Mme Corinne Féret attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, sur l'impact de la révision du cadre national d'utilisation des produits phytosanitaires.
Dans sa décision du 6 juillet 2016, le Conseil d'État a enjoint au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, à la ministre des affaires sociales et de la santé, ainsi qu'à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer d'abroger, pour des raisons de forme et dans un délai de six mois, l'arrêté du 12 septembre 2006 relatif à la mise sur le marché et à l'utilisation des produits visés à l'article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime. Ce faisant, il convient aujourd'hui d'adopter, dans les meilleurs délais, un nouvel arrêté interministériel imposant des mesures de protection concernant l'utilisation des produits phytopharmaceutiques vis-à-vis des personnes et des milieux. Cet arrêté devra notamment tenir compte des nouvelles lignes directrices européennes relatives aux conditions d'utilisation des produits phytopharmaceutiques à proximité des habitations qui seront applicables début 2017.
En ce début d'octobre 2016, les agriculteurs ont manifesté leur inquiétude au sujet du texte amené à remplacer l'arrêté de 2006. Dans le Calvados, ils redoutent tout particulièrement l'extension des zones non traitées (ZNT). En effet, une obligation d'instauration de ZNT allant de 5 à 20 mètres le long des cours d'eau, fossés, haies et habitations, se traduirait par une perte de terres cultivables et donc de productivité de leurs exploitations. Ils pointent aussi les distorsions de concurrence avec d'autres producteurs européens, véritable dumping sanitaire s'ajoutant à celui également à l'œuvre sur le plan social et fiscal.
Depuis plusieurs années, le secteur agricole s'est engagé pour améliorer ses pratiques, dans un objectif de santé publique notamment. C'est pourquoi, elle demande au Gouvernement de bien vouloir rassurer ce dernier en œuvrant pour que le nouvel arrêté relatif à l'utilisation des produits phytosanitaires repose sur une position équilibrée, à la fois soucieuse de l'avenir de la « Ferme France » et de nos territoires, mais aussi de la protection de l'environnement et des personnes. Aussi, elle voudrait connaître les actions qu'il entend engager pour répondre à cet enjeu fondamental à la fois pour la santé des consommateurs, le respect des normes environnementales et le maintien de nos emplois et productions qu'est la lutte contre le dumping sanitaire en agriculture, au niveau européen et plus largement international.
Par décision du 6 juillet 2016, le Conseil d'État a enjoint le Gouvernement à abroger l'arrêté du 12 septembre 2006 encadrant la mise sur le marché et l'utilisation des produits phytopharmaceutiques dans un délai de six mois pour un motif procédural, sans remettre en cause le fond des dispositions. En effet, le Conseil d'État a jugé que le texte aurait dû faire l'objet d'une notification auprès de la Commission européenne et des autres États membres pour une partie de ses dispositions. L'arrêté du 12 septembre 2006 définit des règles d'utilisation des produits phytosanitaires en tenant compte du droit européen. En particulier, il impose plusieurs mesures de protection d'importance concernant l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, telles que l'interdiction de traitement au-delà de certaines vitesses de vent pour limiter la dérive des produits, la fixation de délais de rentrée dans les parcelles après traitement, la protection de la qualité de l'eau. Le Gouvernement doit appliquer la décision de justice dans les meilleurs délais pour sécuriser juridiquement les dispositions permettant d'encadrer l'usage des produits phytosanitaires. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement envisage, à titre conservatoire, de notifier à la Commission européenne les dispositions actuelles de l'arrêté du 12 septembre 2006. Il importe toutefois que les discussions puissent se tenir sur les attentes des parties prenantes sur ces dispositions. Il a été indiqué que, si des mesures consensuelles de nature réglementaire émergeaient au cours des consultations, elles pourraient être intégrées au projet d'arrêté qui sera notifié. Le Gouvernement entend également examiner, avec l'ensemble des parties prenantes, toutes les dispositions qui peuvent être prises et les outils qui peuvent être mobilisés pour compléter ces dispositions réglementaires et répondre aux nouvelles préoccupations de santé publique et de protection de l'environnement. Il s'agit notamment : d'étudier les dispositions les plus adaptées, y compris législatives, à la mise en œuvre d'une mesure transversale d'encadrement et de limitation de l'usage des produits phytopharmaceutiques à proximité des habitations ; de généraliser d'ici au 1er février 2017 la mise en œuvre du dispositif d'encadrement par les préfets des conditions d'épandage des produits phytopharmaceutiques à proximité des établissements accueillant des personnes vulnérables (écoles, hôpitaux…), en application de l'article L. 253-7-1 du code rural et de la pêche maritime ; de contribuer à travers le plan Écophyto 2 à l'amélioration du matériel d'épandage utilisé par les agriculteurs afin de limiter efficacement la dérive des produits phytosanitaires, en tenant compte de l'évolution des connaissances scientifiques et des performances des nouveaux matériels disponibles ; de poursuivre et achever les travaux en cours sur l'identification et la cartographie des cours d'eau tels que définis dans la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Ces actions seront engagées et pilotées par les ministères chargés de l'agriculture, de l'environnement, de la santé et de la consommation. Toutes les parties prenantes seront associées et une restitution sur l'état d'avancement sera effectuée dans les prochains mois.
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