Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Ma question s'adressait à Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat. Elle n'est pas là, je le sais, elle ne vient pas souvent au Sénat !
(Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Nous étions nombreux dans cet hémicycle ce matin, mes chers collègues, pour écouter le Premier président de la Cour des comptes présenter son rapport annuel.
La Cour a consacré plus de trente-deux pages de son rapport au dossier calamiteux de l'abandon de l'écotaxe.
Elle note que cette décision coûte au contribuable 1 milliard d'euros et nous prive d'une recette de 10 milliards d'euros sur la durée du contrat de partenariat.
Elle dresse un bilan très sévère, relevant que la décision de Mme Royal, d'abord de suspendre sine die l'écotaxe, puis de résilier le contrat de partenariat, a été prise – je cite M. Migaud – « dans la précipitation », sans « aucune analyse préalable de [sa] portée » et en « absence de fondement juridique ». Je vous rappelle que nous avions voté une loi. La Cour écrit également : « La résiliation du contrat de partenariat n'a pas été conduite en protégeant suffisamment les intérêts de l'État. » Elle poursuit : c'est un « gâchis patrimonial important pour l'État […] Un échec industriel et social ».
Franchement, mes chers collègues, il est difficile pour les juges de la rue Cambon d'être plus sévères !
Ma question à Mme Royal est la suivante : reconnaît-elle devant la représentation nationale le grand gaspillage budgétaire dont elle est responsable dans cette affaire ? Quelles suites entend-elle donner au rapport accablant de la Cour des comptes ?
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du budget et des comptes publics.
M. Bruno Sido. C'est l'homme à tout faire !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget et des comptes publics. Madame la sénatrice, je suis très surpris que vous ayez appris quoi que ce soit à ce sujet de l'audition de M. Didier Migaud et de la lecture du rapport de la Cour des comptes. En effet, vous avez présidé la commission d'enquête du Sénat sur ce contrat ; vous m'aviez d'ailleurs alors auditionné, ainsi que Mme Royal.
M. François Grosdidier. Elle avait dit que ça coûterait moins cher : elle était dans le déni !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Vous auriez pu auditionner aussi M. Le Fur – peut-être serait-il venu coiffé d'un bonnet rouge ; mais vous n'avez rien appris, madame la sénatrice !
Savez-vous à quelle date – ce point est très important – le contrat en question a été signé ? Le 4 mai 2012 !
M. François Grosdidier. Et alors ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Or que prévoyait ce contrat ?
M. Gérard Cornu. Il ne fallait pas le résilier !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Selon ses termes, pour recouvrer 100 euros de produit de la taxe, il fallait dépenser 38 euros de frais de gestion.
M. François Grosdidier. C'est moins cher que le recrutement de fonctionnaires !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. C'était du jamais vu !
Autre première, ce recouvrement avait été délégué à une société privée, qui n'était même pas française.
Alors, quand vous parlez de calamité, il faut toujours savoir quelle en est l'origine !
Enfin, madame la sénatrice, puisque votre lecture du rapport de la Cour des comptes a été attentive, vous avez dû voir le tableau qui y figure à la page 214. Le produit de l'écotaxe a été remplacé par une augmentation du prix du gazole, de 2 centimes par litre et de 4 centimes pour le transport routier de marchandises.
M. François Grosdidier. Payée par les automobilistes français !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. En conséquence, l'État a encaissé plus d'un milliard d'euros, alors que le produit de l'écotaxe était quatre ou cinq fois inférieur.
Certes, on peut imaginer tous les scénarios, faire tous les effets de manche que l'on veut,…
M. François Grosdidier. Alors vous avez bien fait ! Pas de regrets !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … mais je crois que la responsabilité de la très mauvaise conduite de ce dossier est largement partagée !
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Hermeline Malherbe applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour la réplique.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le secrétaire d'État, je suis très sensible à ce que vous avez dit. Il est vrai que je n'ai rien appris, mais quand il n'y avait que moi pour vous le dire, vous ne me croyiez pas ! À présent, c'est la Cour des comptes qui le dit ! Cela a tout de même une valeur beaucoup plus importante.
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur quelques travées de l'UDI-UC.)
Je veux en outre vous faire remarquer que la Cour des comptes ne critique ni l'écotaxe ni le contrat de partenariat ; elle critique l'abandon de l'écotaxe. Cela n'a rien à voir !
(Applaudissements sur les mêmes travées. – Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Certes, vous avez remplacé cette taxe par une recette supplémentaire, mais ce sont les automobilistes, ce sont les camions français qui payent ! C'est un gâchis et un désastre financier, dont vous serez responsables devant les Français ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC. – M. Gilbert Barbier applaudit également.)
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