M. René-Paul Savary. Précisément, monsieur le président, c'est à M. le Premier ministre que j'entends m'adresser, en tant que rapporteur du projet de loi Retraites.
On voit bien que ce sujet est tabou dans notre pays. De fait, quand on bouleverse un « pacte de générations », pour reprendre l'excellente expression que vous avez employée hier soir, monsieur le président, lors de vos vœux, auxquels vous assistiez, monsieur le Premier ministre, il est normal que se produisent des réactions épidermiques.
Je souhaite des éclaircissements du Gouvernement sur les données dont le Sénat, notamment, pourra disposer pour se déterminer en toute sérénité et répondre aux questions des Français – à quel âge allons-nous partir, et avec quel montant de retraite ? –, sans oublier la question que se pose chaque sénateur : quel sera le coût de la réforme ?
M. Philippe Dallier. Eh oui !
M. René-Paul Savary. Monsieur le Premier ministre, vous nous demandez vingt-trois habilitations à légiférer par ordonnance : quelles garanties offrez-vous au Parlement ?
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des retraites.
(Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Patricia Schillinger et M. Martin Lévrier applaudissent.)
M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites. Monsieur Savary, je connais votre engagement sur le dossier des retraites. Le choix du Sénat de désigner, voilà plus de deux ans, un rapporteur spécial sur le sujet montre l'intérêt que votre assemblée porte au système de retraite.
Nous bousculons peut-être, il est vrai, un certain nombre de situations et d'éléments qui paraissaient acquis. De fait, nous nous sommes engagés à mener une grande transformation de notre système de retraite pour créer un système universel. Parlons simplement : il s'agit d'instaurer une caisse commune à nous tous et, avec elle, une solidarité qui ne soit plus fondée sur des critères professionnels ou statutaires, mais s'exerce entre tous les Français.
(Murmures sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SOCR.)
M. Pierre-Yves Collombat. Baratin !
M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État. Cette dimension peut conduire à s'interroger, notamment, tous ceux qui ont une caisse spécifique ou autonome.
Nous voulons créer un système plus solide. La réflexion menée au Sénat allait d'ailleurs dans ce sens : maintenir le système par répartition de façon solide et durable.
Pour ce faire, le Gouvernement a souhaité rappeler que l'équilibre du dispositif est la garantie de sa pérennité et un gage de sécurité pour tous les Français.
(Murmures redoublés sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)
Pour répondre précisément à votre question, monsieur le sénateur, l'étude d'impact que vous attendez sera disponible dès la présentation du projet de loi en conseil des ministres. Elle vous sera largement communiquée, et nous pourrons en débattre !
(Applaudissements sur les travées du groupe LaREM. – Exclamations et quelques huées sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)
M. François Patriat. Assez ! Respectez le secrétaire d'État !
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour la réplique.
M. René-Paul Savary. Monsieur le secrétaire d'État, merci pour ces précisions…
M. Pierre-Yves Collombat. Parce que vous appelez ça des précisions !
M. René-Paul Savary. … qui ne m'ont pas forcément rassuré.
De deux choses l'une : on réforme avec les Français ou contre eux, avec les parlementaires ou contre eux. Or, pour reprendre une expression syndicale, il y a une ligne rouge : si nous n'avons pas tous les éléments nécessaires, nous ne pourrons pas décider dans la sérénité !
Votre article 9 est généreux, puisqu'il prévoit l'indexation du point sur le salaire moyen. C'est tout à fait intéressant, mais comment finance-t-on cette mesure ? Par l'article 10, qui prévoit l'âge d'équilibre. Il faut donc bien dire la vérité aux Français : il faudra travailler plus pour maintenir cette générosité !
(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Patriat. C'est ce que nous disons !
(M. le Premier ministre le confirme.)
M. René-Paul Savary. A contrario, si l'on ne prend pas de mesures d'âge, le niveau des pensions baissera.
Il reste du chemin à faire : n'hésitez pas à prendre les mesures nécessaires pour respecter le Parlement, en particulier le Sénat ! (Applaudissements prolongés sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
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