M. Alain Bertrand. J'ai deux explications à demander au Gouvernement, et je préférerais que ce soit le Premier ministre qui me réponde, car c'est important.
(Rires et exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Dallier. C'est gentil pour les autres !
(Sourires.)
M. Alain Bertrand. Premièrement, on a voté le budget : on a fait des économies tout en créant des postes dans l'éducation nationale ou dans la police, par exemple. Tout cela est très bien, et on est d'accord !
Mais, en Lozère – je pourrais aussi prendre l'exemple du Cantal, de la Corrèze ou des Hautes-Pyrénées, mais je cite la Lozère (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.) –, on va supprimer cette année onze postes à la direction régionale des finances publiques, pour 75 000 habitants. Dans l'Hérault, qui compte 1,1 million d'habitants, on supprimera également onze postes.
M. Michel Bouvard. Rabot !
M. Alain Bertrand. Monsieur le Premier ministre, madame la ministre de la fonction publique, le rabot doit-il passer au décuple, voire plus, dans les petits départements ?
Deuxième question : on nous rebat les oreilles avec les maisons de service public, qui offrent très peu de services publics et qui devraient plutôt s'intituler « maisons de services au public ». Ne pensez-vous pas, monsieur le Premier ministre – ou est-ce involontaire ? –, que ces maisons masquent la disparition des véritables services publics dans les petits départements ?
(Eh oui ! sur les travées du groupe CRC. – M. Bruno Sido applaudit.)
Mme Laurence Cohen. Et voilà !
M. Alain Bertrand. Je veux parler des gendarmeries, des tribunaux de police, des postes de police, des tribunaux, des écoles, de la direction départementale des territoires, de la direction départementale des finances publiques, etc.
La réponse à cette question est importante, y compris pour l'avenir !
(Applaudissements sur les travées du RDSE et sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC et du groupe Les Républicains.)
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Monsieur le sénateur, une telle manifestation d'amitié et d'empressement justifie que je fasse un effort pour vous être agréable. (Sourires.)
Aussi, il est normal que, sur la question de la présence des services publics en milieu rural, question importante à laquelle nous prêtons une grande attention, vous disposiez d'une réponse extrêmement précise.
(Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Nous sommes tous, quelles que soient nos appartenances et nos sensibilités politiques, dans l'obligation de redresser nos comptes. Nous ne les redresserons pas si nous ne faisons pas un effort de maîtrise des effectifs de la fonction publique locale et territoriale. Je le sais, nous sommes dans une période électorale, durant laquelle chacun va expliquer qu'il va faire beaucoup d'économies en créant beaucoup de postes, …
M. François Grosdidier. Le revenu universel !
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. … mais je refuse, pour ce qui me concerne, de céder à cette pente. Face aux Français, nous sommes, me semble-t-il, compte tenu de la gravité du contexte, dans une obligation de vérité.
Les efforts budgétaires réalisés, qui ont permis de diminuer le déficit de l'État – nous atteindrons nos objectifs de déficit public cette année –, ne nous ont pas empêchés de créer des postes là où des priorités se faisaient sentir.
Vous avez évoqué la suppression de postes dans la police et la gendarmerie. Je veux rappeler – vous auriez pu le dire dans votre question, car je sais votre grande rigueur intellectuelle – que nous avons créé 9 000 postes dans la police et la gendarmerie,…
M. Alain Bertrand. Je l'ai dit !
M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. … là où 13 000 avaient été supprimés.
Par ailleurs, Bruno Le Roux, en tant que ministre de l'intérieur, comme je l'avais fait à l'époque où j'avais la responsabilité de ce ministère, veille à ce que le déploiement des effectifs de gendarmerie dans les territoires ruraux et de police sur le territoire national soit rehaussé pour répondre à des formes de violences nouvelles, face auxquelles nous serions démunis si nous n'augmentions pas les moyens des forces de sécurité intérieure.
Le deuxième point sur lequel je veux insister – vous le savez parfaitement puisque je me suis rendu dans votre département, accompagné des élus, dont vous-même – concerne les préfectures et sous-préfectures : 2 700 postes ont été supprimés entre 2007 et 2012. Sachant qu'il y a à peu près 280 postes par préfecture, cela équivaut à la suppression d'une douzaine de préfectures en cinq ans.
Nous avons décidé d'en finir avec cette politique en mettant en place le plan Préfectures nouvelle génération, qui conduit à faire des efforts par la création de plateformes de titres. Cela permet de réinjecter dans les préfectures et sous-préfectures des effectifs nouveaux.
Les effectifs pourront ainsi être renforcés, en particulier dans la préfecture de la Lozère, monsieur le sénateur, pour conforter les services publics, comme je vous l'avais annoncé, à votre grande satisfaction d'ailleurs, une satisfaction que vous m'aviez exprimée au moment de ma visite (M. Alain Bertrand opine.) et à laquelle j'avais été particulièrement sensible.
(Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste.)
Le troisième point sur lequel je veux insister a trait au fait que nous allons créer un millier de maisons de service public, ainsi que des maisons de l'État. Ces maisons de service public sont destinées non pas à mettre en place des services étiques et riquiqui dans les territoires, mais à regrouper des services publics là où il y avait un risque de désertification de manière à les maintenir et à assurer un service de qualité.
Pour prendre un exemple très concret, lorsque nous décidons dans des territoires ruraux de faire en sorte qu'il y ait des maisons de service public des services de La Poste et une relocalisation de la gendarmerie, qui profite d'ailleurs de cette relocalisation pour bénéficier de la modernisation de locaux, nous sommes dans le confortement du maillage territorial.
Monsieur le sénateur, je vois dans votre question l'expression, au travers de la faconde et de la fougue qui vous caractérisent, d'une volonté de précision que je vous apporte bien volontiers. Vous pourrez ainsi rentrer dans votre département rasséréné et rassuré, j'en suis convaincu, et diffuser ma réponse à l'ensemble des élus qui vous ont demandé de m'interpeller cet après-midi.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Alain Bertrand, pour la réplique.
M. Alain Bertrand. Monsieur le Premier ministre, j'ai dit que le Gouvernement avait créé des postes dans la police et l'éducation nationale, et je le soutiens. Mais vous savez que vous pouvez délocaliser, démétropoliser, implanter dans l'enseignement supérieur des écoles d'ingénieur, faire des efforts pour inciter les implantations d'entreprise. Quelle que soit la nouvelle majorité – j'espère que ce sera la même ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) –, elle devra prendre cela en compte.
M. le président. Votre temps de parole est épuisé !
M. Alain Bertrand. La fonction publique dans la ruralité est un squelette !
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