M. René-Paul Savary interroge M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement au sujet du système de taxation des produits agroalimentaires, et plus particulièrement celui lié au sucre.
Le rapport parlementaire d'information sur la taxation des produits agroalimentaires rendu public le mercredi 22 juin 2016 suggère de financer des suppressions de taxes par une hausse de la contribution sur les boissons sucrées et par une taxation des sucres entrant dans les produits alimentaires, boissons comprises (proposition 11). Celle-ci, ainsi que l'ensemble des propositions seront débattues dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017. Il est toutefois pertinent de souligner le rôle et l'impact réel du sucre, ce produit naturel étant entouré d'une kyrielle d'idées reçues.
Il rappelle que la réglementation européenne impose de parler non pas du sucre mais des sucres (qui ne sont pas tous issus de la filière sucre). Également, les professionnels de santé et les agences sanitaires n'établissent pas de lien direct entre le sucre et la survenue du diabète et l'obésité, pathologies multifactorielles associées à des excès d'apports alimentaires et à la sédentarité. Ce sont principalement le facteur génétique et le surpoids qui sont liés, de manière causale, dans le diabète de type 2.
Dès lors, la taxation centrée sur le sucre le stigmatise injustement.
L'agence nationale de sécurité sanitaire
de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) conclut dans son rapport d'expertise collective de janvier 2015 sur les édulcorants intenses (EI) que « la prise en compte globale des risques et des bénéfices nutritionnels potentiels ne permet pas de justifier l'utilisation à long terme des EI comme substitut du sucre, en particulier dans les boissons qui en sont le principal facteur. » La taxation des sucres entrant dans la composition de produits alimentaires est encore une fois scientifiquement infondée, d'autant plus que les Français ont en moyenne des apports en sucres ajoutés inférieurs aux normes de l'OMS.
De plus, les études d'impact de la taxe soda ne montrent pas d'effet majeur sur les achats de boissons en France, au-delà du probable effet de signal lors de la mise en place de la mesure. Les foyers français auraient en effet baissé leur consommation à hauteur d'un gramme de sucre par jour et par personne. La mesure se révèle ainsi inefficace pour modifier de manière significative les apports nutritionnels, sans doute en raison de transferts de consommation vers d'autres aliments, sucrés ou non.
Un changement dans la taxation agroalimentaire, important au travers de ces enjeux sanitaires l'est également dans la préservation des filières agricoles françaises.
Il rappelle qu'il faut être attentif à l'état du marché du sucre : en début d'année 2016, les cours mondiaux du sucre ont été divisés par deux depuis 2011. Les stocks européens ont ainsi souffert de gros excédents. Il fait remarquer que l'industrie alimentaire se classe au deuxième rang mondial pour son niveau de sécurité et de qualité, sans compter qu'elle est un secteur créateur d'emplois, exportateur et solidement ancrée dans les territoires, dont la Marne.
Cette taxation repose sur un certain nombre d'idées reçues et s'est soldée par des résultats contestables. Cependant, la direction en voie d'être empruntée tend vers un enfoncement dans cette logique, au détriment de cette filière d'excellence qui contribue à faire de la France une grande nation agricole et agroalimentaire.
Il lui demande quelles dispositions il compte prendre pour que cette taxation n'impacte pas négativement l'industrie agroalimentaire du sucre, ni le pouvoir d'achat des consommateurs, tout en favorisant les retombées bénéfiques sur la santé publique.
Le rapport d'information de la commission des finances de l'Assemblée nationale sur la taxation des produits agroalimentaires élaboré sous la présidence de Mme Véronique Louwagie et rapporté par M. Razzy Hammadi propose une augmentation du tarif sur les boissons contenant des sucres ajoutés ainsi que la création éventuelle d'une taxe sur les sucres entrant dans la composition des produits alimentaires. Cette proposition s'inscrit dans un ensemble de 15 propositions retenues par cette mission d'information. Elle a fait l'objet d'amendements parlementaires aux projets de loi de finances discutés en fin d'année, amendements auxquels le Gouvernement a donné un avis défavorable, compte tenu de l'engagement du Président de la République de ne pas augmenter les impôts. Une réflexion sur la fiscalité alimentaire doit être poursuivie sur la base des travaux parlementaires évoqués ci-dessus, en associant les secteurs professionnels concernés.
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