Mme Raymonde Poncet-Monge interroge Mme la ministre de la transition écologique sur le projet Prométhée duquel fait partie le projet de nouvelle centrale thermique Larivot censée remplacer celle de Degrad-des-Cannes. La ministre de la transition écologique a annoncé dans un communiqué de presse le 17 octobre 2020 que la centrale fonctionnera entièrement aux biocarburants dès sa mise en route alors que l'arrêté préfectoral n° R03-2020-10-22-004 d'autorisation environnementale pour l'exploitation de la centrale de production d'électricité d'EDF production électrique insulaire (PEI), sur la commune de Matoury assure qu'à « la mise en service de la centrale thermique, les moteurs fonctionnent au fioul domestique. »
Mais que ce soit l'un ou l'autre des carburants, elle s'interroge sur la pertinence écologique globale du projet Larivot compte tenu du fait que plusieurs études démontrent la nocivité de l'usage de certains biocarburants pour l'environnement notamment à cause du changement indirect d'affectation des sols. Cela a été démontré par exemple par une étude commandée en 2015 par la Commission européenne et reprise par le consortium d'organisations non gouvernementales (ONG) « transport and environment » qui conclut que 1 litre de biodiesel émet 80 % d'émissions de gaz à effet de serre (GES) de plus que 1 litre de diesel pur. Ainsi selon l'étude, le biodiesel causera une hausse de 4 % des émissions de GES par rapport au scénario d'un diesel pur. Pareillement en 2013, une étude du commissariat général au développement durable concluait que la prise en compte des changements indirects d'affectation des sols dans la production des biocarburants confirmait « leur rôle négatif sur le bilan carbone des biocarburants ». Enfin, un rapport parlementaire déposé en mars 2020 à l'Assemblée nationale souligne que « la conversion de terres à usage non agricole en terres à usage agricole peut provoquer la libération du carbone stocké dans les sols et créer une « fuite de carbone » qui limite l'impact positif de la production de biocarburants sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre. »
Par ailleurs, elle souligne que le choix de construire la centrale du Larivot sur une forêt de mangrove représente un risque sensible pour la biodiversité qui a été souligné en 2019 par l'autorité environnementale dans son étude d'impact concernant le projet Prométhée, à la conclusion défavorable. L'autorité notait en effet que « Les impacts sur les milieux naturels et les zones humides sont très forts. Les mesures de compensation proposées ne remplissent pas les conditions requises par la démarche « éviter, réduire, compenser » ».
Considérant tous ces éléments, elle s'étonne que la centrale du Larivot soit présentée comme un projet écologique et viable. Elle s'étonne que le projet Prométhée, malgré son coût à hauteur de 500 millions d'euros, soit privilégié à d'autres projets alternatifs comme celui présenté par le cabinet Deloitte et le fonds mondial pour la nature (WWF) en 2018, celui du groupement des entreprises en énergies renouvelables de Guyane (GENERG) présenté en 2019, voire à celui proposé par l'entreprise hydrogène de France (HDF) dans la commune de Mana dont le projet de centrale à production d'hydrogène via le photovoltaïque semble bloqué auprès de la commission de régulation de l'énergie (CRE) depuis plus d'un an.
Elle aimerait donc des éclaircissements sur les raisons pour lesquelles le projet Larivot semble privilégié alors même que d'autres projets moins coûteux, plus intensifs en créations d'emplois, plus efficaces en termes de production énergétique, maillant mieux le territoire et plus respectueux de l'environnement ont été présentés ou pourraient être en cours de réalisation
Afin de garantir la sécurité d'approvisionnement en électricité de la Guyane dans un contexte de croissance forte de la demande, il était envisagé jusqu'alors, conformément à la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) de 2017, de remplacer la centrale au fioul lourd de Degrad-des-Cannes, vétuste et qui sera arrêtée en 2023, par une centrale à fioul léger. Suite à un échange avec M. Rodolphe Alexandre, Président de la Collectivité Territoriale de Guyane, et au regard de l'impact écologique d'un tel projet, il a été demandé à EDF de réorienter le projet et de retenir la biomasse liquide comme unique source d'énergie de la nouvelle centrale, dès sa mise en service industrielle. Cette réorientation du projet permettra de réduire considérablement les émissions de gaz à effet de serre puisqu'elles seront au moins 3 fois inférieures au projet initial et 4 fois inférieures à celles de l'actuelle centrale de Degrad-des-Cannes. Ce projet réduira également fortement les émissions d'oxydes d'azote (- 64 %) et d'oxydes de soufre (- 99,6 %). Un plan d'approvisionnement du territoire en bioliquides durables, incluant un volet lié à la production locale, devra être arrêté d'ici 2023. Une attention toute particulière sera portée sur le respect des critères de durabilité des biocarburants qui devront être conformes aux directives européennes. En particulier, ils ne devront pas