Mme Nassimah Dindar. Ma question, à laquelle s'associe ma collègue Viviane Malet, s'adresse à deux ministres ici présents.
Si un début de réponse a été apporté aux événements quasi insurrectionnels de La Réunion, quelles réponses sont apportées à la souffrance exprimée par les « gilets jaunes » ? Comment en est-on arrivé là, et à qui la faute ?
Je ne céderai pas à la facilité en disant que c'est la faute du Gouvernement, car je lui reconnais le courage et la volonté de changer le système, mais admettons ensemble de gros défauts à l'allumage !
Sachant, comme l'a rappelé mon collègue, que La Réunion connaît un taux de chômage de 23 %, que celui des moins de 25 ans atteint un pic de 57 %, la logique voudrait que, par simple solidarité nationale, on écoute mieux ce territoire, madame la ministre. Or, en réponse à cette situation, le Gouvernement a supprimé les contrats aidés, qu'il a remplacés par des parcours emplois compétences, les PEC, lesquels sont trop onéreux. Nous continuons de penser outre-mer que ces contrats permettent à bon nombre des « amochés de la vie » de survivre.
Je rappelle en outre que la vie est plus chère de 37 % dans ce territoire qu'à l'échelon national, alors que, parallèlement, les revenus y sont inférieurs de 40 %, et qu'un smicard est pauvre outre-mer. Face à ce constat, le Gouvernement a répondu : « Prenons la tondeuse pour la classe moyenne ! »
Alors que nos gramounes, nos vieux mounes, qui sont souvent au minimum vieillesse, ont du mal à joindre les deux bouts, vous supprimez leurs aides personnalisées au logement, les APL, et vous augmentez leur CSG. Quant aux retraités agricoles outre-mer, ils sont encore plus pauvres que ceux des campagnes de l'Hexagone, qui sont eux aussi des laissés-pour-compte. Par équité, ces revenus devraient être soutenus.
Madame la ministre, vous opérez sans anesthésie, et ça saigne…
La mise en œuvre de vos réformes pâtit d'un gros défaut de synchronisation et d'un manque de dialogue évident avec les élus de France, qui vous lancent pourtant régulièrement sur ces travées un avis de tempête.
Madame la ministre, La Réunion souffre. À mon tour de vous le demander : comment le Gouvernement entend-il faire montre de plus d'équité envers les Français de l'océan Indien ? Quelles mesures nouvelles compte-t-il prendre contre les débordements déjà trop importants ?
(Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer.
Mme Sylvie Goy-Chavent. On veut une vraie réponse !
Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer. Madame la sénatrice, j'entends vos préoccupations. Nous avons eu l'occasion d'évoquer la situation de La Réunion ces dernières heures. J'ai répondu sur le volet sécuritaire il y a quelques minutes.
Je ne peux pas entendre qu'aucune mesure fiscale ou de protection sociale n'a été prise dans les territoires d'outre-mer, car nous en avons pris de nombreuses, comme en métropole.
Mme Éliane Assassi. Pourquoi sont-ils en colère, alors ?
Mme Annick Girardin, ministre. À titre d'exemple, dans le domaine de la santé, qui est prioritaire dans votre territoire, la couverture complémentaire santé sera améliorée pour les plus fragiles, car aucun citoyen ne doit renoncer à se soigner pour des raisons économiques. Agnès Buzyn porte cette mesure dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui est en cours de discussion.
En matière de justice sociale, je tiens à rappeler que le minimum vieillesse a été revalorisé au 1eravril 2018, qu'il sera augmenté de 35 euros en 2019 et qu'il connaîtra également une hausse en 2020.
Pour accroître le pouvoir d'achat, les heures supplémentaires seront exonérées à compter de 2019.
Par ailleurs, 1 500 places de crèches supplémentaires seront financées à La Réunion en 2019, afin de répondre à la véritable problématique que connaît ce territoire concernant notamment les jeunes femmes célibataires.
Je rappelle également que Muriel Pénicaud a annoncé que 253 millions d'euros seront consacrés dans les quatre ans à venir à la formation des jeunes en recherche d'emploi, ceux-là mêmes qui portent aujourd'hui des gilets jaunes. Nous leur apportons ainsi une réponse.
Vous avez évoqué les contrats aidés, madame la sénatrice. Je rappelle que, en 2018, ce sont 11 000 contrats qui ont été confirmés à La Réunion, ce territoire étant ainsi celui qui en bénéficie le plus. Tous ces contrats ne sont effectivement pas utilisés, une part du nouveau système reposant sur l'autofinancement, mais ces 11 000 contrats sont toujours en partie disponibles.
La mission « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2019, que je porte, prévoit des investissements qui pourront être soutenus. Un certain nombre de petits projets des communes seront réalisés et permettront d'apporter des réponses à tous les jeunes qui commettent des méfaits scandaleux la nuit lorsqu'ils prennent le relais des « gilets jaunes ». (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – M. Jean-Claude Requier applaudit également.)
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.