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Monique Lubin
Question orale N° 800 au Ministère de la transition


Structures d'accueil de jeunes

Question soumise le 16 mai 2019

Mme Monique Lubin attire l'attention de Mme la ministre du travail sur la menace pesant sur l'activité de certains lieux de vie et d'activités tels que définis notamment par l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, du fait de l'absence de décret d'application des modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés pourtant prévu au cinquième alinéa de l'article L. 433-1 du même code.

L'association « l'escale » à Castandet dans les Landes, est tout particulièrement concernée par ce problème. Conformément aux dispositions de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, cette structure assure en effet l'accueil de jeunes pré-adolescents à titre temporaire ou selon un mode séquentiel, à temps complet avec hébergement en internat par des équipes qualifiées.

Elle œuvre de fait à l'éducation, à la protection, à l'émancipation civique, à la surveillance et à la formation de dix-huit jeunes adolescents de plus de quatorze ans. En très grande difficulté, ceux-ci lui sont quotidiennement confiés dans le cadre de son travail en partenariat avec le conseil départemental, l'éducation nationale et la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). L'association bénéficie d'un autre agrément pour accueillir, pendant les week-ends et les périodes de vacances scolaires – et toujours à la demande du pôle de la protection de l'enfance du conseil départemental des Landes -, six enfants ou pré-adolescents âgés de 8 à 14 ans.

Pour cette mission, l'association dispose de deux équipes de deux éducateurs permanents bénéficiant d'un contrat à durée indéterminée (CDI), aidés d'un salarié disposant d'un contrat emploi avenir. Du fait de la spécificité de leur mission, leurs emplois du temps se caractérisent par des amplitudes horaires particulièrement importantes qui rendent impossible l'application des règles de droit commun instaurées en matière de durée du travail ou d'aménagement du temps de travail telles qu'elles figurent dans les dispositions des articles L. 3121-10 et 34, L. 3132-1, 2 et 3 du code du travail.

L'association devrait par conséquent bénéficier du dispositif dérogatoire du droit commun prévu à l'article L. 433-1 du code de l'action sociale et des familles, qui dispose que les permanents responsables de la prise en charge exercent sur le lieu d'accueil un accompagnement nécessairement continu et quotidien des personnes accueillies.

Or l'application de ce dispositif dérogatoire est subordonnée à l'application de modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés définies par voie de décret, mentionné au cinquième alinéa dudit article.

À ce jour, il semblerait qu'aucun décret n'ait été publié, ce qui suscite des difficultés d'application et favorise l'émergence de contentieux qui pourraient être de nature à remettre en cause l'existence même de ces lieux d'accueil.

Elle lui demande donc si les dispositions de l'article L. 433-1 du code de l'action sociale et des familles peuvent être appliquées au sein d'une structure d'accueil comme l'escale, sans autres restrictions que celles résultant du respect du nombre de jours de travail prévu par la loi, ou si des adaptations législatives ou réglementaires sont envisagées pour organiser les temps de travail et de repos des salariés concernés pendant leur période d'activité, dans le respect de ce type de structures ainsi que de l'environnement juridique interne communautaire.

Réponse émise le 5 juin 2019

Mme Monique Lubin. Madame la secrétaire d'État, j'attire l'attention du Gouvernement sur les difficultés que pourrait entraîner pour certains lieux de vie et d'activités, définis notamment par l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, l'absence de décret d'application des modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés, pourtant prévu au cinquième alinéa de l'article L. 433-1 du même code.

Dans mon département, l'association L'Escale est tout particulièrement concernée. Cette structure accueille des jeunes préadolescents à titre temporaire ou selon un mode séquentiel, à temps complet avec hébergement en internat et encadrement par des équipes qualifiées. Ce travail est mené en partenariat avec le conseil départemental, l'éducation nationale et la protection judiciaire de la jeunesse. L'association bénéficie d'un autre agrément, pour accueillir, pendant les week-ends et les périodes de vacances scolaires, six enfants ou préadolescents âgés de 8 à 14 ans.

Pour cette mission, elle dispose de deux équipes de deux éducateurs permanents, aidées d'un salarié en contrat emploi d'avenir. Du fait de la spécificité de leur mission, les emplois du temps de ces personnels présentent des amplitudes horaires très importantes, rendant impossible l'application des règles de droit commun. L'association devrait en conséquence bénéficier du dispositif dérogatoire prévu à l'article L. 433-1 du code de l'action sociale et des familles, aux termes duquel les permanents responsables de la prise en charge exercent sur le lieu d'accueil un accompagnement nécessairement continu et quotidien des personnes accueillies.

Alors que la mise en œuvre de ce dispositif dérogatoire est subordonnée à l'application de modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés définies par voie de décret, mentionné au cinquième alinéa du même article, il semble à ce jour qu'aucun décret n'ait été publié, ce qui pourrait susciter des difficultés d'application et favoriser l'émergence de contentieux de nature à remettre en cause l'existence même de ces structures.

Madame la secrétaire d'État, ces lieux d'accueil doivent être sécurisés : le décret d'application va-t-il paraître ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Monique Lubin, je vous réponds en lieu et place de Muriel Pénicaud, ministre du travail, qui n'a pas pu se présenter devant le Sénat ce matin.

Vous vous inquiétez de la situation des lieux de vie et de leurs salariés permanents et assistants permanents, dont la réglementation en matière de durée du travail dépend d'un régime spécifique, inscrit à l'article L. 433-1 du code de l'action sociale et des familles. Cet article renvoie à un décret, qui à ce jour n'a pas été pris, relatif aux modalités de suivi de l'organisation du travail de ces salariés.

Vous vous interrogez aussi sur la nécessité d'adaptations législatives ou réglementaires afin de sécuriser le régime prévu à cet article.

Dans un arrêt récent, la Cour de cassation a considéré que l'absence de décret d'application de l'article L. 433-1 du code de l'action sociale et des familles fait obstacle à l'application du régime prévu par ce texte pour ces salariés. Elle a estimé que, faute de mise en place de modalités de suivi de l'organisation du travail des salariés par un décret, comme la loi le prévoit, l'exigence constitutionnelle de droit à la santé et au repos des salariés n'était pas assurée.

Or la présence de permanents auprès des publics fragiles est une nécessité et justifie des dérogations. C'est donc à raison que vous souhaitez une fondation juridique solide à ce régime dérogatoire, d'autant plus nécessaire depuis l'arrêt que j'ai mentionné.

Je rappelle que la directive 2003-88-CE concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail organise la protection des salariés en matière de durée du travail et permet des dérogations dans le droit national, notamment pour les activités de garde, de surveillance et de permanence caractérisées par la nécessité d'assurer la protection des biens et des personnes. Les activités visées par l'article L. 433-1 du code de l'action sociale et des familles semblent entrer pleinement dans ce cadre.

Les services du ministère du travail, en liaison avec ceux du ministère des solidarités et de la santé, étudient actuellement les possibilités de sécuriser ce dispositif.

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