M. François Grosdidier appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le refus de l'État de reconnaître le caractère de catastrophe naturelle aux sinistres causés par la sécheresse dans cent communes mosellanes, par arrêté interministériel du 16 septembre 2016. Il a été notifié par courrier du préfet de la Moselle en date du 24 octobre 2016. Les maires ont interrogé les services de l'État qui répondent qu'il s'agit d'une décision prise par une commission interministérielle pilotée par le ministre de l'intérieur s'appuyant sur les travaux d'un groupe d'experts. Au cours de l'été 2015 (la période retenue va du 1er juillet au 30 septembre 2015), la sécheresse a causé de très nombreux et graves dégâts, provoquant notamment des fissures dans les bâtiments. Ainsi, 104 communes de Moselle avaient déposé des dossiers. La fédération des maires de la Moselle a eu l'immense surprise de constater que quatre communes seulement se voyaient reconnaître l'état de catastrophe naturelle. Cette décision est injuste et incompréhensible, tant le lien entre l'apparition subite de ces fissures au cours l'été et les condititons météorologiques exceptionnelles semblait évident à tous, y compris aux fonctionnaires de l'État. Tous savent qu'il faut réunir deux conditions : des circonstances météorologiques particulières - c'est le cas - et un sol sensible à ses effets et propice au gonflement et à la rétractation. C'est le cas en Moselle dont le sol est particulièrement argileux. Quant au groupe d'experts, aucun maire dans aucune commune, ni aucun particulier touché, n'a vu le moindre expert sur le terrain, ni même à la préfecture ou à la direction départementale des territoires. Il attire son attention sur les conséquences dramatiques qui en découlent pour des personnes, propriétaires de leurs biens, mais au revenu très faible comme en connaît le département de la Moselle. Il lui demande donc de bien vouloir reconsidérer cette décision après une véritable expertise contradictoire et la visite des experts sur chaque site concernés.
L'étude des dossiers de demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle au titre des mouvements de terrain différentiels dus à la sécheresse et à la réhydratation des sols se réfère à des critères mis en place en 2000, 2003 et 2011 (sécheresse de 2009) pour s'adapter à l'évolution des sécheresses qui ont frappé le territoire français. Ces critères sont précis et calculés en tenant compte de l'ensemble des avancées scientifiques et techniques dont nous disposons. La « sécheresse », qualifiée plus précisément en « mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols », est provoquée par l'interaction entre deux facteurs : - un facteur de prédisposition : la présence d'argile dans le sol, détectée et évaluée par le Bureau des recherches géologique et minière (BRGM), établissement public à caractère industriel et commercial, placé sous la tutelle du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, du ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer et du ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique ; - un facteur déclenchant : les phénomènes climatiques exceptionnels dont les données et les analyses sont fournies par Météo-France. La teneur en eau des terrains argileux étant liée aux variations climatiques saisonnières, plusieurs périodes de sécheresse sont distinguées à ce jour pour établir, à partir de l'analyse du caractère anormal ou non de ce facteur déclenchant, la présence ou non d'un phénomène exceptionnel justifiant la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle : - la sécheresse printanière : ce critère s'applique à la période s'étendant du 1er avril au 30 juin ; la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle sera acquise si la durée de retour en années de la moyenne de l'indice d'humidité des sols des 9 décades d'avril à juin de l'année du sinistre est strictement supérieure à 25 ans (critère 2009) ; - la sécheresse estivale: ce critère s'applique à la période s'étendant du 1er juillet au 30 septembre ; Pour cette période deux sous critères ont été retenus : sous-critère 1: la moyenne de l'indice d'humidité des sols doit être strictement inférieure à 70 % de la moyenne de l'indice normale et le nombre de décades pendant lesquels cet indice est inférieur à 0,27 doit se situer au 1er, 2ème ou 3ème rang sur la période allant de 1989 à l'année concernée (ce qui signifie que l'année étudiée est classée comme la 1ère, 2ème ou 3ème année la plus sèche) ; sous-critère 2 : la durée de retour moyenne en années (de 1959 à l'année du sinistre) de l'indice d'humidité des 9 décades de juillet à septembre doit être strictement supérieure à 25 ans (critère 2003). - la sécheresse hivernale (longue période) : ce critère s'applique sur une période de 4 trimestres consécutifs pouvant aller du 1er janvier au 31 décembre. Pour que la reconnaissance soit acquise, il faut que l'indice d'humidité du sol annuel soit inférieur à la normale et que l'une décade du trimestre de fin de recharge hydrique des sols (de janvier à mars) soit inférieure à 80 % de la normale. Cette décade est appelée choc hivernal. Cela constitue une sécheresse climatique dont la limite est définie par une fin de période de sécheresse avérée définie par Météo-France (critère 2000). Ces données sont fournies par Météo-France qui établit, annuellement et à année échue, un rapport sur la sécheresse géotechnique qui nécessite un travail de plusieurs mois. Il est livré habituellement en juin de l'année suivante, c'est pourquoi les demandes de l'année N ne peuvent être traitées que l'année N+1. Il vise à identifier les zones du territoire éligibles selon les critères définis par la commission interministérielle « catastrophes naturelles » appliqués aux données de bilan hydrique sur la France. Les données utilisées dans ce rapport sont issues du modèle Safran/Isba/Modcou (SIM) dans une configuration dite « uniforme », spécifiquement adaptée pour la problématique CATNAT, avec une végétation et une texture de sol caractéristiques des sols argileux. Le modèle SIM utilise l'ensemble des données pluviométriques présentes dans la base de données climatologiques de Météo-France (soit 4 500 postes). Il réalise une modélisation du bilan hydrique sur la France au moyen d'un maillage complet du territoire, caractérisé par une grille composée de carrés de 8 km de côté. La teneur en eau des sols est désignée par le paramètre SWI (Soil Wetness Index) qui est un indice d'humidité du sol établi sur une profondeur de 2 mètres. Chaque commune correspond à une ou plusieurs mailles de cette grille de modélisation. Ce rapport établit donc la teneur en eau des terrains argileux selon plusieurs périodes pour tenir compte des variations climatiques saisonnières et établir la présence d'un phénomène exceptionnel justifiant la reconnaissance de catastrophe naturelle. C'est sur ces fondements que les demandes de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle au titre de la sécheresse font l'objet d'une instruction rigoureuse et d'un examen extrêmement attentif par les membres de la commission interministérielle. Par ailleurs, je vous précise que les ministres sont tenus de se prononcer sur l'intensité anormale de l'agent naturel et non sur l'importance des dégâts pour qualifier un phénomène de catastrophe naturelle, en application de la loi du 13 juillet 1982 modifiée qui instaure le régime des catastrophes naturelles. L'arrêté interministériel a pour seul objet de reconnaître comme catastrophe naturelle l'évènement en question lorsque celui-ci revêt un caractère exceptionnel et de préciser sa période de survenance.
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