M. Patrice Joly. Ma question s'adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé et porte sur les intentions du Gouvernement concernant les pensions de réversion.
Dans le cadre de la réforme des retraites à venir, le Gouvernement, par la voix de plusieurs ministres, a annoncé dans un premier temps que les pensions de réversion pourraient « baisser pour certains retraités » ou encore être repensées pour être « plus justes et plus efficaces » pour d'autres, sans en détailler le contenu.
Face à la vague d'interrogations et d'inquiétudes qui s'est élevée parmi nos concitoyens concernés, le Président de la République a fait volte-face et s'est offusqué hier, à l'occasion de son discours à Versailles, de cette « rumeur malsaine », et d'ajouter que rien ne changera pour les retraités d'aujourd'hui.
Seuls les pensionnés actuels se voient donc garantir la poursuite de leurs droits. Qu'en est-il pour les retraités de demain ? Quelles assurances avons-nous qu'ils ne seront pas lésés ? Face à cette série de dénégations qui n'en finit pas, nous sommes dans un flou aussi artistique qu'inquiétant, dont, malheureusement, la seule logique semble financière. Cependant, les économies possibles ne peuvent faire oublier qui elles frapperaient.
Les pensions de réversion concernent 4,4 millions de bénéficiaires, parmi lesquels 89 % de femmes qui ont parfois dû s'arrêter de travailler ou travailler moins pour élever leurs enfants et dont le pouvoir d'achat a par conséquent été diminué. Pour plus de 1 million d'entre elles, c'est leur seule source de revenu ! Et pour celles qui ont elles-mêmes une retraite, la pension de réversion compense à 40 % seulement l'écart de niveau de retraite entre hommes et femmes.
Aussi, plutôt que de pointer du doigt le caractère prétendument malsain d'une rumeur dont vous êtes vous-même à l'origine, pourriez-vous conclure définitivement ce débat en nous assurant que, pour maintenant et surtout pour l'avenir, les pensions de réversion seront bien maintenues, aux mêmes conditions d'âge et de revenus ?
(Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Patrice Joly, je suis ravie de pouvoir vous répondre de nouveau sur cette question. Le Président de la République a été clair hier dans son discours. (Exclamations sur des travées du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe Les Républicains.)
M. Marc-Philippe Daubresse. Pas pour tout le monde !
Mme Agnès Buzyn, ministre. Faire croire que nous voudrions supprimer les pensions de réversion est une rumeur malsaine visant à faire peur. Le Président de la République a dit de façon explicite que rien ne changera pour les retraités d'aujourd'hui.
(Exclamations sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. David Assouline. Et pour ceux de demain ?
Mme Cécile Cukierman. Oui, pour ceux de demain ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Je vais y venir !
Cessons d'alimenter les angoisses et les craintes de nos concitoyens.
M. Pierre-Yves Collombat. Voilà qui est beau !
Mme Agnès Buzyn, ministre. Oui, nous maintenons le système des pensions de réversion, car c'est une forme de solidarité évidente à laquelle le Gouvernement est très attaché. Pour 100 % des femmes et des hommes qui, aujourd'hui, touchent une pension de réversion, nous n'y touchons pas.
Et oui, nous maintiendrons les pensions de réversion dans le futur système pour les futurs retraités qui bénéficieront des mêmes prestations, pour chaque euro cotisé. (Mme Christine Prunaud s'exclame.) Le Haut-Commissaire à la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, reçoit toute la semaine les partenaires sociaux pour discuter des droits familiaux et des pensions de réversion. Nous sommes en pleine concertation. Il s'agit d'une nouvelle étape dans le cycle de discussions, dont l'objectif est de recueillir les points de vue des syndicats et des organisations patronales.
Ainsi, toute l'année 2018 sera consacrée aux travaux de réflexion et à la concertation sur la nouvelle formule de retraite. Ce sujet est évidemment très complexe, parce qu'il touche non seulement les personnes mariées, mais peut-être aussi les personnes pacsées. Tout cela est en cours de discussion.
C'est au cœur de notre pacte républicain. Nous sommes convaincus que cette réforme ne se fera pas en agitant des peurs et en alimentant des polémiques. J'espère avoir été claire.
(Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – M. Jean-Marc Gabouty applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour la réplique.
M. Patrice Joly. Madame la ministre, je suis désolé de vous dire que vous ne nous avez pas rassurés, pas plus que les bénéficiaires. La notion d'« euro cotisé » sème le doute sur le niveau des pensions qui seront reversées.
Je rappelle que le montant moyen d'une pension de réversion est de l'ordre de 600 euros par mois. Madame la ministre, croyez-vous que ce soit encore trop pour permettre à des hommes et des femmes de vivre dignement ? (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
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