provenir de matières premières présentant un risque élevé d'induire des changements dans l'affectation des sols. L'utilisation d'huile de palme et de soja sera notamment exclue. Le projet se substitue à toutes les installations fossiles existantes et polluantes sur Cayenne et à la turbine à combustion fixe de Kourou. La puissance de la centrale sera adaptée avec d'éventuelles mises sous cocon de moteurs, en fonction du développement des projets d'électricité renouvelable et de l'équilibre offre-demande, comme le prévoit l'arrêté préfectoral d'autorisation environnementale signé le 22 octobre 2020. Outre le permis de construire, le projet de la centrale électrique du Larivot est concerné par quatre procédures nécessitant chacune une enquête publique : autorisation environnementale, autorisation de Construire et d'Exploiter la canalisation de transport au titre du code de l'environnement, déclaration d'Utilité Publique pour la canalisation de transport et déclaration de Projet de la centrale électrique. Conformément à l'article L. 123-5 du code de l'environnement, une enquête publique unique a été conduite de manière dématérialisée du 15 mai au 15 juin 2020. Le commissaire enquêteur a rendu un avis négatif le 23 juillet 2020 mettant en exergue les impacts liés au chantier notamment la gestion des remblais et les transports routiers. Suite à cette enquête publique, EDF-PEI a apporté des précisions et des modifications, notamment sur l'implantation du site, qui ont été présentées au Conseil Départemental de l'Environnement et des Risques Sanitaires et Technologiques (CODERST) du 1er octobre 2020. Suite à l'avis de ce conseil, les arrêtés suivants ont été publiés : l'arrêté préfectoral déclarant la centrale du Larivot d'intérêt général et valant mise en compatibilité du PLU de Matoury a été publié le 19 octobre 2020 ; l'arrêté, publié le 23 octobre 2020, d'autorisation environnementale pour l'exploitation de la centrale de production d'électricité d'EDF-PEI, sur la commune de Matoury, en Guyane ; l'arrêté, publié le 2 décembre 2020, déclarant d'utilité publique la canalisation de transport d'hydrocarbures entre les sites du port de Dégrad des Cannes et du Larivot et valant mise en compatibilité des PLU des communes traversées ; les arrêtés instaurant les servitudes de passage et de maîtrise de l'urbanisation relatif à la canalisation, publiés respectivement les 17 et 18 décembre 2020. En sus, suite à l'approbation de l'évolution du PLU de la commune de Matoury par déclaration de projet, l'arrêté du préfet de Guyane délivrant le permis de construire à EDF-PEI, en vue de la construction de la centrale électrique du Larivot a été signé le 22 octobre 2020 et affiché sur site le 27 octobre 2020. Pour accélérer le développement des énergies renouvelables et lever les freins à leur implantation, en particulier concernant l'énergie photovoltaïque, le principe d'une révision simplifiée de la PPE a été convenu avec la Région d'ici fin 2020 pour acter juridiquement : la conversion de la centrale aux bioliquides, la priorité donnée aux installations de production d'électricité renouvelable valorisant une source de production locale, le principe selon lequel la centrale a vocation à assurer les ajustements nécessaires à l'équilibre offre-demande, un plan d'approvisionnement du territoire en bioliquides durables, incluant un volet lié à la production locale, devra être arrêté d'ici 202, en complément et afin de favoriser le développement de projet photovoltaïque à puissance garantie en complément des projets biomasse, il est proposé d'exclure ces projets de la limitation de surface cumulée des installations solaires au sol. Cette orientation devra aussi faire l'objet d'une révision simplifiée du Schéma d'Aménagement Régional. Cette modification simplifiée ne remet pas en cause les travaux de révision de la PPE actuellement en cours. Ces orientations répondent aux enjeux guyanais en matière d'énergie : garantir la sécurité d'approvisionnement en électricité dans un contexte de forte croissance démographique, avec une population très inégalement répartie sur le territoire et un taux de croissance très hétérogène, s'inscrire dans la trajectoire de la PPE et de la stratégie outre-mer 5.0 vers une production d'énergie décarbonée. Avec la Collectivité territoriale de Guyane, l'État appuie la dynamique de la transition énergétique avec : la structuration de la filière de la biomasse par le Contrat de Transition Energétique qui doit permettre de réaliser les objectifs inscrits dans la PPE ; le relèvement des ambitions portées par la collectivité et l'État sur la maîtrise de la demande en énergie (MDE) et le renforcement des moyens (+125 M€) qui devraient diminuer de 14 % la consommation d'électricité du territoire par rapport à la consommation constatée en 2017 ; la territorialisation pour chaque ZNI des appels d'offres relatifs aux énergies renouvelables, notamment le photovoltaïque, qui doit permettre de répondre exactement aux objectifs de la PPE ; le développement de projets innovants recourant notamment à l'hydrogène.
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