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Mme Marie-Noëlle Lienemann attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les risques de fraude visant à faire entrer de l'huile de palme non européenne dans la composition des biocarburants.
La directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables (RED2) interdit l'incorporation d'huile de palme raffinée hors d'Europe dans le carburant. Elle atteint néanmoins les réservoirs déguisée en huile de cuisson.
Pour encourager les États membres à récupérer d'« huile de cuisson usagée » (HCU), RED2 propose que l'huile de cuisson soit comptabilisée en double. L'utilisation de 2 % de HCU en tant que carburant aboutit à un score de 4 % de renouvelables. Cela permettrait d'améliorer le score climatique européen. Or en pratique, la comptabilisation s'avère compliquée.
Le Royaume-Uni et les Pays-Bas ont récemment lancé des enquêtes sur des entreprises qui auraient commercialisé des biocarburants contenant de l'huile de palme, ce qui est désormais interdit. Des HCU se révèlent être en fait de l'huile de palme « neuve », débaptisée lors de son parcours international.
Dans le cadre de RED2, la Commission européenne est chargée de la reconnaissance des systèmes de certification des biocarburants, mais les États membres sont responsables « de la conception des programmes de soutien, liés au risque de fraude, et de la supervision des organismes de certification qui effectuent un audit indépendant dans le cadre des régimes volontaires ».
Dans son rapport de 2016 sur le système de certification des biocarburants durables, la Cour des comptes européenne avait mis en garde sur les dangers cachés des biocarburants comptant double, et en particulier des biocarburants à usage unique : « En raison de faiblesses dans la procédure de reconnaissance de la Commission, puis dans la supervision des régimes volontaires reconnus, le système de certification de la durabilité des biocarburants de l'UE n'est pas totalement fiable » ; « On ne peut pas exclure que du biogazole certifié en tant que biocarburant dérivé de HCU, mais en réalité élaboré à partir d'huile vierge éventuellement frelatée, ait été comptabilisé dans les données relatives aux biocarburants comptant double ».
Le média Euractiv a tenté de savoir si l'UE avait des données sur le pourcentage d'huile de palme dans les HCU, mais a été informé qu'elles n'étaient pas disponibles. Toutefois, Eurostat a signalé pour 2016 une consommation combinée de biocarburants produits à partir des HCU et de graisses animales de 3,8 Mtep.
« [RED2] ne fait pas de distinction entre les différents types de HCU parce que les HCU sont des déchets, et que l'utilisation de déchets et de résidus pour la production de biocarburants est considérée comme la meilleure pratique », selon Euractiv. Or dans la directive RED2, l'HCU n'est pas considérée comme un déchet, mais comme une « matière première pour la production de biocarburants et de biogaz pour le transport, dont la contribution à la part minimale établie à l'article 25, paragraphe 1, 1er alinéa, est limitée et peut être considérée comme le double de son contenu énergétique ».
La directive prévoit également un plafond de 1,7 % pour les HCU ; plusieurs États membres, dont l'Irlande, ont déjà dépassé ce plafond.
On mesure à quel point il existe un système de contournement de la législation européenne sans que les dispositions d'évaluation aient été mises en place pour contrecarrer ses stratégies de dumping économique et écologique.
Elle lui demande si le gouvernement français a effectué des mesures pour vérifier à quel point notre pays était touché par l'incorporation d'huile de palme neuve « requalifiée » HCU dans les biocarburants. Elle lui demande également quelles mesures comptent prendre le Gouvernement pour se prémunir contre ces pratiques préjudiciables.
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