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Antoine Lefèvre
Question écrite N° 629 au Ministère de l'économie


Compagnies d'assurance faisant appel à des détectives privés

Question soumise le 20 juillet 2017

M. Antoine Lefèvre attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les abus, constatés par les particuliers, de la part de certaines compagnies d'assurances faisant appel à des détectives privés. En effet, suite à un accident de la route et dans la perspective du procès au civil qui doit évaluer le montant des indemnités, il n'est pas rare de voir les compagnies d'assurance mandater des officines privées pour enquêter sur les victimes. Sous le prétexte de détecter d'éventuelles « arnaques », certains détectives n'hésitent pas à franchir les lignes de la légalité, de la vie privée, à harceler, ajoutant de la souffrance psychologique à la douleur de ceux dont la vie a été brisée. S'il est certes nécessaire de démasquer les fraudes, les compagnies ne peuvent-elles pas faire confiance aux experts dûment assermentés et mandatés par celles-ci même ? Enfin, de telles méthodes pourraient amener le soupçon de faire durer les procédures dans le temps avec le « risque » que les victimes, déjà affaiblies, ne les abandonnent...

Il lui demande donc, comme certains avocats spécialisés, à ce que ces pratiques soient davantage encadrées, voire supprimées, tant ce phénomène a, semble t-il, pris de l'ampleur ces dernières années.

Réponse émise le 23 novembre 2017

L'assuré étant présumé de bonne foi, la charge de la preuve de la fraude à l'assurance incombe à l'assureur, qui doit démontrer soit la faute intentionnelle ou dolosive, soit la fausse déclaration intentionnelle dans les causes, circonstances ou conséquences du sinistre. Les enquêtes diligentées en vue de prouver la fraude à l'assurance ne doivent pas porter atteinte de manière disproportionnée à la vie privée de l'assuré ou de la victime. Le recours à l'enquêteur est désormais admis par la jurisprudence à condition qu'il respecte un équilibre entre recherche de la preuve et respect de la vie privée. En 2001, la Cour européenne des Droits de l'Homme a estimé « d'une part, que l'assurance a l'obligation de vérifier si la demande en réparation du lésé est justifiée et donc le droit de faire des enquêtes privées et, d'autre part, le lésé doit tolérer que des investigations soient effectuées, même à son insu, lorsque cette méthode est imposée par l'objectif poursuivi ». En France, la Cour de cassation a procédé au même raisonnement dans un arrêt rendu le 31 octobre 2012 lorsqu'elle a examiné le pourvoi d'un assuré : la première chambre civile a affirmé que « les atteintes portées à la vie privée (de la victime), sur la voie publique ou dans des lieux ouverts au public, sans provocation aucune à s'y rendre, et relatives aux seules mobilité et autonomie de l'intéressé, n'étaient pas disproportionnées au regard de la nécessaire et légitime préservation des droits de l'assureur et des intérêts de la collectivité des assurés ». Dans son rapport annuel 2015, l'Agence de lutte contre la fraude à l'assurance (ALFA) indique que les cas de fraude à l'assurance dommages ont représenté un coût d'environ 2,5 milliards d'euros, soit près de 5 % des primes IARD collectées. La fraude entraîne une hausse du prix de revient des produits d'assurance. Les cotisations versées par les assurés servant à régler les sinistres subis par l'ensemble des assurés, ce sont au final les assurés honnêtes qui en supportent le coût.

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