. Dans le Midi méditerranéen, et notamment dans le département de l'Aude, une sécheresse sévère a frappé l'ensemble des filières agricoles : des grandes cultures et semences à l'élevage, en passant par le secteur de la viticulture, toutes ont été gravement touchées.
Les pertes par exploitation sont très importantes. Durant l'année 2016, on s'est approché des records historiques en matière de sécheresse. Circonstance aggravante, cet épisode fait suite à quinze années de sécheresse dans certains secteurs. Les rendements de la viticulture, par exemple, sont en chute libre, la baisse oscillant entre 30 % et 50 %. Va-t-on connaître, dans l'Aude comme dans les départements voisins, la plus faible récolte du siècle ? C'est une bonne question ! On redoute même, tant les ceps de vigne ont souffert, une incidence sur la récolte de 2017.
Bref, pour certaines exploitations viticoles, la situation est dramatique. Certains viticulteurs envisagent même d'arracher des parcelles entières.
Des mesures rapides, justes et équitables, à la hauteur des pertes de récoltes, sont attendues par les sinistrés : exonérations de l'impôt foncier, prise en charge des cotisations à la MSA et des intérêts d'emprunts, notamment.
Je dois ajouter que certains secteurs subissent la double peine. Ainsi, les terroirs situés sur les communes audoises de Tuchan et de Paziols, dans les Corbières, ont été de surcroît frappés par un violent incendie. Plusieurs centaines d'hectares de cultures ont été touchés, voire calcinés. Sur certaines parcelles, des ceps ont été entièrement détruits. Les pertes sont donc très lourdes dans ces secteurs déjà affectés par une sécheresse très importante.
En raison du caractère exceptionnel de ces difficultés, la prise de mesures exceptionnelles est sollicitée.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation. Monsieur le sénateur, vous avez souhaité interroger le ministre de l'agriculture au sujet des aléas qui ont touché la viticulture dans l'Aude. Stéphane Le Foll m'a demandé de bien vouloir vous répondre, étant retenu ce jour à Bruxelles par le conseil des ministres européens de l'agriculture.
La France a connu ces dernières années une multiplication d'aléas climatiques – sécheresse, inondations, grêle, gel… – sur l'ensemble de son territoire. Le secteur viticole n'a pas été épargné. Vous avez décrit avec précision la situation dans l'Aude. Je vous remercie de ce compte rendu fiable et de votre engagement au côté de la viticulture audoise.
À chacun de ces épisodes climatiques, les services de l'État se sont pleinement mobilisés pour mettre en place rapidement des mesures d'accompagnement des viticulteurs. À ce titre, le recours à l'activité partielle a été facilité et des dégrèvements de taxe sur le foncier non bâti, proportionnels à l'importance des dégâts constatés, ont été accordés par les services fiscaux. En fonction des situations individuelles, les agriculteurs touchés ont pu bénéficier de délais de paiement ou de remises gracieuses s'agissant des autres impôts directs.
Par ailleurs, la Mutualité sociale agricole peut accorder des échéanciers de paiement de cotisations sociales, sur une durée maximale de trois ans, afin d'alléger les charges des exploitations sinistrées.
Les services du ministère de l'agriculture et des douanes ont également donné des instructions visant à autoriser en 2016 les achats de vendanges entre viticulteurs, dans l'attente d'une redéfinition plus large du dispositif.
En revanche, comme vous le savez, le régime des calamités agricoles ne peut être mobilisé en viticulture, dans la mesure où les pertes de récolte sont assurables. La seule exception concerne les éventuelles pertes de fonds.
Le développement de l'assurance récolte est à ce titre un enjeu majeur pour mieux gérer le risque climatique en agriculture, en particulier dans le secteur viticole.
C'est pourquoi, à la demande du ministre de l'agriculture, les organisations professionnelles agricoles et les assureurs ont défini un nouveau contrat d'assurance récolte, le contrat-socle, l'objectif étant de limiter son coût afin que le plus grand nombre de viticulteurs puisse y souscrire. Le Gouvernement s'est d'ailleurs engagé, le 4 octobre dernier, lors de l'annonce du pacte de consolidation et de refinancement des exploitations agricoles, à garantir, pour 2017, un taux de prise en charge de l'assurance souscrite par les agriculteurs français de 65 %, afin de favoriser ce cercle vertueux.
Par ailleurs, il convient également de rappeler que les viticulteurs, au même titre que les autres agriculteurs qui rencontrent des difficultés, sont éligibles aux dispositifs de soutien annoncés le 4 octobre, en particulier le choix de l'année « n-1 » pour le calcul de l'assiette des cotisations sociales et la garantie publique des prêts qui a été mise en place.
Enfin, le dispositif du volume complémentaire individuel, introduit récemment dans le code rural, est également un dispositif à mobiliser pour améliorer la résilience des exploitations viticoles face à des événements climatiques de plus en plus nombreux.
Les réponses apportées sont donc diverses. Il s'agit de mettre en place des mécanismes et des dispositifs immédiatement mobilisables par les viticulteurs. Nous connaissons votre engagement, monsieur le sénateur. Le Gouvernement est à votre côté et à celui des viticulteurs de l'Aude pour faire face à ces catastrophes naturelles.
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d'État, mais je m'attendais à ce que vous évoquiez aussi la question des territoires victimes d'incendies, qui connaissent des pertes de récoltes considérables, certaines parcelles ayant été anéanties. Dois-je comprendre que votre réponse valait également pour eux ? Vous ne l'avez pas dit explicitement, et j'aimerais donc que l'on puisse y revenir.
Il est important que des mesures soient envisagées en faveur des victimes de la sécheresse. Il y va, dans certains secteurs, de la pérennité des exploitations. Il convient de les aider à passer ce cap.
Le changement climatique et ses conséquences, tels le réchauffement et des périodes de sécheresse plus intenses, sont déjà une réalité pour le Midi méditerranéen. Le bilan hydrique y est défavorable depuis quinze ans, ce qui doit nous obliger à explorer plus intensément les voies d'adaptation au niveau des vignobles et des caves, pour favoriser l'avènement d'une viticulture durable.
Il nous faut aussi privilégier certaines solutions, voire mener des expérimentations, afin de multiplier les stockages d'eau en période de fortes pluies en vue de restituer la ressource lors des sécheresses. Il s'agira par exemple, viaune simplification d'ordre législatif et réglementaire, de favoriser la constitution de réserves d'eau aujourd'hui nécessaires à une agriculture durable, tout en faisant la distinction avec la législation sur les carrières. Tel est l'objet de la proposition de loi que j'ai déposée, concomitamment avec celle de ma collègue députée Marie-Hélène Fabre.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.