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Mme Marie-Noëlle Lienemann attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la nécessité de restaurer un véritable service public des maisons de retraite.
Suite à l'indignation suscitée dans l'opinion par la révélation de l'hebdomadaire L'Observateur, le groupe Korian a finalement annoncé mercredi 29 avril 2020 qu'il renonçait à verser quelque 54 millions d'euros de dividendes à ses actionnaires au titre de l'année 2019. Cette éventuel versement de dividendes paraissait d'autant plus indécent que des rapports convergents semblent indiquer une surmortalité dûe à l'épidémie de Covid-19 dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) gérés par ce groupe.
Or depuis une vingtaine d'années, le boom des maisons de retraite privées met à mal l'accessibilité financière des ménages à ces établissements. La fédération hospitalière de France alerte sur cette dérive depuis plus de dix ans, alors que la grande majorité des places en EHPAD sont créées par des entreprises privées à buts lucratifs.
Les tarifs pratiqués dans ces établissements sont largement supérieurs à ceux des maisons de retraites publiques autonomes ou celles rattachées à un hôpital. De plus, les établissements privés s'installent principalement dans les secteurs où l'activité paraît la plus lucrative.
En 2017, le Gouvernement a procédé à une réforme de la tarification des EHPAD, entrée en application en 2019, qui a suscité une vive opposition de l'ensemble du secteur, à cause d'une convergence, étalée sur sept ans, des budgets des EHPAD privés et publics sur les tarifs soins et dépendance. Le second volet de cette réforme, l'évolution du tarif dépendance, est celui qui a suscité le plus de critiques pour son calcul opaque qui aboutit à une inégalité exacerbée entre départements : ce nouveau forfait se traduit par une baisse importante des recettes pour 35 à 40 % des EHPAD publics, en raison des surcoûts liés à leur statut (prises en charge plus lourdes, salaires plus élevés...) qui ne sont plus intégrés dans les calculs.
Cette réforme a donc privilégié les établissements privés lucratifs, il ne s'agit pas d'un hasard. Dès la création des EHPAD, en 1997, le secteur commercial émergent a pu bénéficier de financements publics pour se développer. L'abrogation de la relation privilégiée qui existait entre les pouvoirs publics et les acteurs traditionnels — publics et associatifs — de la prise en charge des personnes âgées a instauré une concurrence qui bénéficie au secteur commercial.
La crise sanitaire a démontré l'insanité d'un tel modèle. Il convient donc de restaurer un cadre public strict aux EHPAD.
Elle lui demande donc si le Gouvernement compte interdire formellement aux entreprises de ce secteur de verser des dividendes en 2020, plutôt que de compter sur leur « sursaut de conscience » après qu'elles ont été publiquement dénoncées.
La question du grand âge est un défi pour notre société ; la recherche du profit est parfaitement illégitime pour y face et le caractère lucratif démontre par ailleurs son inadéquation lorsque surviennent des difficultés importantes et systémiques.
Elle lui demande donc quelles sont les pistes que le gouvernement envisage pour restaurer l'encadrement public des Maisons de retraites, voire la nationalisation ou le rétablissement d'une gestion publique des EHPAD privés à buts lucratifs.
Cette question n'a pas encore de réponse.
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