M. Alain Fouché attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la situation de précarité des exploitants agricoles retraités.
La proposition de loi n° 316 (Sénat, 2017-2018) visant à assurer la revalorisation des pensions de retraite agricoles en France continentale et dans les outre-mer avait été votée unanimement par l'Assemblée nationale, et fait l'objet d'un vote conforme de la commission des affaires sociales du Sénat.
Lors de son examen en séance plénière le 7 mars 2018, le Gouvernement a pourtant déposé un amendement reportant la valorisation des retraites agricoles en 2020, et demandé un « vote bloqué » en application de l'article 44 alinéa 3 de la Constitution.
Le 12 avril 2018, le Premier ministre a justifié cette manœuvre législative par la nécessité de procéder à une refonte globale des régimes de retraites garantissant justice et équité sociale.
Depuis la réforme des retraites de 2014, le minimum garanti à 75 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) assure aux anciens chefs d'exploitation une pension globale, de base et complémentaire, au moins égale à 75% du SMIC agricole net, soit 871 euros par mois en 2018, en bénéficiant d'un complément différentiel de points gratuits de retraite complémentaire obligatoire (RCO) pour atteindre ce seuil.
Ce minimum garanti pour une carrière complète demeure malheureusement très faible comparé aux retraités des autres régimes, ainsi qu'au seuil de pauvreté et au minimum vieillesse.
Si l'on peut comprendre la volonté du Gouvernement d'intégrer la revalorisation des retraites agricoles dans une réforme plus globale, la situation d'extrême précarité des agriculteurs retraités impose que des mesures soient prises en urgence.
Aussi, il souhaite savoir, si dans l'attente de la réforme des retraites annoncées, le Gouvernement compte prendre des mesures pour permettre aux exploitants agricoles de vivre convenablement.
La proposition de loi dite « Chassaigne-Bello », adoptée à l'Assemblée nationale le 2 février 2017, a été examinée à nouveau par le sénat le 16 mai 2018 dans le cadre de la procédure prévue à l'article 44, alinéa 3, de la Constitution. Cette proposition de loi qui a pour objet principal de revaloriser à hauteur de 85 % du salaire minimum de croissance (SMIC) net les pensions des chefs d'exploitation agricole ayant eu une carrière complète en cette qualité, va bien au-delà de la mesure 75 % du SMIC net, laquelle a été mise en œuvre dans sa totalité en 2017. Le Gouvernement est sensible à la situation des agriculteurs retraités notamment des populations percevant les niveaux les plus faibles de retraites. Néanmoins, il ne pouvait être favorable à cette proposition de loi en l'état. C'est pour cette raison qu'ont été proposés trois amendements gouvernementaux. Le premier amendement consistait à reporter au 1er janvier 2020, soit après les débats qui vont s'engager sur la réforme systémique des retraites, l'entrée en vigueur de l'article 1er de ladite proposition de loi, par souci de cohérence et d'équité entre les assurés sociaux. Il apparaît souhaitable au Gouvernement de définir en premier lieu le nouveau cadre général du régime des retraites. De plus, et sans remettre en cause les équilibres essentiels du régime des non-salariés agricoles, il a semblé au Gouvernement qu'il était légitime de proposer deux améliorations au régime des retraites agricoles. Ainsi, le second amendement gouvernemental proposait d'accorder des points gratuits de retraite complémentaire obligatoire aux assurés justifiant du taux plein à l'âge légal ou avant l'âge légal, indépendamment de la condition de durée d'assurance nécessaire pour l'obtention du taux plein, tels ceux liquidant leur retraite au titre de l'inaptitude, du handicap ou de la pénibilité. Le troisième amendement gouvernemental consistait à revaloriser de 5 %, à compter du 1er janvier 2020, le montant du minimum de pension de retraite accordé aux collaborateurs d'exploitation, aux aides familiaux et aux anciens conjoints participant aux travaux. Par ailleurs, si la mesure de revalorisation des retraites agricoles avait dû être adoptée dans sa version initiale, elle se serait heurtée à un problème de financement, la proposition de création d'une taxe sur les transactions financières, dans le contexte concurrentiel actuel, ne pouvant être mise en œuvre unilatéralement. En tout état de cause, le Gouvernement est resté attentif à ce que cette mesure de revalorisation, telle que proposée par la proposition de loi et dont le coût est estimé à 350 M€, ne se fasse pas au détriment des actifs agricoles. Le Sénat a rejeté la proposition de loi ainsi amendée par le Gouvernement. En tout état de cause, la réflexion globale qui va être menée sur l'avenir des régimes de retraite sera notamment l'occasion de définir, dans le cadre des modalités de mise en œuvre d'un système plus équitable, la place que l'on souhaite accorder aux dispositifs de solidarité dans la constitution des droits à retraite. À cet effet, M. Jean-Paul Delevoye qui a été nommé haut-commissaire à la réforme des retraites auprès de Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, a pour mission d'organiser la concertation avec les principaux acteurs du champ des retraites et de coordonner, au niveau interministériel, les travaux de préparation de la réforme des retraites. Il rendra compte de ses travaux au Premier ministre et à la ministre des solidarités et de la santé. Un projet de loi sera déposé au Parlement en 2019.
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