M. Claude Bérit-Débat. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
Monsieur le secrétaire d'État, nous sommes nombreux à vous interroger sur l'accord avec les pays du Mercosur, que l'ensemble des écologistes et des agriculteurs sont unanimes à dénoncer, ce qui devrait vous interpeller.
Nos agriculteurs, qui doivent respecter des normes toujours plus strictes, sont très inquiets de la concurrence déloyale générée par cet accord, qui est en totale opposition avec nos ambitions agroécologiques.
M. Jean-Marc Todeschini. Eh oui !
M. Claude Bérit-Débat. Il s'agit d'une aberration pour notre agriculture, malgré vos dires.
Comment pouvons-nous imaginer faire face à l'importation de milliers de tonnes de viande de bœuf, de porc, de volaille et de sucre sans dégâts sur nos filières ?
C'est aussi une aberration pour la santé de nos concitoyens. Comment pouvons-nous nous assurer du respect de nos normes face aux pratiques agricoles de ces pays – OGM, pesticides, antibiotiques, absence de traçabilité… Nous n'y parvenons même pas aujourd'hui, au sein de l'Union européenne.
C'est une aberration écologique et politique. Peut-on ouvrir nos frontières économiques au Brésil, dont le gouvernement fait fi des accords de Paris, déforeste à tout-va et piétine les droits sociaux ?
Monsieur le secrétaire d'État, nous attendons de vous d'autres garanties que celles que vous venez d'énumérer dans vos réponses et qui sont notoirement insuffisantes pour s'assurer du respect des normes sociales, environnementales et sanitaires et sauver notre agriculture et le climat.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste. – M. Henri Cabanel applaudit également.)
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, je vous remercie de m'interroger sur ce processus de négociations entre l'Union européenne et les pays du Mercosur.
Ce processus a notamment été relancé lors du Conseil européen des 20 et 21 octobre 2016, où François Hollande siégeait.
(Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Jean-Marc Todeschini. C'est donc de lui que viennent tous nos ennuis ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État. Il s'agit simplement de bien expliquer l'origine de ces discussions et la façon dont nous les avons fait aboutir, avec un certain nombre de garanties qui, jusqu'à présent, n'avaient pas été obtenues.
Comme je l'ai déjà souligné, les tonnages concernent des quantités minimes par rapport à notre production nationale et à la consommation nationale et européenne.
(Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
En matière de contrôles sanitaires, nous sommes et resterons intraitables. Bien évidemment, des audits auront lieu dans les abattoirs, sur place.
Il y aura également des contrôles dans nos ports, chez les distributeurs. Nous continuerons à monter en puissance, notamment grâce aux 400 douaniers supplémentaires qui ont été recrutés récemment.
M. Jean-Marc Todeschini. Pour le Brexit !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État. Par ailleurs, un certain nombre de produits de qualité, français et européens, ont été reconnus dans cet accord. Nous diffusons ainsi notre modèle, fondé sur les IGP.
M. Michel Raison. Il n'y a pas que les IGP !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État. Les Américains, qu'ils soient du nord ou du sud, n'ont pas cette habitude. Ces accords permettent de diffuser nos normes.
(Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
En ce qui concerne l'environnement, le Brésil a souscrit à l'accord de Paris. Son président l'a signé noir sur blanc.
(Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme Laurence Rossignol. Vous faites confiance à Bolsonaro ? Vous êtes bien le seul !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État. Il s'est engagé à planter 12 millions d'hectares de forêt supplémentaires et à diminuer de 37 % les émissions de gaz à effet de serre.
Nous avons mis en place une nouvelle méthode, avec une étude d'impact et une étude scientifique indépendantes pour vous permettre de juger vous-mêmes sur pièces et sur place.
(Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour la réplique.
M. Claude Bérit-Débat. Monsieur le secrétaire d'État, aujourd'hui, le Brésil déforeste à tout-va. Il continuera de le faire jusqu'à ce qu'il soit obligé d'arrêter.
Par ailleurs, les contrôles que vous évoquez ne pourront donner lieu à aucune sanction.
S'agissant des quantités importées, nous parlons tout de même de milliers de tonnes – presque 100 000 – de viande de bœuf, de porc ou de volaille, qui vont forcément déstabiliser le marché.
Interrogez-vous un peu : de la FNSEA jusqu'à la Confédération paysanne, tout l'arc-en-ciel des organisations agricoles fait front contre cet accord. Pourquoi sont-ils aussi remontés ?
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Claude Bérit-Débat. Enfin, monsieur le secrétaire d'État, introduisez un peu plus de démocratie dans l'examen de ce traité. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.