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Mme Marie-Noëlle Lienemann attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur l'évolution de la situation de la société Alstom et de son établissement de Reichshoffen.
Les informations dans la presse spécialisée indiquent que, suite à l'appel d'offres lancé en 2017 afin de renouveler le matériel de deux lignes structurantes de la SNCF (train d'équilibre des territoires (TET) - Intercités), cette dernière semblerait vouloir l'attribuer au constructeur espagnol CAF plutôt qu'au français Alstom. Un prochain conseil d'administration devrait officialiser cette décision.
Il est étonnant que cette information soit sortie dans la presse à ce stade de la procédure (et les représentants des salariés s'inquiètent d'une forme de lobbying en faveur de CAF). Une telle décision serait une catastrophe pour le site Alstom de Reichshoffen.
Cet appel d'offres porte sur une tranche ferme de 28 rames destinées aux lignes Paris-Clermont et Paris-Toulouse, à laquelle s'ajoutent des tranches optionnelles jusqu'à 75 rames, en particulier pour la transversale sud Bordeaux-Toulouse-Marseille.
Or les salariés de l'établissement Alstom de Reichshoffen ont déjà connu une grave déception avec le contrat cadre Régiolis pour lequel seules 380 rames sur les 1 000 prévues ont été notifiées malgré les investissements massifs engagés dans le cadre de ce projet par Alstom.
Contrairement aux arguments avancés par CAF sur l'emploi français, la quasi totalité de sa production serait réalisée en Espagne ; seul un assemblage de ses trains (dans son unique unité française à Bagnère-de-Bigorre) serait prévu. La taille limitée du site de Bagnère interroge objectivement sur la faisabilité du processus en lui-même. Enfin, l'ingénierie ainsi que la totalité des composants de trains CAF (bogie, traction, électronique) seront espagnols. Tel n'est pas le cas du projet Alstom.
L'éventuelle arrivée de CAF sur ce marché – après que Bombardier a remporté plus de 50 % des marchés (trains Intercités et régionaux) ces dernières années – aggraverait le déséquilibre actuel et compromettrait les perspectives de rebond du site de Reichshoffen et la pérennité des 900 emplois actuels, sans compter les intérimaires et les prestataires. Une telle situation ôterait au site les capacités de se relever d'un creux de charge qu'il subira de mars 2020 à mars 2021.
Le site de Belfort est concerné par l'une des deux offres qu'Alstom a élaborées en réponse à l'appel d'offres ; en retombées directes en termes d'emplois en France ses offres représenteraient :
pour l'offre de base, 350 pour le site de Reichshoffen, 200 pour les autres sites Alstom et plusieurs centaines d'emplois chez les sous traitants ;
pour l'offre variante : 550 pour les sites de Reichshoffen et Belfort, 250 pour les autres sites Alstom et plusieurs centaines d'emplois chez les sous traitants.
Cette commande est donc indispensable au site de Reichshoffen et à la pérennisation de sa charge industrielle.
Alors que les choix d'une politique européenne industrielle ne s'affirment pas, il serait paradoxal que la puissance publique française ne travaille pas activement à sauvegarder en France les compétences indispensables pour répondre aux enjeux sur la mobilité durable de demain, surtout sur un projet financé totalement par l'État.
Comment le Gouvernement peut-il donc expliquer les écarts entre les discours et les actes sur un cas concret de politique industrielle ?
Madame Lienemann demande donc au ministre de l'économie et des finances comment le Gouvernement compte intervenir, alors que la SNCF est une entreprise publique, pour privilégier dans cet appel d'offres l'emploi, l'outil de production et les savoir-faire français. Plus généralement, elle demande également quelle stratégie industrielle nationale le Gouvernement compte mettre en place pour consolider et développer la filière ferroviaire française dans la durée.
Cette question n'a pas encore de réponse.
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